L'avènement de la «consommation consciente» nous oblige, nous professionnels de la communication, à accompagner les entreprises dans la construction de nouveaux imaginaires.

La société de consommation gargantuesque aurait-elle tout avalé ? Nos harmonies, notre planète, notre humanité ? Les excès dénoncés par les Rabelais modernes sont cyniques, parfois à juste titre, mais la consommation n’est ni un complot diabolique, ni un bloc monolithique. Résoudre le problème de la surconsommation est complexe, et c’est avec l’esprit pragmatique que je partage cette réflexion sur les nouveaux contours de la consommation. 

Si la « transition consumériste » vous met en dissonance cognitive, cette tribune est pour vous. Toute conversion à de nouvelles habitudes n’est pas innée, elle présuppose une prise de conscience. La conscience, apprend-on en philo, est cette faculté réflexive de l’être humain à être conscient de lui-même (ses pensées, ses actes) mais aussi du monde qui l’entoure (la planète, les humains).

De cette conscience émerge une nouvelle expression fétiche, la « consommation consciente ». Comme un rejet de l’inconscience du passé, elle s’installe dans nos quêtes de raison et de « soft activism » vers des modèles vertueux qui protègent le vivant.

L’expression n’est en réalité pas nouvelle : en 1820, un groupe de Quakers abolitionnistes l’utilise pour encourager l’achat de produits fabriqués sans esclaves. La force morale et éthique de la « conscious consumption » est grande. En se dotant d’une dimension raisonnée et raisonnable, elle dénonce intelligemment, sans s’y opposer complètement, l’hyperconsommation inconséquente depuis 80 ans.

Révéler les nouveaux imaginaires de la consommation consiste à déconstruire nos biais de consommateurs excessifs et ostentatoires, qui persistent dans les inconscients collectifs. En observant le phénomène de l’anti-consumérisme, on trouve Thorstein Veblen, économiste américain qui théorise en 1899 la notion de « conspicuous consumption ». Il révèle que le moteur d’achat d’une marque ou d’un produit est motivé par un désir de statut et d’appartenance à une classe sociale. Ça vous parle ? Êtes-vous Nike ou Veja ? Apple ou Samsung ? Renault ou Tesla ? Nestlé ou Danone ? L’Oréal ou Krème ? Lidl ou Biocoop ? L’effet Veblen est sans doute discutable, mais force est de reconnaitre que toute marque joue un rôle de marqueur social dans une société humaine construite en classes, où la peur d’en être exclue domine.

Moins de compétitif, plus de coopératif 

De la « conspicuous consumption » à la « conscious consumption », il n’y a qu’un pas. Moins compétitif, plus coopératif. Un pas qu’il nous faut franchir pour sortir de l’inconséquence et éclairer les choix des consommateurs ou consommatrices désireuses d’en découdre avec ce « too much » de tout. Cette nouvelle manière de consommer, qui privilégie l'usage à la propriété, le partage à l'individualisme n’a pourtant pas de mode d’emploi.

La consommation consciente doit renforcer le régénératif et l’inclusif ; à chaque entreprise d’établir dans le cadre de « l’économie du donut » ses indicateurs d’impact social et environnemental, sur toute sa chaîne de valeur : de l’éco-socio-conception à la diffusion, de l’éducation au mieux manger, à l’antigaspi, du développement du vrac à la consigne… Les combats sont nombreux pour répondre au désir de nouvelles normes durables et désirables.

Pour nous, professionnels, c’est une chance d’éclairer les individus, au pays des Lumières, où l’usage de la « raison » aide à se forger une opinion et où les « lumières » éclairent librement nos choix. Avec la « conscious consumption », nous sommes invités à changer de regard sur ce con-sot-mateur, qui n’a rien de stupide. Annonceurs, médias, agences, créatifs et designers, faisons ce pari collectif de la bascule culturelle de la consommation. Quand on a la chance de maîtriser l’art de la conception créative et narrative, notre rôle est d’oser les nouvelles normes d’une consommation consciente qui ne ruine ni âme, ni vivant, ni avenir.

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