A partir du 3 mai, les noms de domaine en .fr (et les extensions des DOM-TOM) s’ouvrent à 30 nouveaux caractères, en particulier aux accents, cédilles et ligatures. Que doivent faire les marques et les médias concernés, comme Nestlé ou Ça m’intéresse, pour éviter le «cybersquatting»? Interview de Fabien Honorat, avocat spécialiste du droit de la communication et des nouvelles technologies chez Péchenard & Associés.

Qu'est-ce qui change pour les titulaires de noms de domaine?

Fabien Honorat. Toutes les extensions gérées par l'Afnic s'ouvrent à 30 nouveaux caractères. Par mesure de sécurité, l'Afnic a fixé un délai de trois mois (du 3 mai au 3 juillet) pendant lequel les titulaires des noms de domaine actuels pourront déposer leurs extensions en priorité. Ce qui leur coûtera quelques dizaines d'euros par an. Après le 3 juillet, la règle du «premier arrivé, premier servi» s'appliquera. Par exemple, n'importe qui pourra déposer le nom de domaine Nestlé.fr si Nestlé ne l'a pas fait pendant la période prioritaire.

 

Y a-t-il des recours possibles?

F.H. Aujourd'hui, les tribunaux étatiques sont beaucoup moins sollicités car il existe une procédure de règlement des litiges en ligne, par arbitrage, avec l'Afnic pour les noms de domaine en .fr, et avec l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (Ompi) pour les noms de domaines en .org, .com, etc. Il faut prouver que la personne qui a déposé le nom de domaine litigieux l'a fait de mauvaise foi et sans justification. Sans justification signifie qu'il n'a pas de droit sur la dénomination, la marque, le patronyme, etc. Il faut aussi démontrer que l'adversaire est de mauvaise foi, par exemple qu'il a utilisé le nom de domaine pour créer un site «parking» à des seules fins publicitaires...

 

Et s'il est de bonne foi?

F.H. C'est arrivé récemment: nous défendions les héritiers du peintre Caillebotte face à un fan japonais du peintre, qui avait créé le site Caillebotte.net. L'Ompi a considéré qu'il était de bonne foi, donc la famille n'a pas pu récupérer le nom de domaine. Si un particulier dépose, après le 3 juillet, le site Stratégies.fr pour créer un site de jeux, il pourrait être jugé de bonne foi.

 

Quelle est la stratégie des marques vis-à-vis des noms de domaine?

F.H. Certaines marques réservent le plus possible d'extensions, et ont même déposé des noms de domaines «approchant». Par exemple, Facebook a déposé le nom de domaine Facbook.com, sans le e. L'utilisation des noms de domaine par les internautes étant très rare (ils tapent le nom dans les moteurs de recherche), cette réservation sert davantage à éviter que des tiers puissent leur nuire.

 

Quelles sont les dernières évolutions concernant les noms de domaine ?

F.H. Aux États-Unis, l'Icann a donné la possibilité d'être propriétaire de sa propre extension. Par exemple, Apple pourra réserver l'extension .apple pour 185 000 dollars, plus 25 000 dollars par an. Mais la marque pourra ensuite louer son extension à des tiers, ce qui lui permettra de gagner de l'argent...

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