Depuis 1851, les expositions universelles sont des vitrines de l’innovation industrielle et architecturale mondiale. Dans le passé, le grand public y a découvert le téléphone, la tour Eiffel, l’escalator… En sera-t-il de même avec la prochaine édition ? Remportée par les Émirats arabes unis, celle-ci aura lieu du 20 octobre 2020 au 10 avril 2021 à Dubai sur le thème « Connecter les esprits, construire le futur ». Un programme ambitieux. Il y sera question d’éducation, de nouvelles solutions de transports, d’énergies renouvelables. Si le site et les différents pavillons restent encore à l’état de vues 3D, le Bureau international des expositions (BIE), qui gère toutes les expositions internationales, a publié un descriptif : « Le site est conçu tels trois pétales convergeant vers un point focal, Al Wasl Plaza, […] le nom historique de Dubai, signifiant “connexion”. D’un diamètre de 150 mètres, Al Wasl sera dotée d’un immense dôme en treillis qui fera office de surface de projection immersive à 360 degrés. Elle sera reliée à la ligne du métro Dubai 2020 et au pavillon des Émirats arabes unis, à la forme d’un faucon. Chaque pétale correspond à un district thématique – opportunité, mobilité et durabilité. Le pavillon de l’Opportunité sera construit entièrement à partir de matériaux écologiques, tandis que le pavillon de la Durabilité explorera les dernières technologies durables. »
Aux avant-postes du changement climatique
Il peut sembler étonnant que Dubai, connue pour son gigantisme en plein désert, ait été choisie pour abriter un événement sur les innovations durables. On peut y voir un instrument de soft power pour les Émirats arabes unis, qui se positionnent comme un hub financier, aérien et touristique. Mais pour Antoine Croisé, directeur de l’agence Auditoire Dubai qui travaille avec le comité d’organisation, la ville a beaucoup à offrir en termes de solutions environnementales : « Dubai est aux avant-postes du changement climatique du fait de sa position géographique et de son climat. Elle connaît des chaleurs caniculaires, elle ne produit que 10 à 15 % de sa nourriture, elle se prépare à la transition postpétrole. Mais elle construit des quartiers écologiques qui se veulent des laboratoires des villes du futur et crée des fermes organiques dans le désert. Le cahier des charges de l’Exposition est drastique avec des panneaux solaires, une politique zéro déchet, la récupération des eaux de pluie, un système d’irrigation en goutte à goutte, la transformation de l’humidité ambiante en eau potable, une canopée de plantes locales entretenues sans engrais… 80 % du bâti devra avoir une seconde vie. »
Établie au Moyen-Orient depuis quinze ans et à Dubai depuis cinq ans, Auditoire fait partie des quelques agences déjà choisies par le comité d’organisation pour gérer les événements menant à l’inauguration : compte à rebours des deux ans, pose de la première pierre, réunions d’information pour les pays et les sponsors, lancement du plan de volontariat, cercles de discussions partout dans le monde pour amplifier les contenus… L’agence a bénéficié de sa connaissance du marché local et de son expérience des grandes expos, notamment Shanghai en 2010. La dernière édition, Milan en 2015, a également favorisé un écosystème local qui se retrouve sur ce rendez-vous, comme l’agence Balich Worldwide Shows, connue pour ses cérémonies spectaculaires. Jack Morton Worldwide, HQ Worldwide Shows et LinkViva sont les autres agences sélectionnées, mais l’essentiel des appels d’offres, pour les cérémonies d’ouverture et de clôture notamment, doit aboutir en septembre ou en octobre.
Les pavillons nationaux sont pour leur part gérés par des consortiums entre agences, bureaux d’architectes et entreprises du bâtiment locales. Leur construction devrait commencer en janvier 2020. Le groupe franco-allemand Museum Manufactory est le mandataire du groupement en charge de la conception et de la réalisation de la scénographie de l’exposition permanente du pavillon France. « Une Exposition universelle, c’est un festival de l’événementiel, assure Antoine Croisé. Toutes les agences spécialisées en méga-événements se positionnent. Celles qui ont travaillé sur les Jeux olympiques de Londres par exemple vont vouloir revendre leur expertise. »
Face aux ambitions de ce type de projet, on peut se demander si les expositions universelles ont encore une raison d’être dans le monde connecté et durable de demain. L’Expo 2020 Dubai, première édition dans la zone Moyen-Orient, Afrique et Asie du Sud, attend 25 millions de visiteurs, dont 70 % d’étrangers (la proportion inverse de l’Exposition universelle de Shanghai). Tous les avions qui vont converger vers Dubai sont-ils bien raisonnables quand on parle de respect de la planète ? « Les gens ont besoin d’endroits pour se réunir et pour parler, surtout dans un monde saturé de fake news, réplique Antoine Croisé. C’est l’occasion de voir des prouesses technologiques et d’architecture qu’on ne verra pas ailleurs. Dubai est la ville des superlatifs, entre mer et désert, qui attire aussi bien les résidents du Golfe que les Chinois et les Occidentaux. On vit dans un monde d’entertainement, on a besoin de ces lieux qui font rêver. » Une des nouveautés de cette édition, d’ores et déjà annoncée, sera d’ailleurs un opéra consacré à l’histoire des Émirats arabes unis et à leur dimension multiculturelle.
Chiffres clés :
200 nationalités différentes cohabitent à Dubai.
15,8 millions de personnes ont visité la capitale des Émirats arabes unis en 2017.
192 pays prendront part à l’Exposition universelle.
25 millions de visiteurs sont attendus pour l’événement.
95 % des déchets doivent être recyclés.