La génération des 18-24 ans représente la relève du luxe. Pour parler à cette tranche d’âge, les marques investissent leurs réseaux sociaux, mais pas seulement. Focus sur cinq opérations récentes. Un article également disponible en version audio.
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- Loewe joue avec les codes de TikTok
La marque espagnole du groupe LVMH est reconnue pour sa capacité à se saisir des tendances sur TikTok au bon moment et avec la bonne tonalité. Pour l’ouverture de sa nouvelle boutique à Tokyo en novembre, elle a repris un gimmick des réseaux sociaux, le zoom sur Google Maps, jusqu’à pointer sur une adresse précise. La musique entraînante est aussi un classique de TikTok, qui compte 21,4 millions d’utilisateurs en France. À une autre occasion, Loewe s’est associé à la créatrice de contenus Vita Kari, spécialisée dans les vidéos en trompe-l’œil (un pinceau à maquillage qui se révèle être le talon d’une chaussure en l’occurrence).
« Les marques qui émergent le plus sur TikTok sont celles qui arrivent à faire l’équilibre entre la grammaire propre à la plateforme et leur propre identité, qui savent être dans les codes sans les singer, analyse Louis Chahan, planneur stratégique senior chez BETC. TikTok est avant tout une plateforme de divertissement, les marques de luxe sont les mieux à même d’y amener des contenus beaux et culturels. »
- Fendi s'immerge dans Meta
Pour le lancement de sa sneaker Faster en septembre 2022, mélange de chic italien et de matières techniques, la marque romaine Fendi souhaitait accroître sa notoriété auprès de la Gen Z. Pour cela, elle a utilisé des dispositifs en réalité augmentée sur Facebook et Instagram, deux plateformes de Meta, qui transportaient l’utilisateur au Palazzo della Civiltà Italiana, siège de la maison à Rome. Aidée par la technologie Spark et l’agence créative Buck, la campagne donnait l’illusion de mener des fouilles archéologiques, révélant le modèle de chaussure dans tous ses détails.
Selon Meta, l’opération a généré 8 % de clics supplémentaires vers le site de marque, et +2,3 points d’intention d’achat chez les 18-24 ans. « Cette cible adore les filtres, les sondages, les dispositifs immersifs, tout ce qui permet une interaction avec la marque », assure Violaine Gressier, directrice luxe de Meta en France.
- Jacquemus en réalité augmentée sur Instagram
La marque de Simon Porte Jacquemus est l’une des plus originales sur Instagram, avec des contenus pleins de fantaisie suivis par 6 millions d’abonnés. Cet été, alors qu’elle a ouvert plusieurs magasins éphémères dans le sud de la France et en Italie, elle a publié des reels (les vidéos sur Instagram, concurrentes de TikTok) présentant des accessoires géants en réalité augmentée : un sac gonflable sur une plage, un bateau en forme de ballerine, des citrons rebondissants, un arbre à sacs à main… Une communication solaire qui n’a pas connu de trêve estivale, cohérente avec l’identité du créateur indépendant natif de Salon-de-Provence.
La marque avait déjà créé l’illusion au printemps avec son modèle de sac Bambino traversant les rues de Paris, une création du studio Origiful qui a généré 2 millions de likes et 15 000 commentaires.
- Cartier dans les nuages
Le secteur du luxe raffole des dispositifs de « gamification ». Lors du dernier salon VivaTech, le groupe LVMH a annoncé son partenariat avec Epic Games, le créateur du jeu Fortnite, afin de proposer des expériences immersives. Dolce & Gabanna a présenté une collection en collaboration avec le spécialiste du jeu vidéo Razer. Valentino a imaginé des vêtements pour habiller les avatars (bitmojis) sur Snapchat.
À l’occasion des fêtes de fin d’année, c’est Cartier qui lance un contenu ludique sur son site internet. Baptisée « The fabulous Cartier journey » (le fabuleux voyage de Cartier), l’opération met en scène un ballon dirigeable dans les nuages, que l’internaute doit guider avec son clavier pour collecter des bagues et des pierres précieuses. Les participants sont ensuite invités à partager le résultat avec leur communauté. Une façon légère de faire vivre son patrimoine, singulièrement dans le secteur traditionnel de la joaillerie, relayée sur le compte Instagram de Cartier aux 14 millions d’abonnés.
- Lancôme rencontre le Louvre
Il s’agit là d’une opération bien réelle entre deux institutions françaises. À la rentrée dernière, le musée le plus visité au monde a ouvert ses collections à la marque du groupe L’Oréal, qui a choisi de s’associer à des sculptures antiques, représentant la force féminine. Quatre égéries ont prêté leur image à ces femmes mythiques, Zendaya et la Victoire de Samothrace, He Cong et la Vénus de Milo, Aya Nakamura et la poétesse Corinne, Amanda Seyfried et Diane. Cette campagne, signée du photographe Sølve Sundsbø, accompagnait le lancement d’une édition limitée de maquillage, dans des packagings à motif de marbre.
Cette collaboration a un double objectif. Pour Lancôme, c’est une façon d’inscrire le luxe dans le monde de la culture et des arts. Pour le Louvre, qui s’est déjà associé à Uniqlo, c’est un moyen de diversifier ses revenus après le covid, mais aussi de diffuser son patrimoine par des canaux différents. Un QR code présent sur les produits permettait d’en apprendre plus sur les œuvres, sans faire le déplacement jusqu’à Paris. 50 % des visiteurs du Louvre ont déjà moins de 25 ans. « Respecter son héritage mais savoir le réinventer est le secret des entreprises qui traversent le temps », affirmait François Lehmann, la présidente de Lancôme, lors de la présentation du partenariat.