Tribune
On ne construira pas l’économie de la confiance sans les consommateurs. Un écosystème vertueux autour des avis clients doit se généraliser. Tout le monde a à y gagner.

Il y a quelques semaines, Amazon a été épinglé par la presse pour avoir publié – à son insu – des avis clients frauduleux, certains vendeurs ayant monnayé des ristournes contre des appréciations positives. Le tollé suscité par cette tromperie à grande échelle montre à quel point le sujet est sensible, complexe, mais aussi fondamental pour le développement de l’économie numérique.

Indissociables du e-commerce depuis ses origines, les avis clients font partie des usages digitaux qui ont connu une forte accélération durant le confinement. Pendant cette période, les consultations sur les sites marchands ont bondi de 45% et la tendance ne se dément pas depuis. Assaillis d’informations suspectes, doutant de tout, les internautes cherchent à se rassurer et la seule voix qui leur semble digne de foi est celle de leurs pairs. Désormais, 92% des consommateurs consultent des avis avant l’achat, que celui-ci soit ensuite réalisé en ligne ou en boutique. Bref, c’est devenu un élément incontournable – et souvent décisif – du parcours client.

L’affaire Amazon montre que le système n’est pas infaillible, même pour le premier e-commerçant au monde, mais les professionnels du secteur, les marques, les pouvoirs publics et les associations de consommateurs s’attachent à le rendre chaque jour plus crédible. En France, tous ces acteurs ont œuvré à mettre en place un cadre d’éthique et de qualité certifié par l’Afnor.

Combat pour la transparence

Les bonnes pratiques se généralisent, comme des mécanismes obligeant à afficher les notes défavorables ou la mise en place d’un processus de modération pour les avis les plus négatifs. Le client est alors invité à formuler ses griefs de façon factuelle, sans propos insultants ni diffamatoires, tandis que le vendeur a la possibilité de lui répondre et de s’expliquer. Dans ce combat pour la transparence, la technologie est aussi appelée à jouer un rôle de plus en plus important, que ce soit l’intelligence artificielle, pour repérer les fraudes, ou la blockchain, pour authentifier sans ambiguïté l’auteur d’un avis.

À cette maturité croissante du secteur répond celle des consommateurs, qui développent peu à peu une culture de l’avis. En tant qu’acheteurs/auteurs, ils sont de plus en plus actifs et souvent très pertinents dans leurs remarques puisqu’ils partagent les informations qu’ils auraient eux-mêmes aimé lire avant leur achat. Et en tant que lecteurs, ils savent repérer les râleurs impénitents et les clients dont le profil ne correspond pas au leur, et les écarter pour se focaliser sur les commentaires les plus utiles.

S’ils souhaitent développer un environnement de confiance réciproque propice à leur activité, les e-commerçants ne peuvent que se réjouir de cette implication et de ce discernement des consommateurs. Cela signifie qu’ils ne doivent ni craindre ni sous-estimer leurs clients, bien au contraire. Avec 80% de notes favorables, l’expérience montre que les consommateurs sont exigeants mais justes, et qu’ils comprennent les difficultés qui ont pu survenir pourvu qu’on les leur explique avec promptitude, clarté et transparence. La confiance que l’on accorde à ses clients est plus que repayée par la valeur que l’on peut tirer de leurs avis.

Outil au service de la qualité

Les avis clients favorisent bien sûr le taux de conversion, mais aussi, avant cela, le référencement naturel puisque les algorithmes des moteurs de recherche favorisent les sites qui en affichent. C’est aussi un moyen de canaliser et d’atténuer les mécontentements qui, sinon, trouvent toujours à s’exprimer de façon exacerbée et incontrôlée sur les réseaux sociaux. De plus en plus de marques utilisent aussi les avis clients comme un outil au service de la qualité, en enquêtant auprès des clients insatisfaits, voire en déréférençant des produits trop souvent incriminés.

L’analyse sémantique peut même permettre d’aller plus loin et de détecter, par exemple, des défauts récurrents ou les faiblesses de certains partenaires. Enfin, ce peut être un élément de segmentation, contribuant à définir des profils types, et donc à améliorer ciblage, personnalisation, et cross et up-selling. Savoir ce qu’un consommateur a acheté, c’est bien ; savoir ce qu’il a pensé de son achat, c’est beaucoup mieux.

En fait, le véritable risque face à tant de possibilités, c’est d’aller trop loin. La confiance est une chose fragile et il faut veiller à ne pas la briser en mettant une pression excessive sur le client, en lui réclamant son avis de façon trop insistante, en lui posant des questions trop nombreuses ou ambiguës, ou en le rendant complice de pratiques qu’il désapprouverait. Il faut avoir conscience de la puissance, mais aussi des limites de cet outil dont la principale qualité est aussi la principale faiblesse : il reste fondamentalement humain.

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