La crise publicitaire frappe-t-elle aussi les médias internationaux?
J.Irizar. Oui. Le gâteau global est plutôt orienté à la baisse, car les médias internationaux sont un média de complément, souvent réservé aux campagnes corporate. Cette chute s'explique aussi par la taille modeste du marché, qui a de fait fortement souffert de la crise, mais de manière inégale.
C'est-à-dire?
J.I. Les chaînes de télévision se portent relativement bien, surtout Eurosport. Quant à la presse, on peut citer deux titres qui réussissent réellement sur le marché européen: le Financial Times, qui s'est imposé au Royaume-Uni mais aussi partout en Europe, et The Economist. Le reste de la presse internationale souffre davantage au niveau publicitaire.
Le développement des supports numériques devient donc un enjeu publicitaire majeur pour les médias internationaux…
I.J. Oui, mais ils n'ont pas tous pris le virage à la même vitesse. Les contenus en ligne des médias internationaux n'est bien souvent qu'un simple prolongement de leur offre traditionnelle. Et la concurrence des grands portails comme Yahoo n'est pas négligeable, car ils sont très performants sur l'information internationale. Mais l'offre internationale est aussi concurrencée par l'information locale, les lecteurs ayant tendance à consommer l'information de leur pays et dans leur langue maternelle, désormais disponible dans le monde entier grâce à Internet.
Quels sont les secteurs et les annonceurs qui investissent dans les médias internationaux?
I.J. Principalement le luxe. Le premier annonceur est Rolex, qui fait beaucoup de campagnes presse. Louis Vuitton investit également ponctuellement sur des collections ou des événements, mais davantage en multilocal. Ensuite, nous avons tous les annonceurs de la finance, qui sont des fidèles de la presse. Le tourisme est également présent, mais davantage à la télévision.
En plus d'Internet, les médias internationaux font désormais face au défi du mobile. Comment l'ont-ils abordé?
I.J. La plupart ont développé des applications mobiles, mais les recettes publicitaires sur ces nouveaux supports restent anecdotiques. Sur l'Ipad, en revanche, ils ont tous développé des applications, et les campagnes de lancement se sont vendues très cher proportionnellement à l'audience de la tablette d'Apple. Mais, pour le moment, il faut attendre de voir si l'Ipad va réellement s'installer sur le marché. Et plus largement, si les tablettes numériques vont s'imposer comme un nouvel usage.
Quels avantages les déclinaisons numériques offrent-elles aux annonceurs?
I.J. L'audience des médias internationaux est une cible ultraconnectée. La première chose que cette cible demande en voyage, ce n'est pas la carte du restaurant du «lounge» de l'aéroport mais où est la connexion à Internet! Les médias internationaux ont d'ailleurs la meilleure pénétration sur le numérique. Leur avenir réside clairement dans ces supports.
Vos clients demandent-ils beaucoup de numérique?
I.J. En novembre 2007, Havas Media International comptait deux clients sur les supports numériques des médias internationaux. Aujourd'hui, nous en avons plus de cinquante! Et les investissements sur ce type de support sont en hausse d'environ 20% depuis le début de l'année 2010. Cependant, malgré la dimension internationale d'Internet, ce média reste plutôt local, car on peut segmenter les investissements par zone géographique, par cible, par mode de lecture, etc. La publicité en ligne reste d'ailleurs comparativement assez chère sur les sites des médias internationaux, car leur audience est là encore extrêmement qualifiée. Pour un annonceur, c'est aujourd'hui plus simple d'investir sur le Web: le ciblage y est plus précis et cela reste moins cher qu'un support traditionnel. Du coup, cela permet d'attirer des annonceurs différents.