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Swile, application dédiée à la vie des collaborateurs au travail, mise sur une carte susceptible de regrouper plusieurs fonctionnalités au service de la cohésion d’équipe.

Dans l’entreprise, la carte était jusqu’ici surtout utilisée pour payer des dépenses ou, plus récemment, collecter des titres restaurant. Loïc Soubeyrand, cofondateur de Teads, propose avec sa nouvelle start-up, Swile, une carte prépayée, avec des tickets restaurants dématérialisés, qui a déjà pris 7% d’un marché vieux de cinquante ans. Après les restos, il intègre les titres cadeaux, la mobilité durable (pour ceux qui veulent se faire rembourser 400 euros de vélo ou de covoiturage sur le trajet domicile-travail par exemple) et même les cagnottes gratuites pour les anniversaires de collègues ou les pots de départ.  « Nous avons eu envie de prendre encore mieux soin des salariés en allant plus loin », explique-t-il. Pour cela, il a levé la semaine dernière 70 millions d’euros - qui s’ajoutent aux 45 millions d’euros injectés depuis la création de l’entreprise en 2018. Bpifrance, Index Ventures, Idinvest, Daphni et Kima Ventures sont du tour de table. L’objectif est d’enrichir de nouvelles fonctionnalités l’application, baptisée Lunchr jusqu’en mars dernier, et de favoriser un développement européen et au Brésil.

Micro-interactions

L’originalité de la démarche réside dans sa volonté de renforcer, grâce à la technologie, les relations entre collaborateurs. Une optique qui semble coller sur mesure au nouveau temps du travail qui intégrera de plus en plus de salariés physiquement absents des bureaux de l’entreprise, mais qui doivent pouvoir maintenir des relations entre collègues, à distance. « Les technologies sont très axées sur la collaboration au travail et les outils de télétravail, constate Loïc Soubeyrand, mais elle ne s’est pas encore assez occupée de la vie au travail ».

À travers son application, les salariés peuvent non seulement partager une addition mais communiquer entre eux, s’échanger des photos, ou se retrouver sur des événements qui peuvent être dissociés de la vie au travail. « C’est une manière de créer du lien, ajoute-t-il, alors que le team building ne fait pas forcément recette et que ce se sont les micro-interactions quotidiennes qui font la force d’une entreprise. Des collaborateurs heureux font des clients heureux. » De plus, comme le rappelle Laetitia Vitaud, spécialiste du futur du travail (lire interview), « plus on connaît de personnes, plus on est productif, mais on interagit avec ceux qu’on connaît déjà, la serendipité pure reste très marginale ». En situation de télétravail, entretenir son réseau de connaissances et échanger à distance devient encore plus déterminant.

Comme beaucoup, Swile y répond avec une messagerie collaborative. L’application prévoit des canaux privés et publics, pour les relations entre les salariés et le CSE notamment. Elle permet aussi les remboursements entre collègues, les notifications d’anniversaires et, chose inédite, favorise les dons à l’arrondi en faveur de partenaires agréés (Action contre la faim, Secours populaire et Restos du cœur). Un outil de mapping offre aussi de partager des bons plans. Loïc Soubeyrand table sur une « simplification autour des moyens de paiement », sa carte étant capable de reconnaître quel compte débiter en fonction des usages, ainsi qu’un renforcement de la vie d’équipe, par exemple en cas de commandes groupées donnant droit à une réduction.

Dépasser le million

L’offre a déjà réussi à convaincre 8 000 entreprises (OGF, Sodiaal, Iliad-Free...), fortes de 210 000 employés. « Notre objectif est de dépasser le million de collaborateurs dans les trois ans », ambitionne le patron fondateur, en passant de 250 salariés à 450 à la fin 2021. Ses équipes sont réparties entre Paris, Montpellier et…le télétravail. « L’hybridation du monde du travail va se généraliser, ajoute-t-il, avec un à deux jours de télétravail par semaine qui vont accélérer le passage à la dématérialisation. » Son idée est de participer à la consolidation d’un marché à l’intérieur de chaque fonction (paiement, bulletin de paie, recrutement…) puis de façon globale.

Plus qu’une carte, un sésame ? « Nous avons la conviction que le potentiel de Swile peut l’amener vers une introduction en bourse et une valorisation qui se compte en milliards », assure Jonathan Userovici qui a réalisé l’investissement chez Idinvest Partners. En tout cas, la carte de la « belle équipe » est à suivre de près à l’heure où la banque en ligne pour professionnels Manager.one crée, de son côté, une gamme de cartes virtuelles illimitées pour répondre à « l’ensemble des besoins de ses utilisateurs ».

« L’avenir se joue dans l’asynchrone »

Co-autrice de Welcome to the Jungle, 100 idées innovantes pour recruter des talents et les faire grandir, sorti le 27 mai chez Vuibert, Laetitia Vitaud est directrice de Cadre noir. Elle pense l’avenir du travail.  

 

Est-ce une erreur ou une bonne idée de miser sur la tech pour favoriser les relations dans l’entreprise ?

Laetitia Vitaud. Si on pense que la technologie va se substituer à la culture, aux RH, à la stratégie de l’entreprise, alors oui, c’est une erreur. Un outil ne transforme pas une organisation. Mais si les fondamentaux sont là, si on se rend plus puissant en sautillant de la bonne manière, alors oui, on peut s’appuyer sur les bons outils. Il y a une nécessité de rassembler l’information. Des plateformes, de HR management system ou free-lance management system, permettent de coordonner les actions pour être plus efficace dans les entreprises où il y a beaucoup de couches et de silos. 



Les salariés sont stressés par la surcharge d’informations alors que le télétravail devient la norme. Les tech RH peuvent-elles y remédier ?

Il y en effet, avec le télétravail, une surcharge cognitive plus importante. Il n’y a plus ces petits mouvements pour passer d’un bureau à un autre ou prendre un café mais parfois des tunnels de Zoom avec 7 à 8 heures de réunions. Avec Slack, l’e-mail, Teams, la multiplication des canaux montrent qu’on n’est pas arrivé à maturité et cela peut engendrer des dégâts sur la santé mentale. La technologie entraine plus de sollicitations mais elle peut aussi aider si l’on pense en termes de plateformes. Il faut une couche supérieure, une API, une nouvelle interface pour fluidifier les informations, les classer ou encore pour trouver les choses plus facilement avec les wikis.



Vous mettez en avant l’a-synchronie dans la tech RH. C’est-à-dire ?

Il y a en effet un équilibre à trouver en allant vers moins de synchrone et plus d’asynchrone. S’il est essentiel d’avoir des outils collaboratifs qui reposent sur les réunions Zoom ou le tchat, le présentéisme est aberrant. Il suffit de s’être déconnecté quelques temps pour devoir scrowler. Une grande partie de l’avenir se joue dans l’asynchrone.

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