La publication d'un rapport de 800 pages sur les abus sexuels au sein de la famille de Saint-Jean montre à quel point la remise en cause dans notre société n'est pas toujours facile à obtenir. C'est le moins que l'on puisse dire.
« Grâce aux paroles courageuses de personnes victimes, les frères et sœurs de la famille de Saint-Jean ont entrepris une relecture profonde de leur histoire, de leur formation, et de leur culture interne. » C’est ainsi que commence le rapport de 800 pages intitulé « Comprendre et Guérir », publié par la commission interdisciplinaire de la communauté, à propos des abus sexuels en son sein. Qu’il fait plaisir ce début ! Face à toutes les stratégies d’évitement, de contournement, de déni, comment ne pas se réjouir d’un long travail de remise en cause ? N’est-ce pas ainsi que le monde « avance ». Que ce début soit un exemple pour tous.
Car en dehors de la question particulière du religieux et des abus sexuels, la remise en cause est devenue pire que la ciguë. On nous invite à nous affirmer, à nous vider de toutes questions, à préférer avoir raison que d’être dans le vrai. Allumez la télévision, la radio, un réseau social : avez-vous déjà entendu « J’ai eu tort, je n’aurais pas dû, je vais changer » ? En couple, en famille, à la Poste, au sport, au bureau, relation homme-femme, adulte-enfant, patron-employé, président-citoyen… On fuit la cave de la remise en cause pour grimper sur le toit troué de la confiance. On affirme pour s’affirmer, au point de reléguer le moindre contradicteur au rang de nerveux « haters ». Sans pousser jusqu’à tendre la joue gauche, ne serait-ce pas le premier des actes d’affirmation de soi, que de se remettre en cause ?