Le passé envahit nos écrans publicitaires. La dernière campagne Renault Clio nous plonge dans les années 70, Fortnite en 1984 en détournant le film iconique Apple, OUI.sncf dans les années 2000 avec la rediffusion de sa campagne des panneaux ou plus récemment, E.Leclerc, qui repart de 1949 pour raconter l’histoire du mouvement. Cette série m’a frappé alors qu’en parallèle, on assiste à un débat houleux sur la responsabilité de la publicité sur nos modes de consommation, dans la foulée des propositions de régulation de la publicité de la Convention citoyenne pour le climat.
France Nature Environnement claque la porte du Conseil Paritaire de la Publicité, Dominique Wolton, Président du Conseil de l’éthique Publicitaire, dénonce le phénomène de bouc émissaire dont serait victime le secteur, des parlementaires écologistes déposent une proposition de loi pour interdire la publicité sur certains produits au titre de leur impact sur l’environnement. Ainsi, en même temps que l’on s’écharpe sur l’avenir de la publicité, les campagnes fleurent bon la nostalgie.
Pourtant, quand on n’a plus que le passé pour donner envie d’aujourd’hui, c’est qu’on a un problème. Comme le disait le philosophe Vladimir Jankélévitch, «la vérité du passé est dans l’avenir». Je trouve ces polémiques stimulantes pour nous, d’abord parce qu’elles rappellent la puissance de la publicité, et ensuite parce qu’elles mettent sur la table un enjeu clé pour l’avenir de notre industrie : sa raison d’être. Comment peut-on contribuer au bien commun en même temps qu’à l’économie de notre pays ?
Contribuer au monde d’après
La question n’est donc pas de savoir si c’était mieux hier ou de regretter le soi-disant bon vieux temps mais de se demander comment contribuer au monde d’après et devenir un levier de progrès. Cette question nous concerne tous. En tant que publicitaires, nous avons la chance de pouvoir agir. Mais on ne peut le faire qu’en gardant les yeux bien ouverts et en regardant loin devant nous. Si la publicité a su donner envie de consommer, parfois beaucoup, trop ou de travers, elle peut aussi donner envie de consommer autrement, mieux, de façon plus vertueuse.
On le sait bien, les faits et chiffres ne suffiront pas à faire bouger les mentalités et les comportements. L’homo economicus a besoin d‘émotions, de projet, d’envie de progrès pour avancer. C’est là que nous avons un rôle à jouer : inventer de nouveaux imaginaires qui donnent envie d’un monde meilleur, qui génère de nouvelles aspirations pour une société plus juste et plus écologique. En donnant envie d’une consommation responsable et épanouissante.
La publicité a beaucoup fait ces dernières années sur certains grands enjeux sociétaux, comme la lutte contre les stéréotypes ou la place des femmes dans la société. Quand Dove fait «Real beauty» ou Nana proclame «Viva la vulva», ou quand Diesel crée «Francesca» pour défendre la cause des transgenres, c’est avec des campagnes qui nous touchent, nous bousculent et proposent un regard neuf. On peut aussi noter l’initiative récente de FranceTV Publicité, qui met à l'honneur la publicité responsable, ce qui est un signal encourageant.
A nous de créer de nouveaux récits, sensibles, résolument tournés vers l’avenir, pour contribuer à un modèle de société et de consommation plus vertueux et épanouissant pour chacun.