Sur les sites de Paris 2024, seules les cartes Visa pourront être débitées, conformément au statut de partenaire olympique de la marque. Un monopole qui ne plaît ni à la concurrence, ni aux consommateurs.

Le géant américain Visa, grâce à son statut de partenaire olympique de premier rang, aura le monopole des paiements par carte sur les sites de Paris-2024, une exclusivité qui passe mal auprès des consommateurs et énerve passablement la concurrence.

Que prévoit le partenariat ? Le contrat, renouvelé depuis 1986 et au montant jalousement gardé, mais qui se chiffrerait en centaines de millions de dollars selon une estimation réalisée à partir des données du CIO, donne l’exclusivité au géant américain sur l’ensemble des flux de paiement sur les sites des Jeux olympiques (JO) de Paris 2024. « Visa déploiera et exploitera un système de paiement performant, résilient, rapide et sécurisé dans tous les sites officiels », souligne la société dans une déclaration à l’AFP. Les quelque 4.500 terminaux de paiements déployés dans la trentaine d’enceintes olympiques n’accepteront que des paiements en carte Visa. Les porteurs de Mastercard ou d’American Express ne pourront donc pas utiliser leurs cartes. L’exclusivité de Visa s’applique déjà dans les boutiques des JO, mais pas sur le site de vente de billets, où Visa est partenaire « préférentiel », mais pas « exclusif ».

Et si je n’ai pas de Visa ? « Pour ceux qui n’ont pas de carte de paiement Visa, le plan alternatif le plus robuste jamais construit a été développé avec Paris 2024 et en consultation avec les autorités », répond la société américaine. Elle dévoilera fin juin une application mobile permettant de générer une carte de paiement virtuelle sur laquelle chaque détenteur de billet pourra charger de l’argent. Visa permettra également aux spectateurs de s’équiper gratuitement de cartes physiques, disponibles dans les enceintes olympiques, à charger dans la limite de 150 euros. Obligation légale en France, les espèces seront aussi acceptées sur les sites olympiques. Visa participe à l’installation d’une soixantaine de distributeurs de billets sur les différents sites, un nombre qui paraît faible au regard des 10 millions de spectateurs attendus.

Comment réagit la concurrence ? Le monopole de Visa sur les sites olympiques, « évidemment ça nous choque », a réagi auprès de l’AFP le directeur général de Mastercard France Brice van de Walle. Ce dispositif « vient à l’encontre de la pratique qui existe en France », relève-t-il, fondée sur une fluidité totale pour les porteurs de cartes. Contraindre ainsi les détenteurs de billets ne va pas dans « le sens de l’Histoire », selon lui. « Il y a une notion de liberté normalement dans les moyens de paiements », observe de son côté Michel Desbordes professeur de marketing du sport à l’université Paris-Saclay. « Cela pose quand même des questions en termes de souveraineté de paiement », avait commenté début mars le président groupement d’intérêt économique (GIE) Cartes bancaires (CB) Jean-Paul Mazoyer lors d’une table ronde. Le GIE, acteur historique des paiements par carte dans l’Hexagone, affiche dans ses publicités son côté « made in France » pour mieux se démarquer des Visa et Mastercard.

Qu’en pensent les consommateurs ? Julie Vanhille, secrétaire générale de l’association de défense des consommateurs Adéic, dit à l’AFP son « étonnement » pour le choix d’une « formule qui n’est pas française ». Elle met aussi en avant le risque d’agressions et de vols pour des spectateurs amenés à garder sur eux davantage d’argent liquide. « On a eu pas mal d’appels sur le sujet », abonde le président de France Conso Banque Michel Guillaud, de la part d’adhérents qui craignent d’être « exclus de certaines prestations parce qu’ils […] n’ont pas la bonne carte ». Pour lui, cette situation « ternit l’image des Jeux olympiques » puisqu’elle « tend à démontrer que les Jeux olympiques, c’est surtout les "Jeux olympiques du fric" ». Cette exclusivité est une « aberration » tance Philippe Rousselet, spécialiste des paiements et secrétaire générale de l’Adcet, une association pour la promotion et le développement des usages numériques, qui déplore une « privation de la liberté la plus élémentaire ».

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