L’homme fort des festivals en France, des Francofolies de La Rochelle au Printemps de Bourges, est aussi le cofondateur de Morgane Productions. Il lance une nouvelle édition du festival RTL2 Essonne en Scène les 30 et 31 août.

Sur le patio dédié aux professionnels de la 40e édition des Francofolies, en juillet dernier, il était entouré des deux nouveaux codirecteurs du festival Émilie Yakich, chargée de la partie culturelle et artistique et Dimitri Gavenc, de l’administratif. En dépit du soleil rayonnant, Gérard Pont s’est cette année éclipsé de la direction du festival qu'il avait racheté en 2005, après la proposition de son créateur, Jean-Louis Foulquier, de lui passer la main. « Les gens de la musique m’avaient vu arriver d’un sale œil, moi le Parisien qui venait de la télé » se souvient-il.

La pression était telle qu’à la conférence de presse de clôture de son premier festival, il avait pleuré d’avoir réussi à faire ses preuves. Vingt ans après, il a fait mieux que clouer le bec aux fâcheux. Il a fait « des Franco » le rendez-vous de tous les artistes, de toutes les générations et de tous les publics. Cette année, du 10 au 14 juillet, ils ont été 130 000 festivaliers à swinguer sur toutes les musiques francophones et 90 000 à applaudir de Zaho de Sagazan à Étienne Daho, de Pascal Obispo à Sting, seul artiste international invité en clin d’œil à Jean-Louis Foulquier qui l’adorait. 

Avec la même générosité, les deux hommes ont eu à cœur, après vingt ans d’exercice, de passer la main. Le copropriétaire du Printemps de Bourges est aussi le cocréateur en 2023 du festival RTL2 Essonne en Scène qui se tiendra les 30 et 31 aôut prochain, avec Étienne Daho et Mika. Et il s’attelle désormais au rayonnement de la marque Francofolies dans le monde.

En ce jour de juillet, devant une majestueuse corbeille d’huîtres locales, Gérard Pont, toujours de noir vêtu, ouvre les festivités. « Je déteste ce moment et je ne suis content que quand il est fini. » Sourire de l’assemblée et même du maire de La Rochelle. « Autant j’aime bien écrire, mais parler… C’est toujours long, verbeux, sauf à avoir du talent. On a toujours envie que les discours se terminent. J’aime mieux faire que raconter pour être sur la photo », nous confie-t-il en aparté.

Faire semblant n’est pas dans la culture de ce fier Breton, à la solidité de menhir et à la fidélité chevillée au corps, qui s'exprime à quelques pas du café Rozenn Kerja, du nom de l'heureuse gagnante d'un radiocrochet, à 14 ans, que Dalida avait pris sous son aile à Paris, l’hébergeant chez elle. Un article a laissé entendre que la jeune fille était orpheline. L’immédiat courroux de ses parents l'a obligé à rentrer dans sa Bretagne. Gérard Pont lui a consacré son premier documentaire à la télé. Il a alors rencontré Jean-Louis Foulquier qui avait écrit à la jeune Bretonne quelques chansons… De quoi faire bifurquer la vie de ce fils d’un maçon et d’une femme de ménage. « Ma plus grande fierté, c’est d’avoir réussi mes rêves, qui n’étaient pas adaptés à la catégorie sociale dans laquelle j’étais né. Avec mes legos, je construisais des cirques et des plateaux télé », nous avoue-t-il.

Trois autres rencontres ont changé sa vie. Charles Kermarec d’abord. Il espère lui vendre des espaces publicitaires dans la revue qu’il a fondée après ses études de commerce. « Il a été le premier à me donner ma chance professionnellement en me permettant de monter la librairie Dialogues à Brest. » L’écrivain Michel Le Bris ensuite, venu faire une signature dans la librairie et auquel il a avoué son rêve de faire de la télé. « Il m’a dit “je t’embauche” et j’ai été grâce à lui journaliste pendant deux ans. On a créé ensemble le festival des Étonnants voyageurs à Saint-Malo. La troisième rencontre, c’est Guillaume Lacroix, mon associé depuis 42 ans. Je ne sais pas si j’ai changé sa vie, mais il a changé la mienne.»

L'amour de l'art

Ensemble, ils ont fondé Morgane Production en 1990. Gérard échafaude les projets quand Guillaume les sécurise. Un duo gagnant à la tête d’une entreprise qui compte 150 salariés et réalise 55 millions de chiffre d’affaires. Ils produisent fictions, documentaires, magazines et la majeure partie des concerts captés et diffusés à la télé. Cécile Rap Veber, la directrice générale de la Sacem, ne tarit pas d’éloges sur lui. « Je l’aime beaucoup et il le sait. Il a un profond amour pour les artistes, qui n’est pas feint et il est d’une timidité touchante. »

La marque Francofolies ? Elle continue de vivre via les artistes découverts et aidés lors des « Chantiers » de l'événement, de Pomme à Christine & The Queens, de Bigflo et Oli à Feu ! Chatterton ou Juliette Armanet. Et peut-être via la radio DAB+ dont Gérard Pont a déposé le projet 100% musique francophone à l’Arcom en espérant une mise à l’antenne en 2025. L'homme vient aussi de créer la première école des métiers de l’organisation de spectacles à La Rochelle avec la PDG de Radio France Sibyle Veil, ou le producteur Jean-Marc Dumontet au comité de parrainage. Foncer, avec le vent dans les voiles !

Parcours

1977-1986. Producteur du festival brestois Elixir et de Rock in Athens.

1979-1985. Directeur de la librairie Dialogues à Brest.

1986-1987. Journaliste à France 3.

1990. Cofonde Morgane Groupe.

1996 à 1999. Produit Capt’ain café, l’émission qui invite des artistes avec Jean-Louis Foulquier sur France 3.

2005. Rachète le festival des Francofolies.

2023. Première édition de RTL2 Essonne en Scène.

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