Les Jeux olympiques seront-ils vécus comme un événement réservé à une élite, ou réussiront-ils à rassembler tout le pays à travers une « France qui gagne » ? Pour les entreprises comme pour les politiques, surfer sur la vague des JO ne sera pas de tout repos.
Parenthèse enchantée ou scepticisme distancié ? Montée en puissance de l’enthousiasme ou électro encéphalogramme plat pendant des semaines ? Emballement estival ou morosité des quatre saisons ? Il est bien sûr encore trop tôt pour dire de quel côté de l’opinion retombera la médaille olympique et comment les Français vont vivre cet évènement planétaire. Les enquêtes publiées restent ambivalentes mais pas follement encourageantes. En août, soit un an avant la cérémonie d’ouverture (Elabe pour Les Echos et l’Institut Montaigne), seul un Français sur cinq se disait enthousiaste à l’égard des Jeux olympiques, un sur deux se déclarait indifférent et un sur trois sceptique. Et si en novembre, 65 % des Français pensaient que la tenue des Jeux était une bonne chose, il faut noter qu’ils étaient 69% en mars et 76% il y a deux ans (Odoxa pour RTL).
Pas de rejet donc, mais on est pour l’instant loin de la liesse populaire. Nombreux sont ceux qui rappelleront que les autres villes hôtes de la compétition aux cinq anneaux ont plus ou moins connu les mêmes séquences. Mais le climat que traverse notre pays influera forcément sur l’adhésion ou non aux JO.
Des JO élitistes ou rassembleurs ?
Côté face : le pessimisme chronique de nos concitoyens , le sentiment du déclin, les légitimes inquiétudes sécuritaires, les querelles politiques sur fond de pré-campagnes municipales, les polémiques facilement inflammables comme celle sur les restrictions de circulation, celle sur le prix du ticket de métro, ou sur la propreté de la ville capitale. Ajoutons-y la pression de l’inflation qui explique que 3 personnes sur 4 considèrent que le prix des billets est trop important et « qu’il restreint l’accès des compétitions aux personnes qui en ont les moyens » et vous parviendrez à identifier une critique de fond : les JO seront-ils vraiment l’évènement populaire qu’on nous avait vendu ? Ne seront-ils pas avant tout un évènement privilégiant touristes et happy few, mais laissant aux vestiaires l’enjeu majeur de l’accès pour tous. Dans une société marquée par le sentiment d’injustice, cette barrière renforcerait la mise à distance de l’évènement, vécu potentiellement comme un rendez-vous pour « ceux d’en haut ».
Mais les raisons d’espérer sont également très présentes. Côté pile déjà perçu : l’impact positif pour le tourisme (69% des Français), le développement du sport (68%), le dynamisme économique (61%) et la place de la France dans le monde (58%). Côté pile à activer : l’envie de sortir de la morosité ambiante, la fierté de ce pays pour accueillir de grands évènements, et bien sûr malgré l’aléa inhérent à la compétition de haut niveau, la possibilité comme le proclame une belle campagne publicitaire récente de « voir la France gagner ».
Pile ou face : pour les entreprises qui s’apprêtent à surfer sur la vague des JO, l’exercice ne s’annonce pas non plus de tout repos. Partenaires officiels, ou acteurs engagés dans la réussite des JO, en pub, en RP, sur les réseaux sociaux, comment ne pas faire de faux départ, comment saisir le moment ou l’opinion entrera vraiment dans le « moment » olympique, comment parler à tous les publics sans apparaître décalé si l’évènement apparaissait comme trop « élitiste » ? Comment créer de la proximité, de l’affect, si le pays se contente d’une distance polie face à l’évènement tant attendu depuis des années ?
Pile ou face : pour les politiques aussi, la tonalité ne sera pas facile à tenir entre le champ des critiques et l’envie d’unité même éphémère. Car au-delà d’innombrables débats, la question centrale apparait simplement. Dans un pays où deux tiers des personnes interrogées répondent régulièrement que ce qui les divise est plus fort que ce qui les rassemble, les Jeux olympiques mettront-ils sur pause, et si oui pour combien de temps, la fragmentation du pays ? Rien n’est moins sûr. Mais la force du rêve olympique permet d’espérer.