«La décision est prise, ce n'est pas un coup de bluff.» Frédéric Thiriez, président de la Ligue de football professionnel (LFP), a l'air grave ce 7 mai quand, dans les salons d'un hôtel parisien, il annonce le choix de son conseil d'administration de lancer une chaîne de football. Celle-ci devrait démarrer «dans quelques mois», sans doute avant fin 2010. Elle proposera d'abord les matchs du championnat de France de Ligue 2, excepté l'affiche de chaque journée dont Eurosport conserve les droits du direct pour 10 millions d'euros par an, jusqu'en juin 2012. «Après cette date, nous pourrons récupérer le match pour notre chaîne, dont l'ambition est de diffuser toutes les compétitions organisées par la LFP», précise Frédéric Thiriez.
Aucune exclusivité
L'objectif, c'est évidemment la Ligue 1. Les droits sont partagés entre Canal+ et Orange pour 668 millions d'euros annuels, également jusqu'à juin 2012, et un appel d'offres est prévu pour 2011. Or, Stéphane Richard, le nouveau patron de France Télécom, propriétaire d'Orange, laisse entendre que l'opérateur pourrait se retirer des contenus, et donc du football. Pour la LFP, le risque est de se retrouver avec une unique candidate: Canal+. Une position de force qui permettrait à la chaîne de dicter ses conditions financières… forcément à la baisse. Inimaginable pour les dirigeants du football français. «Gouverner c'est prévoir, et prévoir le pire, souligne Frédéric Thiriez. Il y a une incertitude sur la politique de contenus d'Orange. Je me place dans la pire des possibilités, celle où Orange ne viendrait pas.»
Avec cette chaîne, dont le budget annuel de fonctionnement oscillerait entre 20 et 25 millions d'euros, la LFP s'engage dans un modèle économique inédit. En versant une redevance, les payeurs seront les distributeurs (Canalsat, Orange, Numericable, SFR, etc.). Toutefois, rien n'indique que les recettes finales soient aussi élevées que dans le cadre des droits actuels. D'autant qu'il n'y aurait aucune exclusivité et que la chaîne débuterait avec une L2 à l'attractivité réduite. Reste la TNT payante et sa couverture nationale. Elle pourrait être la pierre angulaire du système. La Ligue postulera à une fréquence lors de l'appel à candidatures que pourrait lancer le Conseil supérieur de l'audiovisuel le 18 mai. Une occasion qui ne se représentera pas de sitôt. On comprend donc l'empressement de son président.