[Edito] Après les affrontements à Sainte-Soline, différentes versions du déroulé des événements se sont opposées. Mais alors qui croire ? Il est urgent de redonner du sens aux mots, les soupeser, les individualiser, d’éviter toute essentialisation.
La France s’est écharpée pour savoir si sur les routes de Sainte-Soline, l’ambulance avait pu accéder au terrain pour porter secours aux manifestants grièvement atteints par les projectiles de la police. Untel a la preuve que les autorités ont interdit l’accès au camion, mais untel sait qu’elle a pu partir mais que l’urgentiste n’avait pas l’information, et untel, que ce sont les manifestants qui ont empêché ladite ambulance de passer. Untel est sûr que c’était trop dangereux. Qui croire ? Un Ministre en plateau dit que, donc un Ministre a raison (ou forcément tort). Un Manifestant a dit que, donc un Manifestant a raison (ou forcément tort). Un Urgentiste a dit que. Mais peu importe, on va chercher à voir qui est cet urgentiste ? Quels sont ses amis ? A-t-il fait un tweet pour ou contre ? A-t-il condamné ou non ? L’étiquette avant toute chose. Dire que la police frappe, c’est déjà jeter un cocktail molotov. La France est prise dans un dialogue de sourd. Les mots ne viennent plus informer mais confirmer ou dédire. Le réel ne se recrée plus en permanence, mais tourne en continu sur lui-même, comme une IA en roue libre. Il est urgent de sortir de cette boucle infernale, de redonner du sens aux mots, les soupeser, les individualiser, d’éviter toute essentialisation. Il est urgent de faire des phrases longues, interminables, composites, aussi longues que la complexité humaine. Car c’est la sécession qui guette chacun d’entre nous. Chacun dans son camp.