Figure incontournable de l'audiovisuel français, Nicolas de Tavernost cèdera mardi 23 avril la tête du groupe M6 à David Larramendy, après un règne ininterrompu de 37 ans.
Figure historique et charismatique de l'audiovisuel français, Nicolas de Tavernost cèdera mardi 23 avril la tête du groupe M6 à David Larramendy, qui devra le faire basculer dans la télévision de demain. Nicolas de Tavernost, 73 ans, est à la barre de M6 depuis sa création il y a 37 ans, d'abord comme adjoint du premier PDG Jean Drucker, puis comme patron à compter de 2000. Au lancement de la chaîne en mars 1987, David Larramendy allait fêter ses 13 ans. Aujourd'hui âgé de 50 ans, il dirige depuis fin 2014 la régie publicitaire du groupe, dont il prendra les rênes après le feu vert de l'assemblée générale.
« C'était important d'avoir un candidat interne (...), il ne va pas tout bousculer », a assuré le sortant début avril devant l'Association des journalistes médias (AJM). Autrefois, M6 était « la petite chaîne qui monte ». Aujourd'hui, c'est le vaisseau-amiral d'un important groupe de médias comprenant quatre chaînes gratuites (M6, W9, 6ter, Gulli), neuf payantes (dont Paris Première et Téva), trois radios (RTL, RTL2, Fun Radio) et des sociétés de production (comme SND pour le cinéma). Mais, tout comme ses concurrents, le groupe est confronté à des défis considérables, dont la désaffection des jeunes pour la télévision traditionnelle au profit des réseaux sociaux et des plateformes type Netflix. Un secteur du streaming gratuit sur lequel M6 va d’ailleurs accélérer en lançant en mai sa nouvelle plateforme, baptisée M6+.
Nécessaire concentration
D'autres questions structurelles se posent en parallèle quant à l'avenir du groupe, qui plus est depuis l’échec du projet de fusion avec TF1, que Nicolas de Tavernost garde en travers de la gorge. Dans la foulée, son actionnaire principal, le géant allemand Bertelsmann, a renoncé à le vendre. En l'état actuel des choses, rien ne bougera jusqu'à 2028 voire 2032, puisque la loi interdit de céder une chaîne dans les cinq ans qui suivent le renouvellement de sa fréquence TNT (télévision numérique terrestre). Après celui de M6 en 2023, ses petites sœurs vont elles aussi postuler à leur reconduction.
Mais la loi pourrait évoluer et le délai descendre à deux ans. Si tel était le cas, « beaucoup de gens s'intéressent au groupe M6 », a glissé Nicolas de Tavernost. Car il est rentable, « à 20-22 % » selon son futur ex-patron, qui revendique y être attentif et « aller chercher des ressources avec les dents ». Ironie du sort, le dernier coup d'éclat de ce dirigeant peu dépensier a été de rafler les droits des Mondiaux 2026 et 2030 de football à TF1. Auditionné début février par la commission d'enquête parlementaire sur la TNT, il a, comme souvent, dénoncé le « carcan législatif » qui « fossilise » l'audiovisuel français et plaidé pour sa « concentration » face à la « concurrence inéquitable » des réseaux et plateformes. A bon entendeur.