Face à la morosité ambiante, les marques doivent s’inscrire dans un nouveau contrat relationnel avec leurs publics, à travers un récit sincère et authentique proche du rêve.
Avez-vous déjà remarqué que vous mettiez plus facilement la main au portefeuille l’été, pendant vos vacances ? Savez-vous pourquoi ? Nous sommes tout simplement plus détendus. Cet état comportemental nous pousse à consommer davantage. Nous vivons la vie rêvée que nous aimerions vivre toute l’année, sans contrainte, qui procure en nous l’envie de nous faire plus plaisir (ou faire plaisir).
En cette rentrée, marquée par l’incertitude (géo)politique, la météo souvent maussade, et bien que la moisson en médailles d’or des équipes de France porte encore en nous un élan commun de positivité, prolongerons-nous cette envie de dépenser ? J’invite les marques à se poser la question.
Toucher le cœur des Français
Je suis rentrée de vacances. Mes collaborateurs m’ont parlé de leurs vacances. J’ai appelé des amis, des clients. Ces derniers m’ont parlé des JO, puis m’ont confié être préoccupés par la conjoncture et leurs objectifs de vente. Ils m’ont dit mettre leur énergie sur trois priorités pour leur stratégie de marketing digital : rigueur budgétaire, ingéniosité et intelligence créative.
Dans le domaine de l’intelligence créative visuelle, j’invite les marques à suivre, avec plus d’audace, une nouvelle voie. La nécessité de s’affranchir du temps - anxiogène - et de l’espace - encombré - ordinaire est devenue cruciale. J’invite donc les annonceurs à s’inscrire dans un nouveau contrat relationnel avec leurs publics : celui de les emporter dans un récit toujours plus vibrant. Un récit sincère et authentique, proche du rêve ; car sans le rêve, disposition inconsciente de l’esprit, l’envie ne vient pas.
Dans les arts et la littérature, le rêve représente la «vie rêvée», représentation d’un autre possible. Le rêve est une proposition de valeur relationnelle joyeuse. Ce tout nouveau contrat relationnel, qui procure des émotions positives, pourrait être baptisé : «feeling+». Il n’est pas là pour vendre à tout prix, mais pour offrir à votre audience un état d’esprit positif. L’approche scientifique fait du rêve un processus créatif ancré dans le corps, lié à l’activité cérébrale. Sans rêve, l’imagination ne rentre pas en action, l’envie compulsive d’acheter demeure faible. Il est question pour les marques de s’intéresser à leurs KPI émotionnels. La performance d’engagement est alors le plus souvent multipliée par trois.
Le voyage des émotions influence nos choix
Des envies pour l’été indien ? Un séjour à Belle-Ile-en-Mer ou sur l’île de Beauté ? Savez-vous que le rêve agit sur l’esprit entrainant une compulsion d’achat ? Le rêve - constitué d’images d’évasion ou fantasques - fait appel au sens et crée un attachement à toute chose. Outre-Atlantique, on m’a souvent parlé de «feel marketing», qui suscite des conversations et perceptions nouvelles positives vis-à-vis d’une marque.
Avec les innovations numériques à notre disposition, le champ créatif est devenu illimité. Pour exemple, la maison de joaillerie Arthus Bertrand a, dans le cadre d’un dispositif global 360, annoncé sa collaboration avec le street artiste Jordane Saget en activant les émotions via le motion design 3D. Camille Toupet, directrice artistique des collections Arthus Bertrand explique : «le motion design 3D a permis de mettre en scène, comme une matière vivante, la collection de médailles issue de la rencontre entre la tradition de notre maison de joaillerie et l’art urbain contemporain de Jordane Saget. Nous avons recherché à accroître l’attention de notre audience par le jeu du mouvement des lignes en référence à notre patrimoine du ruban que nous travaillons dans nos lignes de bijoux.»
Émotions positives ou négatives se mêlent sur les médias sociaux et influencent de plus en plus nos choix. Les médias sociaux sont devenus un déversoir d’émotions, alimenté par les marques bousculant nos relations et nos comportements plus changeants qu’avant. Tout ceci agit sur le cerveau. Il est question de neurosciences.
Feeling Index, la nouvelle métrique ?
Les métriques d’influence sont nombreuses. Le succès du marketing digital est proportionnel à la résonnance sensorielle que je vous propose de baptiser «feeling index». À l’occasion de la Saint Valentin 2024, la création visuelle en réalité augmentée de la maison de cristallerie Daum vient étayer mon point de vue. Vanessa Sitbon, directrice marketing et communication de Daum, le développe : «La mise en scène XXL sur le Pont Neuf à Paris de notre pièce de cristal "True Love", inspirée du "mur des je t’aime", créé par le calligraphe Frédéric Baron et l’artiste murale Claire Kito, a été, pour la première fois une expression efficace pour notre marque teintée d’émotion amoureuse en plein Paris.»
Un autre exemple : la capsule de «snack content» invitant les followers sur Instagram de la marque de maillots de bain Albertine à s’imaginer à Hossegor en plein Paris dès leur entrée dans le flagship alors qu’il pleuvait dans la capitale tout le mois juillet. Résultat : 8 200 vues en organique sur le compte Instagram de la marque (93K de followers) pour un budget de création minime. Anémone et Caroline Anthon, co-fondatrices de la marque Albertine, explicitent ce choix : «faire voyager nos clientes alors qu’on est à Paris, c’est le pari que nous avons fait en termes d’intelligence émotionnelle pour faire vibrer nos clientes et booster le trafic en boutique. Une invitation à porter l’océan sur soi en plein Paris.»
Aujourd’hui, force est de constater que l’engagement sur les médias sociaux diminue et qu’il faut donc singulariser la nature créative des stratégies éditoriales des marques. Enfin, le degré des émotions ressenties d’un individu à l’autre est différent. Pour ceux et celles qui ne seraient toucher par le rêve, faire appel au beau, à la surprise ou encore à l’humour, semble aussi efficace pour remporter la bataille de l’attention et vous hissez sur la première marche du podium. À chacun son feeling !