Michel Barnier va-t-il chuter sur les budgets ? Le Premier ministre entame ses consultations lundi 25 novembre à Matignon, alors que le Rassemblement national menace de plus en plus ouvertement de censurer le gouvernement.
Semaine chargée pour le gouvernement. Mardi 26 novembre, l'Assemblée débattra et votera sur le traité de libre-échange Mercosur, sur fond de colère des agriculteurs. Les ministres Annie Genevard et Sophie Primas porteront la parole du gouvernement. Et le lendemain, jeudi, un débat tendu est annoncé dans l'hémicycle dans le cadre d'une « niche » de La France insoumise sur l'abrogation de la réforme des retraites du gouvernement d'Elisabeth Borne, adoptée en 2023. Mais c'est avant tout sur le plan budgétaire que les nuages s'amoncellent au-dessus de Matignon, la perspective d'un déclenchement de l'article 49.3 approchant à grands pas.
Faute de majorité à l'Assemblée où, contrairement à Elisabeth Borne, il a préféré laisser les débats se dérouler, Michel Barnier emploiera « probablement » dans les prochaines semaines cette arme constitutionnelle, qui permet l'adoption d'un texte sans vote, sauf si une motion de censure venait renverser le gouvernement. Ce qui supposerait que le RN joigne ses voix à une motion déposée par la gauche. Cette « coalition des contraires », « je sais que ce n'est pas ce que souhaitent les Français, qui souhaitent aujourd'hui la stabilité, la sérénité », a dit jeudi 22 novembre le Premier ministre. Tout comme Emmanuel Macron qui, depuis l'Argentine, a également dit souhaiter « la stabilité ».
Michel Barnier et le gouvernement en danger
Mais selon un sondage Ipsos pour La Tribune Dimanche, 53 % des Français souhaitent voir le gouvernement tomber. Et la cote de Michel Barnier chute dans un autre sondage Ifop pour le JDD, à 36 % contre 45 % lors de sa nomination début septembre. Qu'advient-il en cas de budget et de gouvernement renversés ? Dans Le Parisien, la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon met en garde contre « un scénario à la grecque », pointant le risque de crise financière. « Il n'y a personne de responsable dans le pays qui puisse souhaiter que tombe un gouvernement qui a été nommé il y a deux mois », abonde François Bayrou sur BFMTV. « S'il y avait censure, il y aurait crise de régime », estime pour sa part la LR Agnès Evren sur France 3.
« Il ne faut pas faire peur aux Français pour rien », a répliqué le vice-président du RN Sébastien Chenu, évoquant l'adoption d'une « loi spéciale » budgétaire en cas de censure. « Le président de la République a plusieurs possibilités : renommer le même Premier ministre, renommer un nouveau Premier ministre, démissionner s'il n'a plus d'autre solution, déclencher un référendum », a énuméré le député du Nord. En attendant l'entretien de lundi matin, « Michel Barnier crée les conditions d'une censure », a jugé Sébastien Chenu. Et le RN de lister ses griefs : revalorisation des retraites, taxe sur l'électricité, « hausse de la contribution de la France à l'Union européenne » ou encore absence d'économies sur « le millefeuille de l'Etat » et « sur l'immigration »...
Trois textes budgétaires en première ligne
Trois textes budgétaires sont susceptibles d'être soumis au 49.3. D'abord, le budget de la Sécurité sociale. Après un vote sur l'ensemble du texte mardi au Sénat, une Commission mixte paritaire (CMP) députés-sénateurs devrait être réunie mercredi. Le « socle commun » gouvernemental y est majoritaire. Mais les macronistes menacent de la faire capoter, vent debout contre la réduction des allègements de cotisations patronales sur les salaires. Une CMP conclusive déboucherait sur un vote définitif dans les deux chambres, avec 49.3 probable à l'Assemblée. Le budget de l'Etat, ensuite, qui arrive en séance lundi au Sénat, avec un vote solennel prévu le 12 décembre, prélude à la réunion d'une CMP, puis d'un vote final. Le projet de loi de Finances de fin de gestion pour 2024, pour finir. Déjà rejeté en première lecture à l'Assemblée, il est examiné lundi matin au Palais du Luxembourg.