Témoignages de dirigeants
Reprise, bilan du télétravail, priorités pour la fin d’année : le PDG du groupe TF1, Gilles Pélisson, revient pour Stratégies sur cette période de crise sanitaire sans précédent. Il affirme avoir à cœur de « protéger la valeur car, dans une guerre de prix, tout le monde est perdant » .

Comment le groupe TF1 aborde-t-il la reprise ?

Gilles Pélisson : Le groupe TF1 ne s’est jamais arrêté, il a plutôt dû faire face à une accélération de son activité. Nous avons vécu la période de confinement comme une période de guerre, pour reprendre l’expression employée par le président de la République. Nos équipes sur le terrain ont été très mobilisées pour couvrir l’actualité, redoubler de pédagogie au fur et à mesure de l’expansion du virus, tout en ayant derrière eux des équipes de techniciens et de production qui continuaient à travailler, avec le risque eux aussi d’être contaminés. Le reste de l’entreprise a basculé en télétravail à 90%, l’idée étant de protéger ceux qui devaient absolument être présents en plateau. Aujourd’hui, on se projette vers le futur en imaginant toutes les solutions pour accompagner nos annonceurs et notre public. Nous espérons voir les bénéfices du Mediamat 2020 [la mesure de l’audience télé hors domicile par Médiamétrie, ndlr] au fur et à mesure que les Français vont redécouvrir le nomadisme, la mobilité. Cette nouvelle mesure devrait offrir de belles perspectives.



Quelle méthode le groupe TF1 compte-t-il déployer pour se relancer dans l’immédiat ?

La protection des collaborateurs prime avant toute chose. Comme toutes les grandes entreprises, nous avons pris beaucoup de soin à protéger nos collaborateurs. Nous allons continuer. C’est pour ça qu’au moins jusqu’à fin mai, nous avons dit à tout le monde qu’il n’y avait aucune urgence à revenir dans les bureaux et qu’on privilégiait, en ligne avec les recommandations du gouvernement, le télétravail. En fonction de l’évolution de la pandémie, nous espérons reprendre une activité de plus en plus normale d’ici juin, en ayant tiré certains enseignements du télétravail et de la façon dont on peut avoir une vie professionnelle différente de celle qu’on imaginait auparavant. Et ceci est valable pour nos offres de programmes, d’information et de services.



Quels sont ces enseignements sur le télétravail ?

Grâce au télétravail, nous pouvons réaliser beaucoup de réunions ou de rendez-vous en une seule journée sans perdre de temps dans les déplacements. En ce sens, la productivité augmente. Mais au-delà de cette analyse qui vaut à un instant T, sur une durée limitée et dans un climat d’urgence, ce n’est pas tout à fait pareil à plus long terme. Nous aurons à nouveau besoin de moments de convivialité, de proximité, qui sont la base de l’échange humain et qui nous ont terriblement manqué.



Quelles vont être vos priorités sur le plan publicitaire ?

En tant que leader du marché, nous aurons à cœur de protéger la valeur, parce que nous savons que dans une guerre de prix, tout le monde est perdant. En protégeant cette valeur, nous voulons arriver dans l’année 2021 dans les meilleures conditions possibles. Ceux qui ont vécu la précédente crise, en 2009, se souviennent que cet effondrement de la valeur du marché français n’a jamais été complètement récupéré. Le deuxième enjeu pour nous sera d’accompagner la relance de l’économie française. Notre pays a été très touché par la crise ; il faut maintenant donner envie à nos concitoyens de reprendre goût à la vie, de se projeter dans l’avenir avec une liberté retrouvées mais avec de nouveaux réflexes et de nouvelles exigences, notamment dans leur consommation. Sur ce point, les marques et la publicité ont un rôle à jouer pour accompagner la consommation, tout en répondant aux attentes d’information sur les produits et services de façon à créer des liens de confiance durables entre les entreprises et les clients. C’est pourquoi nous soutenons avec d’autres organisations professionnelles comme l’Union des marques et l’Udecam, la mise en place d’un crédit d’impôt en faveur des annonceurs pour relancer la machine. Il s’agit avant tout de dynamiser la reprise économique de notre pays, et pas simplement d’aider le secteur de la publicité.



Quel moment du confinement garderez-vous en mémoire en tant que patron du groupe TF1 ?

J’avais institué un petit rituel : tous les dimanches durant le confinement, je me rendais à vélo du centre de Paris à TF1, à Boulogne, où je rencontrais les équipes du week-end, d’habitude toujours un peu seules et encore plus en cette période. Le dimanche de Pâques, nous nous sommes retrouvés avec Anne-Claire Coudray et l’équipe du 13h. C’était un dimanche assez unique et dont nous nous souviendrons tous sans doute. Je crois que nous garderons toutes et tous en mémoire des moments de partage et d’émotion assez rares, des plus douloureux aux plus souriants.

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