Alors que l’année s’annonce faste pour les acteurs de l’événementiel français, Renaud Hamaide, PDG du groupe Comexposium, s’est confié sur ses principaux enjeux stratégiques. Mis en sauvegarde en 2021, le groupe sort désormais la tête de l’eau.
La 120e Foire de Paris s’est achevée le 12 mai. Avez-vous déployé durant cette édition anniversaire une innovation symbolique du futur de l’événementiel ?
Les motivations du public pour se rendre sur un salon sont : être en communauté, voir de nouveaux produits, découvrir de nouvelles tendances, faire du business, vivre une expérience. La Foire de Paris a son Grand Prix de l’Innovation axée sur les nouveaux produits sur le marché français. Elle accueille chaque année le concours Lépine dont le principe est de récompenser les innovations.
Vous avez annoncé en mars le rachat du salon du Chocolat. Qu’est-ce que cela va changer pour la prochaine édition prévue à l’automne ?
C’est une prise de participation majoritaire au capital. Les anciens actionnaires restent. Les équipes (14 personnes) nous ont rejoint dans nos bureaux courant avril. Elles sont en pleine intégration. Grâce à nos bases de données, nous allons faire en sorte d’augmenter le nombre de visiteurs lors de cette prochaine édition.
Sur le volet acquisitions, quels sont vos objectifs, vos critères de choix et vos intentions pour 2024 ?
Le covid a mis un coup de frein sur les acquisitions. Entre fin 2015 et fin 2019, nous en avons opéré plus de 25. Là, nous repartons sur quelques acquisitions ciblées. Il faut bien sûr que le produit que l’on achète gagne de l’argent mais surtout qu’il s’inscrive dans la durée. Nous regardons en premier lieu la pérennité, ensuite la performance. C’est possible qu’il y en ait d’autres en 2024. Nous communiquons à ce sujet uniquement quand nous sommes convaincus que cela va créer de la valeur, de la croissance organique.
Quid des lancements ? Le premier Retail’s Big Show d’Asie se profile pour juin à Singapour…
Un lancement prend du temps, a minima douze mois. Que ce soit en France ou à l’étranger, nous avons effectué huit lancements en 2023 et en projetons sept en 2024. Tous ne marcheront peut-être pas mais on y croit et on y va.
S’agissant du Retail’s Big Show, la Mecque du secteur du commerce, organisée à New York, je suis fier que ce soit un petit Frenchie (nous) qui ait réussi à s’associer avec les organisateurs pour l’édition en Asie. Les groupes anglais sont forts dans les métiers du salon. Et les anglo-saxons s’allient souvent avec les anglo-saxons. Notre approche et notre souplesse leur ont plu, le fait qu’on ne soit pas un grand groupe. L’annonce s’est faite en janvier pendant l’édition de New York. Cela faisait six mois que l’on en discutait. En termes de rétroplanning, nous portons en ce moment nos efforts sur le visitorat et sur sa qualité.
Autre nouveauté à venir, le One to One B.Better [à Longchamp début juin]. Ce sera la première de ce format de rencontres d’affaires visant à favoriser le partage d’infos sur la RSE (inclusion, développement durable, empreinte carbone…).
Le groupe s’était mis en procédure de sauvegarde en 2021 à la suite de la pandémie. Comment va-t-il aujourd’hui ?
Avec le covid, tout est tombé comme un jeu de dominos en commençant par la France puis l’Asie… Jusqu’à atteindre une activité quasiment à zéro. Nous nous sommes mis en sauvegarde car nous avions engagé des acquisitions et ne pouvions pas respecter nos engagements. Nous avons ainsi pu renégocier ceux-ci avec le soutien de nos actionnaires [la Chambre de commerce et d’industrie Paris Île-de-France et Crédit Agricole Assurances, à 50 % chacun]. Il n’y a pas eu de changement d’actionnariat depuis ce moment-là.
Aujourd’hui, nous performons mieux qu’avant le covid. Nous devrions sortir de la sauvegarde dans quelques semaines. Entre 2021 et 2024 nous avons plus que doublé le chiffre d’affaires. Le remboursement de la dette suit son cours.
Driss Tazi, nommé DAF groupe en janvier 2023, l’a été avec deux missions principales : assurer notre performance financière et garantir le respect des éléments du plan de sauvegarde.
Quelles sont vos priorités 2024, les secteurs ou pays les plus stratégiques ?
Tous les six ans, avec deux salons biennaux et un triennal, nous bénéficions d’un alignement de planètes. C’est le cas en 2024, qui est une très grosse année pour nous. Ce qui signifie beaucoup de bande passante pour les équipes. Par exemple, le Sial, de loin le plus gros salon professionnel français, avec 180 000 visiteurs et plus de 8000 exposants, revient en octobre. Tout est d’ailleurs déjà vendu.
Quelle place tient la communication dans votre stratégie et comment faites-vous vivre vos marques ?
Elle est majeure. Elle nous permet de parler à nos communautés avant, pendant et après un événement. Les équipes marketing, communication, data représentent 20 % des effectifs du groupe. Plutôt que Comexposium, ce sont nos marques que nous mettons en avant. Elles sont, avec les hommes, nos premiers actifs. Les équipes communication font parler d’elles. Elles invitent à venir vivre des moments de convivialité ou de découverte à la Foire de Paris, par exemple. Elles utilisent des outils marketing pour cibler les publics.
Comment s’est traduit l’impact des Jeux de Paris 2024 sur votre activité ?
Nous avons peu d’événements en juillet et août. Le vrai sujet, c’est la première dizaine de septembre. Nous avons dû décaler d’une semaine Who’s Next, salon de la mode. En 2025, nous reviendrons aux dates initiales. Par ailleurs, beaucoup de choses sont mises en œuvre pour les Jeux et j’espère que certaines pourront être déployées par la suite pour les autres événements, par exemple dans les zones d’accueil, pour l’arrivée des participants étrangers. Nous regarderons cela.
Quel est l’impact de l’inflation sur le coût de vos événements ?
Entre 2021 et 2024, nos coûts ont augmenté de 12 à 15 %. Nous avons fait croître nos prix du montant de l’inflation - pas plus. Les lieux, les salaires, l’énergie coûtent plus cher. Cela s’est plutôt bien passé avec nos clients car eux-mêmes ont répercuté ces hausses sur leurs prix.
Chiffres clés
1100. Nombre de collaborateurs, dont 800 en France et 300 hors France.
440 millions d’euros. Chiffre d’affaires prévisionnel pour 2024, dont 70 % en France et 30 % hors France.