[Billet] Se taire, est-ce n’en avoir rien à faire ? Certains ne tweetent pas, ne crient pas, ne manifestent pas. En cette période de brouhaha permanent, souffrent-ils moins ? Plus ? N’en pensent-ils rien ?
En ces heures de brouhaha continu, ayons une pensée pour tous les silencieux, les taiseux, les imbruyants. Ceux qui ne tweetent pas, ne crient pas, ne manifestent pas, ceux qui n’éditorialisent pas, ne blogguent pas, ne linkedinent pas. Ceux qui, dans le tintamarre moderne, tiennent simplement la barre de leur vie sans l’ouvrir.
Souffrent-ils moins ? Plus ? N’en pensent-ils rien ? Pensent-ils, seulement ? Se taire, est-ce n’en avoir rien à faire ? On peut s’interroger sur l’efficacité de jeter un bol de soupe sur Les Tournesols de Van Gogh (un tableau protégé par une vitre) et apprécier le geste. On peut trouver la performance artistique moyenne et l’acte militant opportun, la mise en scène ridicule et l’engagement admirable. Ou tout l’inverse. On peut soupirer devant le nouveau projet de gazier en Afrique du Sud de Total (qui devrait ruiner l’écosystème marin, selon les associations sur place) s’en réjouir (si on est actionnaire) ou vomir. On peut pleurer d’effroi devant le meurtre de la petite Lola à Paris. Et on peut faire tout cela en silence.
S’indigner sans ajouter ses cris aux alarmes médiatiques environnantes, sans nourrir les algorithmes de like, de pouces, de RT, de « share »… Sans gaver le tambour de la machine médiatique. L’ennui avec le monde moderne, c’est que la bataille de l’attention est en train de gagner, mais que la bataille de l’action recule. Alors bravo à tous les taiseux, en espérant qu’en silence, ils agissent.