Mobilis in mobile
Cette semaine dans sa chronique Mobilis in mobile, Stéphane Distinguin, président de Fabernovel, vous livre ses réflexions sur le destin de Ross Ulbricht, le fondateur de Silk Road, condamné à la prison à vie. «Un criminel en ligne est sans doute une nouvelle forme de bandit, écrit-il. Preuve que la transformation numérique n’a pas de limite.»

Le jugement attendu depuis plusieurs semaines est tombé: vendredi 29 mai, Ross Ulbricht, le fondateur de Silk Road, a été condamné à la prison à perpétuité. Mais qu’est-ce que ce site et quel a été le destin de celui qui s’y faisait connaître sous le nom de Dread Pirate Roberts? Silk Road, c’est une place de marché... noir, qui permet à des utilisateurs protégés par leur anonymat grâce au logiciel Tor d’acheter avec des bitcoins et depuis le «darknet» des produits parfaitement interdits à la vente libre: drogues, armes, faux papiers...

Ross Ulbricht, c’est l’ant­i-Mark Zuckerberg. Ils ont un mois et demi d’écart. L’un est beau gosse quand l’autre est… geek. Zuckerberg pousse les «friends» à se liker sur des photos de fête d’anniversaire, quand Ulbricht a créé et opéré seul pendant plusieurs années le plus grand supermarché du vice de l’ère internet avec plus de 1,2 milliard de transactions uniquement pour les stupéfiants. On lui prête même d’avoir commandité l’assassinat d’au moins trois maîtres-chanteurs. Toujours depuis son site, Silk Road.

Puissance folle

Chercheur brillant et publié, spécialiste de l’énergie solaire, Ross Ulbricht a eu la révélation du libertarianisme et de l’Ecole autrichienne. Il aurait pu décider d’ubériser le marché des taxis ou de la location de meublés. Il a fait plus underground. Et c’est le FBI qui a décidé de lui rappeler que même, s’il est devenu parfaitement légal d’imaginer et de financer le Uber de la beuh (OK OK OK), il y avait tout de même encore quelques limites à ne pas franchir.

Je n’ai aucune sympathie pour Ross Ulbricht. Mais je vois dans cette histoire un scénario digne d’un Antisocial Network. La preuve aussi de la puissance folle de notre ère numérique: imaginez qu’un homme, seul, sans réseau, avec quelques compétences informatiques, en s’appuyant sur des logiciels et des ressources existants, parfaitement et facilement disponibles, comme Tor ou les bitcoins, puisse monter l’Amazon du crime… Après les criminels en col blanc, les start-upeurs mafieux qui disruptent comme les Rapetou.

Mais un peu comme ces soldats pilotes de drones qui tuent à distance en faisant un travail qui semble « de bureau », un criminel en ligne est sans doute une nouvelle forme de bandit. Preuve que la transformation numérique n’a pas

de limit­e. Il reste à Ross Ulbricht toute une vie pour y méditer...



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