Choisir une belle route côtière pour tourner une pub de voiture… Oui, mais en Afrique du Sud, pas sous nos latitudes. Aujourd’hui, «deux tiers des films restent en France mais cela correspond aux films les plus mal dotés financièrement. C’est fort en quantité mais pas en volume financier», expose Julien Pasquier, président de l’APFP (Association des producteurs de films publicitaires). Concrètement, 969 films ont été réalisés en France l’année dernière - très loin devant les autres pays répertoriés -, avec, selon lui, des budgets globalement inférieurs à la moyenne. «La France concentre des films de petite taille (moins de deux jours de tournage) et plutôt digitaux», complète une étude thématique de l’APFP, l’UPC (Union des producteurs de cinéma) et Fyre & Co de juin 2019.
Les mêmes budgets
Selon Olivier Dubocage, producteur exécutif chez Wanda, «les clients ont envie de ramener des projets vers la France. Ils sont aussi fiers de montrer qu’ils ont réalisé des choses ici. En termes de production, nous devons rentrer dans les mêmes budgets». Parmi les derniers exemples de relocalisation en date, Buzzman pour PMU ou encore DDB pour McDonald’s.
Certains films n’auraient pas pu être tournés dans d'autres pays. C’est le cas de «Vertical Home», conçu par Fullsix et produit par Quad Productions pour les cuisines Schmidt. Sorti fin 2018, il montre un alpiniste utiliser du mobilier de cuisine sur une paroi rocheuse à pic. «Il aurait été “casse-gueule” de le faire ailleurs qu’en France car il fallait des techniciens ultra-estampillés », témoigne la société de production.
Reste, pour qu’un vrai mouvement s’amorce, un facteur bloquant. À cause du coût des tournages, les annonceurs y réfléchissent à deux fois avant de relocaliser. «La convention collective impose des tarifs très élevés qui posent des problématiques de compétitivité», affirme Jean Ozannat, cofondateur de la société de production Henry.
Sur la Riviera, la Commission du Film Alpes-Maritimes Côte d’Azur a répertorié 53 films tournés dans la région en 2018, contre 121 en 2017, 97 en 2016 et autant en 2015. Au-delà de la concurrence (Espagne, Europe de l’Est…), une raison plus conjoncturelle explique cette baisse : le Brexit. «Les Anglais voire les Européens sont dans une position attentiste voire d’inertie», explique Stéphanie Gac, responsable opérationnelle de la Commission. «Il y a le Brexit et la livre a perdu 40 % de sa valeur. Avant, les Anglo-saxons venaient en France, maintenant c’est plus cher», ajoute Frédéric Bovis, producteur chez KanZaman.
La suite ? «La question réside dans les incitations comme le crédit d’impôt dont notre industrie pourrait bénéficier pour relocaliser, note Jean Ozannat. «Aujourd’hui, [les clients] se détournent de la France, il faut se battre», conclut Frédéric Bovis.