Dossier
L'an dernier, les annonceurs de la distribution ont en grande partie soutenu la croissance du marché contrairement à ceux du secteur de la grande consommation qui l'avaient animée en 2010.

La croissance est toujours au rendez-vous. Mais l'embellie de 2010 (+10,2%) paraît déjà bien lointaine. L'année dernière, les investissements publicitaires bruts plurimédias ont progressé de 5,2%, à 27,8 milliards d'euros en données brutes, selon Kantar Media Ad Intelligence. «Une année surtout portée par le premier semestre et notamment par les deux premiers mois de l'année», constate Corinne In Albon, directrice marketing du pôle publicitaire de l'institut d'études.

Dès le mois de mars, et surtout à compter du mois de juin avec le début de la crise économique, les investissements ont nettement baissé. «Les deux derniers mois de l'année, et surtout décembre, ont enregistré un net fléchissement», remarque Corinne In Albon.

Dans ce contexte de hausse modérée sur l'ensemble de l'année, le nombre d'annonceurs en 2011 n'a quasiment pas augmenté (+0,2% à 38 038). On est encore loin du niveau de 2008 qui en comptait 900 de plus. Les 100 premiers annonceurs, qui représentent 41% des investissements publicitaires totaux, ont vu leurs dépenses croître de 4,9%, soit un peu moins que l'ensemble du marché.

Parmi les dix plus gros investisseurs, l'évolution est contrastée. Cinq d'entre eux ont accru leurs dépenses, les cinq autres ont amorcé une nette décrue (voir les stratégies médias du Top 10 p. 36). Toujours en tête du classement, Renault fait partie des marques en repli, tout comme Orange, deuxième annonceur français. SFR, qui passe de la 3e à la 5e place, Unilever du 6e au 8e rang, et Procter & Gamble, qui perd aussi deux places en fermant la marche des dix premiers annonceurs, ont réduit la voilure avec des baisses souvent à deux chiffres.

Quant à ceux qui n'ont pas souhaité couper dans leurs budgets, la plupart ont joué la prudence. Ainsi, Peugeot, Citroën et Bouygues Telecom affichent respectivement des hausses bien en deçà de celles du marché, permettant tout de même au premier de se maintenir au 4e rang du classement, la marque aux chevrons (6e) et l'opérateur (9e) cédant chacun une place.

 

La distribution, premier secteur français

En revanche, dans ce haut du classement, les deux représentants de la distribution, Carrefour et Leclerc, enregistrent de belles hausses. Le premier (+23,03%) se hisse ainsi de la 7e à la 3e place et le second (+8,59%) gagne deux rangs en se classant 7e.

Ces deux grandes enseignes illustrent le poids de la distribution. Toujours, et de loin, le premier secteur publicitaire français (voir graphique), elle a, contrairement à 2010, tiré le marché vers le haut avec une croissance de 16%. Les grandes et moyennes surfaces généralistes affichent une hausse de 13%. Mais ce sont surtout les enseignes spécialisées qui présentent les plus fortes augmentations : +81,39% pour la Fnac, +98,07% pour Ikea...

 «Il faut aussi noter la performance de l'e-commerce qui, avec une croissance de 30%, pèse aujourd'hui 814,5 millions d'euros, dont 30% dans la mode», précise Corinne In Albon.

Le secteur de la mode justement progresse de 29,4%, ravissant du coup la 10e place du classement au secteur voyage-tourisme. Autre secteur à avoir soutenu le marché, l'univers de la culture et des loisirs. Troisième plus gros investisseur en France, il a crû l'an dernier de 6,9%, boosté surtout par les acteurs des paris en ligne.

Tous secteurs et médias confondus, les principaux contributeurs, en millions d'euros supplémentaires investis, sont le site de chaussures en ligne Sarenza (+61,8M€), Carrefour (+60,3M€), Samsung (+54,3M€) et Intermarché (+48,4M€). 

La situation est moins brillante du côté de l'automobile-transport. Le deuxième marché publicitaire français ne progresse que de 2,9%. Une croissance modeste tirée pour l'essentiel par les lancements de nouveaux modèles qui ont représenté l'an dernier 42% des investissements publicitaires du secteur. Nissan ayant particulièrement animé le marché, avec 34,7 millions d'euros supplémentaires investis l'an dernier. Mais les décrochages les plus significatifs concernent les secteurs de l'alimentation et des télécommunications (-4% chacun).

 «Au global, la grande consommation, qui regroupe l'alimentation, les boissons, l'hygiène beauté et l'entretien, stagne à -0,2%», note Corinne In Albon. Un net revirement par rapport à 2010, où tous ces secteurs, hormis les télécoms déjà en retrait il y a deux ans, avaient été en grande partie les moteurs de la reprise.

 

La télévision portée par la TNT

Comme l'année précédente, la télévision (+6%) et Internet (+7,6%) sont les premiers à tirer profit de la situation (voir graphique). La télévision doit l'essentiel de sa croissance aux chaînes de la TNT (+28,4%), les chaînes historiques reculant de 1,2% (contre +9,4% en 2010). Des annonceurs, comme Procter & Gamble ou Reckitt Benckiser, ont procédé à des réallocations de budgets en faveur de la TNT lui faisant gagné 5 points de parts de marché à 28%.

«Les chaînes nationales ont pâti du retrait des annonceurs de l'alimentaire, qui s'est soldé par la perte de 117 millions d'euros par rapport à 2010», déclare Corinne In Albon. Elles ont toutefois bénéficié des investissements en hausse de la distribution, notamment spécialisée, qui y investit désormais 22% de ses budgets publicitaires. L'automobile aussi leur a en partie sauvé la mise en couplant souvent TV et Web aux dépens de la presse. 

Internet (display) doit sa bonne tenue au secteur automobile, mais pas seulement. Trois autres secteurs ont des croissances sur ce média supérieures à celles qu'ils enregistrent sur leur total plurimédia: la culture-loisirs, l'alimentation et la distribution. Le display, dont le nombre d'annonceurs baisse légérement (-1,3%), reste le quatrième média en France avec 12,5% de parts de marché.

Autre média à tirer son épingle du jeu: la radio. Là encore, la distribution n'y est pas étrangère. Le recours aux promotions en cette période de crise lui a permis de réaliser un quart de sa progression sur le seul mois de septembre.

Si la presse reste en croissance (+3,9%), comme les années précédentes, elle le doit aux quotidiens gratuits. L'évolution de l'offre avec le lancement de nouveaux titres explique en grande partie la performance de ce segment (+24%).

En revanche, la presse quotidienne nationale enregistre une baisse sensible de ses volumes de pagination (-8,2%), la presse magazine aussi (-1,2%), et surtout les mensuels (-3,4%). «En 2011, 540 annonceurs de la presse quotidienne nationale étaient présents à la fois sur le papier et sur le Web contre 492 l'année précédente», analyse Corinne In Albon. 

Quant à l'affichage qui reste stable, les réseaux locaux, le mobilier urbain et l'affichage transport permettent de compenser la chute des grands formats. Sur ce média, la distribution et les télécoms sauvent la mise alors que l'alimentation s'est désengagée à hauteur de 67,6M€.

Hausse des matières premières, crise de la dette, attentisme électoral: pour 2012, l'incertitude domine. «Sur les quinze premiers jours de janvier, la presse et la radio suivent la tendance à la baisse de fin 2011. Par contre, la TV voit ses nombres de spots augmenter», tempère Corinne In Albon. L'effet Free Mobile côté télécoms et les JO d'été doublés de l'Euro de football devraient animer le marché. L'hypothèse d'une reprise en septembre suffira-t-elle à compenser le début d'année difficile qui s'annonce?

 

(Sous- papier)

 

Focus

 

En données nettes, un tableau légérement retouché

 

Sous le prisme des seules données nettes tenant compte des négociations ainsi que des effets secteurs et saisonniers, le marché publicitaire suit certes les mêmes tendances observées par Kantar Media Ad Intelligence (chiffres bruts), mais brosse un tableau plus proche de la réalité sur le plan financier. Selon l'étude du cabinet d'audit média Fairbrother Lenz Eley France, le marché a légèrement augmenté en 2011 (+1,4%), étant encore à 3,5% en dessous du niveau de 2008. Côté média, trois faits marquants : la radio ne croît que de 2,1% (+6,1% en bruts), du fait principalement des contre-performances des stations musicales, la presse stagne à -1% (+3,9% en bruts) et le display est en forte hausse (+15,2%), en raison notamment du succès des formats vidéo (catch up TV et In stream). Internet est ainsi sur le point de devenir le 4e média devant la radio mais derrière l'affichage. La relative stabilité de la presse, de la télévision et de l'affichage cache néanmoins des disparités que l'on retrouve chez Kantar Media et qui devraient inciter les annonceurs à une plus grande sélectivité des médias.

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