TRIBUNE

Face à la défiance de bon nombre de Français, écoute, dialogue et considération sont des facteurs de bien-être et d’optimisme au sein de la société et des organisations. En entreprise, il s’agit d’une responsabilité managériale.

La forte poussée du Rassemblement National (RN) lors des derniers scrutins est telle qu’elle interroge tous les pans de la société. Quelle responsabilité les entreprises et leurs dirigeants ont-ils face à cette situation ? Quel mal-être professionnel ces scores électoraux peuvent-ils traduire ? Le dernier Baromètre de l’optimisme, réalisé par l’institut Viavoice pour La Suite and Co en amont des élections, est formel : un peu plus de 40% des Français ne feraient pas confiance à leur entreprise pour comprendre et prendre en compte les évolutions de la société. Le concept de «société de la défiance» est aussi une réalité de l’entreprise.

L’on attend aujourd’hui de l’entreprise qu’elle soit actrice de l’intérêt général. Elle ne peut plus se concentrer uniquement sur la création de profit, mais doit avoir un impact positif pour la société. Concrètement, cela implique sa participation à la lutte contre le réchauffement climatique, à l’augmentation du pouvoir d’achat, à la souveraineté économique, à l’inclusion… 

Sentiment de déconsidération et vote RN : un lien certain ?

Le manque d’optimisme et de confiance des salariés envers leur entreprise pourrait être dû à un défaut de considération et d’écoute de la part de leurs dirigeants. Cela ne remet pas en cause leurs compétences ou leur rôle dans l’entreprise, mais plus leur capacité à intégrer les grandes problématiques sociétales.

Dans ce cadre, peut-on faire un lien entre la hausse du vote RN et ce sentiment de déconsidération chez les collaborateurs ? Si l’entreprise n’est pas seule responsable, la différence de traitement entre les profils socio-professionnels en interne peut en effet participer à l’avènement d’une certaine frustration qui alimente les choix politiques des collaborateurs. Pour preuve, les CSP- votent davantage pour le RN que les CSP+. Lors des dernières législatives, le vote RN s’établit ainsi à 57% chez les ouvriers et 21% chez les cadres, selon une étude Ipsos pour le ministère de l’Intérieur.

Selon le sociologue Arnaud Zegierman, la défiance à l’égard des entreprises reposerait ainsi pour beaucoup sur un manque de connaissance ou de compréhension lié à la complexité des enjeux, mais aussi sur un sentiment de distance et de déficit de reconnaissance chez les collaborateurs, en particulier chez les employés et ouvriers. Preuve que l’entreprise n’effectue pas son travail de rassemblement et de pédagogie pour expliquer ses projets, sa vision et ses différentes contraintes contextuelles.

Redonner son importance à la communication interne

Ce baromètre nous apprend donc que, même lorsqu’elles s’engagent concrètement pour la société par le biais de leur politique RSE, les entreprises peinent à rendre leurs actions visibles en interne et à embarquer tous leurs collaborateurs. Le bien-être au travail jouant un rôle dans la construction de la pensée politique individuelle, la problématique est ici à la fois managériale et communicationnelle.

Il faut en premier lieu se poser la question de la disponibilité des collaborateurs et de leur capacité d’écoute : comment s’adresser à eux de façon collective tout en prenant en compte leur diversité et leur complexité, à quels moments, par quels biais ? La confiance se travaille via la sincérité du discours et la fiabilité des informations, en associant chaque donnée à une ou plusieurs preuves d’action. Reprenons l’exemple des sujets RSE qui impliquent souvent une dimension très technique (calcul des émissions selon les différents scopes, obligation de reporting extra-financier CSRD…). Il faut être capable de partager des messages accessibles et de les répéter via différents canaux.

Enfin, n’oublions pas qu’en matière de confiance et d’optimisme, rien ne pourra remplacer l’humain. En tant que dirigeants, cela passe d’abord par notre exemplarité et implication totale, et par le déploiement de relais au sein de nos entreprises. Afin de ne pas participer à la mise en place d’un terrain favorable aux votes extrêmes, il est crucial de fédérer les individus. Le degré d’optimisme des collaborateurs est une responsabilité managériale à laquelle nous devons tous nous atteler !

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