Chère Sophie,
Je tiens avant tout à vous rassurer : ces quelques lignes ne sont pas une énième déclaration en hommage à votre élégance naturelle, à votre indéniable beauté et à l’esprit qui la fait pétiller dans les salles obscures du monde entier. Quoique…
Non, il s’agit ici d’une proposition d’emploi. Alors je sais: vous n’avez nul besoin d’un emploi supplémentaire. Vous êtes déjà actrice, réalisatrice et ambassadrice de la classe française à l’étranger. C’est justement ce dernier point qui nous intéresse.
Puisque vous êtes déjà ambassadrice, que diriez-vous de devenir ministre?
Sophie Marceau, ministre de la République française. Avouez: ça sonne bien! Comme dirait ma fille: ça envoie.
Vous le savez: notre pays est surdoué, gâté et comblé. Il est depuis des années n° 1 du classement des pays où les habitants du monde veulent vivre (1). Paradoxe ! Ceux qui y vivent (les Français, donc. Jusqu’ici tout le monde suit) ne vont pas bien. Ils croient encore que leur mal-être collectif, leur «nous» abîmé, peut être soigné par un repli sur soi, un «je» salvateur. Triste illusion!
Résultat? Nous ratons l’occasion historique d’accueillir des réfugiés. À la place, on laisse notre réputation d’arrogance se répandre. On se fait dépasser par des concurrents moins pourvus parce que nous n’arrivons pas à nous doter d’une marque-pays. Notre qualité d’accueil et de service est hétérogène (pour rester poli). Notre tourisme, enfin, est coupé du monde économique et se noie dans un océan de structures issues de la décentralisation.
Bref, nous avons mal à notre hospitalité.
Et vous feriez, chère Sophie, une ministre de l’Hospitalité tellement parfaite!
L’hospitalité est un beau mot ! Il exprime «un droit réciproque de protection et d’abri» (2). Il remonte au XIIIe siècle et à la tradition monastique qui accueillait «tout homme, tout l’homme, et chaque homme». C’est l’hospitalité qui fera demain la différence entre une terre d’expatriés sur laquelle se sont posés casinos, hôtels et bains à remous, et un pays dont la population, au-delà de ses atouts et de ses infrastructures, a décidé de faire de l’accueil de l’autre sa valeur socle.
Sous votre autorité, les Français sauraient se poser cette simple question: quelle hospitalité voulons-nous incarner ?
Y répondre, c’est se donner les meilleures chances d’accueillir les Jeux olympiques en 2024 et l’Exposition universelle de 2025.
Pour cela, rien de bien compliqué: il faudrait que vous puissiez assister les deux prochains présidents de la République en mettant tout le cœur que l’on vous connaît à les impliquer dans cette cause. Je vous imagine déjà:
- lancer des états généraux de l’hospitalité,
- créer enfin une marque France qui regroupe secteur public et secteur privé,
- encourager partout l’innovation et la créativité,
- connecter toutes les initiatives,
- capitaliser sur les grandes marques qui font l’attractivité de notre territoire,
- doter de moyens un secteur qui pèse 7% du PIB.
Le nombre de touristes continue de progresser dans le monde (1,18 milliard de touristes internationaux en 2015, ils étaient 66 millions dans les années 1970!) L'Europe restera la région la plus visitée et la croissance devrait se poursuivre. En France, nous nous félicitons de la timide remontée des chiffres de fréquentation après les attentats? Tant mieux! Ce devrait être un formidable levier pour votre action.
Bien sûr, un tel agenda nécessite une totale disponibilité de votre part pour les 10 prochaines années. C’est un sacrifice pour vous… Comme pour nous. Mais l’immensité du service que vous rendriez à la France comblerait le vide laissé par votre absence à l’écran.
En acceptant de porter l’image de notre hospitalité, vous la doteriez de ce qui lui manque : une vision. Le secret de l’attractivité d’un territoire ne repose pas seulement sur l’énumération de ses atouts. Dans un monde d’images où le braquage de Kim Kardashian ruine en quelques minutes les efforts réunis d’Atout France et du secrétariat d’État au Tourisme, il faut une personnalité incontestable pour incarner et porter la vision de l’hospitalité à la française.
Si vous souhaitiez être aidée dans cette tâche vous pourriez nommer secrétaire d’État Marion Cotillard ou Vanessa Paradis qui, selon les Français, incarnent avec vous Marianne (3).
Je sais, chère Sophie, que vous seriez prête à rendre ce service (étymologie du mot ministre) à notre pays, et je suis sûr que beaucoup de Français auront à cœur de vous écrire leur reconnaissance en vous assurant, comme il se doit, de leur «très haute considération».
Respectueusement,
Denis Gancel, président cofondateur de l'agence W
(1) «Best Place to Live».
(2) Dictionnaire historique de la langue française.
(3) Étude Star Metrix.