La nouvelle a été annoncée lors d'un comité d'entreprise extraordinaire à 15 heures le 26 mai: le groupe LVMH, propriétaire des Echos, est entré en négociations exclusives avec le groupe Amaury au sujet du rachat du Parisien. Une source syndicale a indiqué à Stratégies que le groupe de luxe avait pris contact avec les dirigeants d'Amaury début mai et que «cette vente n'aurait pas dimpact social». Montant de la transaction: 40 à 50 millions d'euros, selon Le Figaro et La Correspondance de la presse. Les négociations, qui devraient aboutir en octobre, portent sur Le Parisien/Aujourd’hui en France, la régie publicitaire Amaury Médias, AM Diffusion et l'imprimerie de Saint-Ouen.
La famille Amaury souhaite ainsi se concentrer sur le sport avec le quotidien L'Equipe, L'Equipe Magazine, la chaîne L'Equipe 21 et ASO, organisateur de manifestations sportives comme le Tour de France ou le Dakar. «C’est pour le groupe Amaury l’opportunité d’accélérer la croissance de ses activités sportives», indique Philippe Carli, directeur général du groupe.
En 2010, la famille Amaury avait déjà cherché à vendre Le Parisien. Parmi les prétendants à s'être alors manifestés, le groupe Bolloré, Dassault, le Crédit mutuel et le groupe Springer. Marie-Odile Amaury espérait alors en tirer 200 millions d'euros, bien plus que les offres reçues, d'où sa décision de finalement renoncer à la vente.
Cinq ans plus tard, la situation du journal ne s'est guère améliorée. La diffusion France payée du couplage Le Parisien-Aujourd'hui en France a reculé de 17,8% entre 2010 et 2014, à 377 834 exemplaires, selon l'OJD. Malgré l'actualité dramatique liée aux attentats de Paris, le début d'année n'est guère meilleur puisque le titre affiche une diffusion France payée en baisse de 4,7% sur la période janvier-mars, à 364 967 exemplaires.
Côté résultat, la société du Parisien a été «quasi à l'équilibre» en 2014, avait indiqué à Stratégies en avril Philippe Carli, directeur général du groupe Amaury. En 2013, le résultat net de la société s'élevait à -13,3 millions d'euros, selon la société Ellisphere, pour un chiffre d'affaires de 211,8 millions d'euros, en baisse de 4,3% en un an.
Un grand architecte nommé Francis Morel
En 2007, LVMH avait racheté au groupe britannique Pearson le quotidien Les Echos pour 240 millions d'euros. En 2010, l'actuel PDG du groupe Les Echos, Francis Morel, alors directeur général du Figaro, avait étudié avec Etienne Mougeotte l'opportunité d'un rachat du Parisien pour le compte de Dassault.
Le groupe LVMH renforce ainsi sa présence dans les médias. Outre Les Echos, qui a retrouvé l'équilibre, il possède Radio Classique, Investir et Connaissance des Arts. Le nouvel ensemble pèserait près de 350 millions d'euros de chiffre d'affaires. Il sera en mesure d'atteindre une taille critique dans la presse quotidienne, où des coûts pourront être mutualisés.
«Le grand architecte de cette opération, c'est Francis Morel. En tant que président du Syndicat de la presse quotidienne nationale, il a suivi les accords cadre de la presse parisienne qui programme la fermeture d'une ou des imprimeries du Parisien. Il a eu à ce titre beaucoup de discussions avec la famille Amaury», confie Jean-Clément Texier, président de la Compagnie financière de communication. Un plan social portant sur 70 personnes va être engagé dans les prochains mois sur l'imprimerie.
De son côté, Marie-Odile Amaury, la propriétaire, confrontée à des investissements recurrents sur Le Parisien, a choisi de conserver sa branche en perte, L'Equipe, où les synergies sont plus évidentes avec Amaury Sport Organisation et la chaîne L'Equipe 21. «Elle est plus passionnée de sport que d'infos génés, assure l'expert. C'est une réflexion stratégique car, avec quelques centaines de millions d'euros de disponibilités financières, elle n'a le couteau des banques sous la gorge.»