On le sous-estime souvent, mais le voyage d'affaires est un secteur de poids. Selon Joël Gangnery, créateur du Market Place du voyage d'affaires (lire l'encadré), l'ensemble des sommes dépensées par les entreprises françaises pour les déplacements professionnels serait de 20 milliards d'euros, dont la moitié environ pour les seuls voyages d'affaires individuels.
Les grands comptes sous-traitent l'organisation de leurs déplacements professionnels à des groupes comme Carlson Wagonlits ou American Express. Les petites et moyennes structures utilisent plutôt les services d'agences de voyages indépendantes, ou se débrouillent seules pour gérer les déplacements du chef d'entreprise ou des cadres supérieurs.
«Les grands comptes ont réduit leurs dépenses de 50% environ et les PME de 20%. Le budget moyen d'un déplacement professionnel était de 800 euros avant la crise, il est aujourd'hui de 200 à 300 euros», déclare Richard Vainopoulos, président de Tourcom, deuxième réseau d'agences de voyages indépendantes derrière Afat Selectours. De son côté, Joël Gangnery estime la baisse du marché à 20%. De mauvais résultats qu'il convient de tempérer: ils concernent le chiffre d'affaires et non la marge, qui n'aurait diminué que de 3 à 5 %, selon le président de Tourcom.
La crise a eu des effets directs sur les destinations des voyages d'affaires individuels. Les entreprises ont privilégié le territoire français ou sont passées à la visioconférence. À l'étranger, seules les destinations assez proches comme les pays du Maghreb (Maroc, Tunisie) ou l'Europe de l'Est ont tiré leur épingle du jeu.
Descente en gamme
En matière de déplacements aériens, les billets de première classe font désormais partie du passé. Quant à la classe Affaires, vache à lait des compagnies aériennes, elle est aujourd'hui à géométrie variable, avec l'apparition de différents niveaux de prestations. Le développement d'Internet dans l'achat de billets de train ou d'avion a également modifié les pratiques : n'importe quelle PME peut acheter ses billets en direct.
Du côté de l'hébergement, les catégories de chambres sont descendues en cascade. «La clientèle des trois-étoiles s'est répartie sur les deux-étoiles, les cinq et quatre vers les trois-étoiles. C'est le haut de gamme, hors palaces, qui a le plus souffert», estime Joël Gangnery.
Un autre phénomène existe: ce que Richard Vainopoulos appelle «la hiérarchie à la japonaise». Au Japon, dans un même immeuble, chaque étage est équipé de son restaurant, de son bar ou de son hôtel réservé à une certaine catégorie de salariés: patrons, cadres supérieurs, cadres intermédiaires, etc.
«De plus en plus de chaînes européennes adoptent ce système, avec des étages business équipés d'un bar et d'un restaurant réservés aux hommes affaires», détaille Richard Vainopoulos. C'est le cas du Hilton de Lyon ou de l'Intercontinental de Paris.
Enfin, l'achat de déplacements d'affaires s'est professionnalisé avec l'arrivée de systèmes informatiques spécialisés. «Avant, on réservait les billets et on validait ensuite. Maintenant, on anticipe grâce à des logiciels qui autorisent une validation automatique ou contrôlée par l'encadrement. Cela permet d'obtenir de meilleures conditions d'achat», décrit Joël Gangnery. Des sociétés comme Amadeus, Traveldoo ou American Express proposent ce genre de logiciels qui, avec Internet, sont en train de faire entrer le voyage d'affaires dans l'ère de la rigueur.
Une place de marché pour tous
Réunir sur un même lieu l'ensemble des prestataires du secteur, c'est l'objectif du premier Market Place du voyage d'affaires, qui aura lieu les 31 mars et 1er avril au parc des Expositions, porte de Versailles à Paris. Cet événement, qui devrait rassembler une centaine de fournisseurs et attirer 4000 visiteurs, ne concerne pas uniquement les grands comptes, il vise aussi les PME ou PMI et les collectivités locales. Son créateur, Joël Gangnery, connaît bien le tourisme d'affaires, puisqu'il a été directeur marketing et ventes d'American Express, et directeur du pôle hôtellerie, tourisme et loisirs de Reed Expositions France pendant treize ans. À ce titre, il a géré le salon Top Resa. Il mise aujourd'hui sur une reprise rapide du tourisme d'affaires.