L'éviction le 9 novembre de Christiane Vulvert, la directrice générale de France Soir, témoigne d'une nouvelle crise de management pour le quotidien, propriété d'Alexandre Pougatchev. Le jeune actionnaire russe, qui a annoncé sa décision de reprendre «personnellement la direction générale», fait face à de nombreuses interrogations quant à l'avenir de son titre. De son propre aveu, ce dernier perd encore 2 millions d'euros par mois.
Après le limogeage en août de Christian de Villeneuve et son remplacement par Rémy Dessarts à la tête de la rédaction, le journal n'en finit pas de se chercher. Malgré un prix cassé de 50 centimes d'euro, le titre n'en est toujours – selon son éditeur – qu'à la moitié de son objectif de diffusion, fixé à 150 000 exemplaires.
Alexandre Pougatchev, qui a prévu de lancer une nouvelle formule en janvier, dément vouloir faire de France Soir un quotidien «trash», à la façon du Bild allemand sur lequel Rémy Dessarts avait travaillé à une adaptation française. Il souhaite accoucher d'un nouveau journal «populaire et grand public» en recrutant une dizaine de journalistes, avec une maquette signée Cases et en faisant l'économie des pages hippiques.
Les difficultés du «banquier du Kremlin»
Au total, le jeune oligarque reconnaît avoir investi 50 millions d'euros dans le quotidien et, dans une interview au Figaro, affirme être prêt à injecter 20 millions supplémentaires.
Selon son patron, Christiane Vulvert a été licenciée pour avoir cherché à monter un tour de table dans le dos de son propriétaire. Il faut dire que la faillite probable en Russie de la banque de Sergueï Pougatchev, le père d'Alexandre, suscite des inquiétudes pour le financement de France Soir.
Celui qui a été surnommé le «banquier du Kremlin» s'est vu retirer sa licence en octobre et a perdu le soutien du gouvernement russe. La banque centrale de Russie, l'un de ses principaux créanciers, à qui il doit quelque 740 millions d'euros (et près de 1,2 milliard d'euros aux autres banques), a demandé à la Cour arbitrale de Moscou que soit reconnue son insolvabilité et que soit prononcée sa banqueroute. Le temps paraît loin où Sergueï Pougatchev avait intérêt à s'attirer les bonnes grâce de Nicolas Sarkozy pour assurer la construction de porte-hélicoptères français de classe Mistralà Saint-Pétersbourg.
L'intérêt d'investir dans un journal français est-il toujours aussi vivace alors qu'il a gagé ses chantiers navals? Aujourd'hui, son fils assure qu'il met dans France Soir sa propre fortune. Mais les syndicats du quotidien ont demandé à y voir plus clair dans ses comptes et agitent la menace d'un droit d'alerte.