Tribune
Contrairement à ceux qui lui prédisaient une mort prochaine, la communication interne a plus que jamais sa place au cœur des entreprises pour produire de la stabilité et créer du sens auprès des collaborateurs.

« La communication interne est morte. Et si ce n’est pas encore le cas, elle le sera bientôt. » Plus de deux ans après avoir été prononcée, la prophétie du directeur de la communication digitale de Walmart, Chad Mitchell, n’a heureusement pas eu lieu. Pourtant, cette théorie continue à faire son chemin et rencontre des adeptes. Son postulat ? Parce que le numérique a brouillé les frontières entre communication interne et communication externe, leur distinction n’aurait plus de sens. Un néologisme anglais a même vu le jour pour désigner cette super-communication centrée non plus sur la singularité des publics mais sur la transversalité des contenus : « eternal communications », contraction de « external » et « internal ».

Bien évidemment, il serait absurde de nier la porosité entre communication interne et externe. Twitter pénètre dans l’entreprise aussi facilement que la newsletter en sort. Dans ce contexte, la mise en commun de certaines ressources pour produire des contenus ou organiser des événements paraît même opportune, à la fois pour des raisons de budget et de cohérence des messages.

Néanmoins, cette convergence a fait naître un fantasme assez curieux selon lequel interaction vaudrait assimilation. Un employé se réduit-il au client qu’il peut être accessoirement ? Les tenants de la dissolution de la communication interne partent du principe qu’un salarié est une partie prenante de l’entreprise au même titre que les pouvoirs publics, les consommateurs, les fournisseurs ou d’autres.

Or cette croyance est largement discutable. Les collaborateurs d’un groupe sont indissociables de son existence et restent les meilleurs ambassadeurs de son image. D’ailleurs, en pratique, ils sont moins des « parties prenantes » que des « parties constituantes » de l’entreprise, pour reprendre la belle formule du rapport Notat-Senard de mars 2018. Ce n’est pas un hasard si les actionnaires (apporteurs de capitaux) et les salariés (apporteurs de travail) sont seuls éligibles à ce statut. Les parties prenantes gravitent autour de l’entreprise, les parties constituantes en forment le noyau central.

Des formats diversifiés

La singularité du public interne va naturellement de pair avec la singularité de la communication interne. D’autant qu’il est loin le temps où la communication interne regardait avec envie son homologue externe ! Du podcast aux vidéos live en passant par les applications mobiles ou le retour du print, elle a su diversifier les formats pour enrichir l’expérience collaborateur. Dans les sociétés cotées où la communication externe doit s’adapter à de nombreuses contraintes règlementaires, la communication interne est même souvent plus libre et moins soumise à la pression du court terme.

Tout le paradoxe est là : les appels insistants à la disparition de la communication interne interviennent précisément à un moment où celle-ci gagne en crédibilité. Deux études récentes – l’une réalisée par l’agence de communication britannique Gatehouse en février 2019, l’autre par l’Association française de communication interne (AFCI) en juin 2019 – montrent que la valeur ajoutée de la communication interne est désormais reconnue par les dirigeants d’entreprise et que cette fonction est amenée à se renforcer à l’avenir. Les universités emboîtent le pas des entreprises : depuis peu, Sciences Po Paris propose un enseignement dédié à la communication interne aux étudiants de son master « communication ».

À l’heure où la communication interne est perçue comme de plus en plus légitime à produire de la stabilité et créer du sens, nier sa spécificité serait sans doute une erreur pour ne pas dire un contresens. Aux communicants internes de prouver qu’on aurait tort de penser le contraire !

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