Fort de bons résultats en 2022, le groupe Le Figaro investit 30 millions pour développer notamment des bureaux en région, sa chaîne de télé et sa radio en DAB+. Interview de son directeur général, Marc Feuillée.
Vous venez d’ouvrir quatre bureaux, à Bordeaux, Lyon, Nantes et Nice, pour nourrir le site du Figaro. Les régions sont-elles un levier de croissance pour un média national d’actualité ?
MARC FEUILLÉE. Je le pense. C’est un de nos investissements éditoriaux les plus importants en 2023, avec l’embauche de dix journalistes. Historiquement, les médias nationaux sont très parisiens alors que dans d’autres pays, comme l’Espagne, l’Allemagne ou l’Italie les rédactions ont une présence éditoriale locale très développée. Nous avons ouvert ces bureaux pour élargir notre offre d’actualité. De nombreux sujets émergent en région, qu’ils soient politiques, économiques et sociétaux. D’autre part, nous pensons que nous pouvons apporter une autre manière de traiter l’information locale. Enfin, ces bureaux en régions reflètent la réalité de notre groupe où 10 % de nos 2000 collaborateurs travaillent en dehors de l’Île-de-France.
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Vous avez des projets en radio et en télévision. Quelle sera l'ampleur de votre investissement ?
Nous y dédierons une part significative des 30 millions d’euros que vous investissons cette année. Nous allons compléter notre offre du Figaro live, qui est à la fois du direct, des vidéos et une boucle visible sur notre site et sur la chaîne [Fast free ad supported TV], via les téléviseurs connectés en créant Le Figaro TV. Cette chaîne TNT sera disponible en Île-de-France et sur le câble et le satellite. Nous lançons aussi Le Figaro Radio en DAB+ en Île-de-France, à Marseille et à Nice. Vous y retrouverez ces émissions télé adaptées mais aussi nos podcasts et d’autres programmes. Nous faisons ces déploiements avec le groupe indépendant Secom (chaînes Melody, MyZen, Museum…) qui est notre partenaire notamment technique depuis quelques années.
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Où vont porter vos autres investissements ?
Dans nos outils de publication que nous développons en interne, soit notre CMS et notre CRM, que nous réinternalisons. La gestion des abonnements et la monétisation digitale sont stratégiques. Enfin, nous allons déménager 1 500 de nos 2000 collaborateurs dont 500 cartes de presse. Ils vont rejoindre soit l’immeuble de 11 000 m2 que nous avons acquis dans le 9e arrondissement de Paris, rue de Provence, soit nos locaux dans le 15e. Le rapprochement des équipes va nous permettre de mieux travailler ensemble.
L’année 2023 a commencé avec la création de Diverto par tous les acteurs de la PQR, hormis Le Parisien qui est resté avec vous pour lancer le nouveau TV Magazine. Est-ce un désaveu ?
Nos clients ont voulu s’autonomiser pour produire leur propre supplément. Je suis avant tout pragmatique. Les prix du papier ont considérablement augmenté et le titre n’était plus rentable. C’est la seule activité qui, en 2022, affichait des pertes dans notre groupe. Nous avons repensé TV Magazine et l’envisageons désormais comme la partie presse écrite de notre offre de programmes. Nos lecteurs sont satisfaits du nouveau magazine dont les grilles sont parmi les plus efficaces du marché. Nous sommes devenus le troisième site d’actualité sur la partie audiovisuelle derrière Télé Loisirs et Télé 7 Jours. Je pense qu’on va continuer à progresser.
Quel investissement vous a coûté ce nouveau magazine ?
Aucun. Nous avons le savoir-faire en interne et nous avons pu renforcer la partie dédiée sur le site.
Quels sont les résultats du groupe pour 2022 ?
Nous avons fait une meilleure année qu’en 2021 avec 570 millions de chiffre d’affaires, soit +15 %, et 33 millions d'euros de résultat opérationnel, soit + 6 %. Notre Ebitda est de 47 millions d’euros et 60% de notre chiffre d'affaires se fait sur le digital.
Comment se porte votre quotidien ?
Cette réussite de 2022, nous la devons d’abord à la marque Figaro et à la très belle année sur le print. Le Figaro affiche 400 000 abonnés dont 270 000 purement digitaux. Le Figaro Magazine et Madame Figaro se portent très bien aussi. Nous progressons de 6 % sur la partie publicitaire, pour la deuxième année consécutive, avec une très forte présence sur le luxe. Notre agence interne 14 Haussmann, qui a désormais une quarantaine de collaborateurs, dépasse les 20 millions de chiffre d’affaires. Ses opérations irriguent à la fois l’imprimé et le digital.
Quel impact a eu la hausse des coûts du papier ?
Ces résultats ont été obtenus en intégrant un surcoût de 15 millions d’euros.
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Où en est votre diversification ?
CCM Benchmark fait la meilleure année de son histoire avec 30 % de marge opérationnelle. Nos activités commerciales, soit la billetterie de spectacles (Ticketac et Le Figaro Billetterie) et les voyages (Les Voyages F et les agences Marco Vasco et Les Maisons du Voyage), affichent plus de 100 millions d’euros de chiffre d’affaires. Figaro Classifieds et la météo notamment réalisent une très belle année, comme nos activités immobilières. Nous exploitons le salon Rent dédié aux innovations dans l’immobilier. C’est une des plus belles réussites de ces dernières années. Il a réuni plus de 10 000 visiteurs et 400 exposants Porte de Versailles. Enfin, nous sommes en train de lancer Figaro Emploi en support de nos activités emploi.
Une question sur votre actionnaire. On entend parfois parler d’offres de rachat et d’opportunité de vente du Figaro. Qu’en est-il ?
Ceux qui l’ont annoncé il y a deux ans sont un peu ridicules, non ? Je pense que les groupes médias qui réussissent ont des actionnaires professionnels, qui valident les stratégies, aident aux décisions, confortent ou choisissent. La famille Dassault a hérité d’un groupe assez traditionnel et ils ont permis sa grande transformation. Ainsi, Le Figaro est-il toujours en pole position.
Quelle est votre stratégie à moyen terme ?
En 2026, pour le 200e anniversaire de la naissance du Figaro, nous voulons que notre offre éditoriale soit déployée sur tous les canaux de distribution de l’information possible et sous tous les formats, sachant qu’il est difficile de deviner ceux qui seront le plus porteurs.
Vous êtes le directeur général du groupe Le Figaro depuis onze ans. Quelle est votre plus grande satisfaction ?
C'est la transformation de ce groupe, qui repose sur un cœur éditorial. Il reste fidèle à ses valeurs tout en étant très innovant et en portant un grand média d’information de notre pays.