L’émergence de la data a deux types de conséquence directe pour Médiamétrie. D’une part, elle pose la question de l’intérêt des panels pour mesurer les audiences, d’autre part, elle s’invite au cœur de l’achat d’espace, de plus en plus souvent basé sur la qualification des contacts individuels grâce aux données en temps réel, plutôt que sur les données disponibles en amont par le médiaplanning. Avec, pour corollaire, la part des outils techniques qui grimpe dans les coûts, et parfois aux dépens des recettes des éditeurs.
La data complète les panels
La data ne remplacera pas les panels tant qu’elle ne sera ni partagée ni mutualisée, qu’elle ne couvrira pas toutes les populations et qu’il lui manquera la profondeur temporelle pour calculer couverture et répétition. En revanche, son apport en termes de granularité et de précision sur les usages et les comportements est immense. Nous avons progressivement rapproché les données de panels avec celles d’usage pour créer des bases plus riches et plus précises, donnant ainsi naissance aux mesures d’audience hybrides.
Dès 2010, Médiamétrie a lancé la première mesure internet mobile d’Europe, nativement hybride avec les logs exhaustifs des opérateurs de télécoms. En 2012, la mesure internet ordinateur associait le panel «meter» avec les données «site-centric», en partenariat avec l’ACPM. Fin 2016, la mesure internet sera totalement hybride, y compris pour la mesure des tablettes. Une mesure sans donnée d’usage nous paraît totalement inconcevable.
Mesures hybrides pour la TV
En télévision, nous travaillons depuis 2014 avec Canalsat à l’exploitation de certaines de leurs données logs pour la mesure d’audience. Les résultats sont prometteurs. Le marché français bénéficie d’un atout très favorable: la part de l’ADSL dans les modes de réception des foyers est de plus de 45% (2e trimestre 2016). En ajoutant le câble et le satellite, c’est près de 80% des foyers qui seront équipés d’une box à l’horizon 2020.
Cela signifie qu’à terme, comme pour internet, le panel Médiamat pourra être totalement hybride. Ce serait une grande première dans le domaine des études TV, et une grande force partagée pour les chaînes et le marché publicitaire français. Cela permettra de répondre au double défi de la fragmentation des audiences et de la multiplication des cibles. Le développement de la donnée en télévision lui permettra de relever le défi des Gafa sur la publicité «adressée».
Le dynamisme d'internet ne profite pas à tous
Pour le média internet, le développement des plateformes programmatiques a été rapide, pour atteindre 60% du marché fin 2016. Il s’est accompagné d’un grand dynamisme des recettes, qui n’a profité qu’à certains acteurs… Au 1er semestre 2016, les recettes publicitaires internet hors moteurs de recherche ont enregistré une progression de 3,6% (source Irep). Combien d’éditeurs, après avoir lourdement investi dans la donnée, ont vu leurs recettes baisser, voire s’effondrer, victimes de leur dispersion. En plus de la puissance et de la qualité de leurs données, les Gafa profitent du soutien des annonceurs internationaux qui peuvent enfin substituer une politique internationale d’achat d’espace à une politique «locale». Les annonceurs internationaux l’ont rêvé, les Gafa l’ont fait!
Rapprochement entre médias
La télévision peut éviter cet écueil. Si le média se lance dans le programmatique, il fera face aux acteurs internationaux dans un marché vidéo qui englobera celui de la télévision. Il aura tout intérêt à s’unir pour atteindre une taille critique, mutualiser les investissements dans les technologies, définir un cadre et des standards communs (formats de données, cibles, segments de marchés), et enfin se rapprocher d’autres acteurs médias internationaux qui, eux-mêmes, sont en cours d’organisation.
Pour les médias, face aux défis de la data et de la technologie, seule l’union fera la force.