Laure Mandaron est la directrice RSE de la branche Services Courrier Colis de La Poste, qui compte 140 000 collaborateurs. Elle explique les actions du groupe pour la réduction de son impact environnemental et celui de son écosystème. Un article également disponible en version audio.

Écoutez cet article :

De quand datent les engagements RSE de La Poste ?

Laure Mandaron. Le groupe La Poste a engagé une stratégie RSE, et notamment environnementale, depuis un peu plus de vingt ans. Mais ce qui a été extrêmement structurant, c'est l’acquisition en 2021 du statut d'entreprise à mission et ses implications en termes de gouvernance. Dans ce cadre, le conseil d’administration du groupe a mis en place un comité qualité développement durable, qui réunit des administrateurs de La Poste mais également des parties prenantes externes. Le groupe vient par ailleurs d’obtenir la validation par l’initiative Science Based Targets (SBTi) de sa trajectoire « Zéro Émission Nette » à horizon 2040, avec une décennie d’avance sur les objectifs fixés par l’Accord de Paris.

À la branche Services Courrier Colis, nous avons instauré avec les directions de la stratégie financière une évaluation des impacts RSE de tous nos projets stratégiques. C'est une grande avancée car nous menons environ une cinquantaine de projets stratégiques annuels et la direction RSE est impliquée dans les arbitrages budgétaires. On discute de la valeur des projets à l’aune de leur performance économique mais aussi de leur performance extra-financière et de leur empreinte carbone.

De façon générale, dans la manière dont on mène notre stratégie sociale et environnementale, il y a toujours la double focale d’être une entreprise engagée mais aussi une entreprise engageante, qui accompagne la transformation de la société, qui participe à la structuration de filières, notamment dans la mobilité « bas carbone » avec le développement de la voiture électrique, ou encore qui mène des initiatives pour dynamiser le marché de l’emballage réutilisable.

Quelles sont vos actions dans le domaine de la mobilité ?

Un des grands sujets pour nous, c’est d’améliorer l’empreinte environnementale des colis et du courrier. D’ici 2025, nous avons pour objectif de livrer 100% de nos colis dans les 22 métropoles françaises en mode doux ou bas carbone, ce qui a des conséquences à la fois sur la décarbonation et sur l’amélioration de la qualité de l’air. Nous disposons aujourd’hui d’une flotte de près de 37 000 véhicules électriques, dont 11 000 véhicules utilitaires légers, et nous avons une trajectoire d'acquisition de 8 000 véhicules utilitaires légers électriques supplémentaires à horizon 2025. En 2040, 100% des kilomètres parcourus par nos poids-lourds devront être totalement en mode bas carbone, avec de l'électrique, de l'hydrogène, des biocarburants et du biogaz. Un autre levier est l'optimisation de nos schémas de transport et des modalités de chargement des camions pour avoir un minimum de kilomètres non optimisé, c’est-à-dire réduire les kilomètres inutiles et le vide.

En 2022, vous avez confié à l’activiste Cyril Dion la réalisation d’un film sur votre activité de livraison de colis, qui a montré l’impact de la croissance de l'e-commerce. Comment répondez-vous à cet enjeu ?

Suite au lancement du film, nous menons des discussions avec les dirigeants et nos parties prenantes sur la façon de repenser nos modèles économiques. Je ne vous cache pas que cela a pas mal bousculé en interne. Je pense qu’il est important de prendre des engagements à la fois en termes de réduction des émissions en valeur absolue et aussi en termes d’efficience au colis. C’est une bonne opportunité justement pour discuter avec nos clients sur le verdissement des livraisons à travers les énergies bas carbone dans les transports. Nous leur proposons par exemple, s’ils ont des flux importants sur une liaison, de mettre en place une cuve de biocarburant à cet endroit. Ou encore de réduire le vide dans les emballages, ou de développer le marché de l’emballage réutilisable. On travaille avec les fournisseurs de ces emballages pour les aider à passer à l’échelle grâce à la visibilité apportée par les labels. 

Comment informer les consommateurs, qui ont aussi un rôle à jouer dans la transition ?

On œuvre à orienter leurs choix à travers des analyses de cycle de vie sur toute la chaîne de valeur de leurs achats en ligne. Nous mettons à disposition de nos clients sur laposte.fr un score écologique de l’envoi et de la réception d’un courrier ou colis, sur la base de critères d’impact climat, qualité de l'air, ressources et consommation d'énergie non renouvelable. Cet outil permet d’identifier des pratiques à la main du consommateur (réduire le vide dans les colis, améliorer la lisibilité de l’adresse, éviter les déplacements motorisés dans le cadre d’une livraison en point de retrait...). Depuis deux ans, nous avons enregistré un peu plus de 75 000 vues et évaluations par nos clients particuliers et petits professionnels. 

Et les salariés, comment les associer dans cette transformation ?

Nous avons objectivé une part de la rémunération de l’ensemble des collaborateurs de la branche Service Courrier Colis sur la performance RSE, avec des critères personnalisés selon les métiers. Par exemple, les entités opérationnelles de la business unit Colissimo sont objectivées sur une empreinte CO2 au colis. Nos managers et nos opérateurs des établissements postaux sont objectivés sur la base d’un « RSE score », équivalent d’un Nutriscore, qui prend en compte des critères climat, ressources, inclusion et partenariats locaux. C’est l'un de nos grands chantiers de ces trois dernières années, réalisé en co-construction avec un panel de managers, de facteurs et d’opérateurs colis. C’est devenu un dispositif de mobilisation et de motivation des 90 000 collaborateurs en établissements.

Nos postiers sont de plus en plus exigeants par rapport aux engagements de l’entreprise. On a aujourd'hui un peu plus de 19 000 personnes formées à la fresque du climat et plus de 500 collaborateurs se sont portés volontaires pour être fresqueurs, en interne et auprès d’autres entreprises. Il y a un sentiment de fierté de faire partie des colibris de Pierre Rabhi et de faire sa part au quotidien.

Parcours

1997. Diplômée de l’Institut national agronomique Paris-Grignon.

1998-2008. Directrice de mission chez Ernst & Young.

2008-2012. Déléguée développement durable du groupe La Poste. 

Depuis 2012. Directrice RSE de la branche Services Courrier Colis du groupe La Poste.

Depuis 2024. Directrice RSE des branches Services Courrier Colis et Grand Public et Numérique du groupe La Poste.

Suivez dans Mon Stratégies les thématiques associées.

Vous pouvez sélectionner un tag en cliquant sur le drapeau.