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À bientôt 84 ans, le journaliste de CNews Jean-Pierre Elkabbach, qui conseille Vincent Bolloré et Arnaud Lagardère, revient à l'antenne d'Europe 1 pour l'interview politique du week-end.

Vous voilà sur Europe 1, en charge de l’interview politique de 8h15 le week-end. Espériez-vous ce retour ?

Non, c’était une surprise agréable. Constance Benqué (présidente du pôle news du groupe Lagardère) m’a appelé pour me faire la proposition envisagée par Arnaud Lagardère (gérant du groupe Lagardère) et encouragée par Vincent Bolloré (premier actionnaire du groupe Lagardère via Vivendi). Ils m’ont donné comme mission d’être libre et indépendant.

Vous les conseillez par ailleurs...

En effet, je les vois régulièrement mais quand de grandes décisions stratégiques doivent être prises, cela se règle entre Vincent Bolloré, Arnaud Lagardère et leurs banquiers. Même les conseillers ne sont pas dans le coup.

Pourquoi ne pas limiter votre rôle à celui d’homme de l’ombre et vouloir être sur scène ?

C’est presque un devoir moral alors que la station connait une crise comme en 1974, entre 1981 ou en 1986. A chaque fois, elle a su réussir sa résurrection. Là, un long chemin doit être entrepris. Europe 1 a sombré parce qu’un responsable, qui se reconnaîtra, a échoué dans sa ligne éditoriale. Cet échec a des conséquences sur la perte d’écoute et le départ des journalistes.

Vous visez Denis Olivennes, alors PDG d'Europe 1, qui vous avait remercié en 2016 ?

Je ne souhaite citer personne.

Pourquoi tant de personnes partent d’Europe 1 ?

Je suis triste du départ de certains. Et que ceux qui s’en aillent soient critiques, c’est normal. Mais interrogez les Hondelatte, Vandel et Taddéï qui restent. Vivent-ils dans un goulag ou dans un centre de rééducation ? La mode en France est de répéter qu’on vit dans une dictature. Mais ce sont des propos indignes et grotesques.

Quel regard portez-vous sur les mutualisations d’antenne entre Europe 1 et CNews ?

Il s’agit d’un souci d’efficacité. Il faut arrêter les déficits et se redonner des chances et des moyens. L’accord entre Vincent Bolloré et Arnaud Lagardère est une alliance de renouveau. Ils passent tous les deux pour des ogres ou des monstres qui font peur aux enfants la nuit. Mais ce sont des patrons qui veulent que leur entreprise évitent les déficits et que leurs investissements soient rentables. Le seul problème, c’est la crédibilité de l’antenne. Vous nous jugerez à nos actes. De nos jours, aucun média ne peut survivre sans respecter la liberté d’expression. S’il n’est pas libre et crédible, il meurt.

Certains craignent qu’Europe 1 n’adopte une ligne éditoriale très à droite…

C’est ridicule de dire cela. La société française est à droite comme la plupart des médias, à l’exception du Monde, de Télérama et de quelques autres. Je suis à CNews depuis trois ans et demi et on ne m’a jamais interdit un invité, de François Hollande à Hubert Védrine en passant par Laurent Joffrin. Bien au contraire, on m’a félicité de leur venue. C’est parce que l’on a masqué et même émasculé le vrai débat public en France qu’il y a une telle défiance des Français et de l’opinion. Parce que l’on se dit que médias et politiques ne traitent pas des vrais sujets.

Vous serez à l’antenne d’Europe 1 le week-end pour quinze minutes d’interview suivi d’un débat animé avec Bérénice Bourgueil. Sera-t-il aussi à l’antenne de CNews ?

Pas pour l’instant. J’avais créé le premier rendez-vous politique commun radio-télé de 1977 à 1981 entre Antenne 2 dont je dirigeais l’information et Europe 1. Cela a donné de la force et du crédit aux deux. De même, j’ai créé la radio filmée quand je présidais Europe 1. C’est une manière de promouvoir la radio.

Que pensez-vous apporter à l’antenne ?

Ma créativité, ma disponibilité, ma mobilisation et mon expérience. J’ai fait toutes les campagnes présidentielles de la 5e République, de petit journaliste à grand patron. Et si j’osais vous montrer ma poitrine, vous y verriez tant de blessures. J’ai été écarté par tous les pouvoirs depuis 1974, jusqu’à Denis Olivennes en 2016. C’est un record. Mais j’ai aussi su recruter et former nombre de talents, et notamment des femmes, de Léa Salamé à Sonia Mabrouk, désormais l’une sur la matinale de France Inter, l’autre celle d’Europe 1. J'ai envoyé les premières femmes en reportage à l'étranger et promu la première camerawoman.

Vous valorisez votre expérience mais la twitosphère s'est déchainée sur votre âge à l’annonce de votre retour sur Europe 1...

Cette inélégance était prévisible. Je m’attendais aux «il n’est pas mort celui-là». Cela glisse sur moi, j’en ai vu d'autres. Je préfère retenir les messages de soutien de politiques, de scientifiques, d’écrivains et du personnel d’Europe 1 dont j’ai été inondé.

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