Sans pour autant délaisser sa communication usuelle, LVMH se dote d’une porte-parole virtuelle baptisée Livi, qui servira de figure de proue au groupe de luxe sur le volet de l’innovation digitale.
Une chevelure ample, une peau mate, des yeux vairons et un sourire qui en dit long sur la confiance qui l’habite. Livi, acronyme de LVMH Innovation Virtual Insider, a tout pour plaire. Et pour cause. Porte-parole virtuelle de LVMH développée au cours des six derniers mois avec l’agence Spoa, cette dernière devient le nouveau visage de l’innovation du groupe français. Le but ? Promouvoir sur les canaux digitaux les projets novateurs portés par le géant du luxe et ses plus de 75 Maisons. Mais que les choses soient claires : « LVMH mobilise une voix supplémentaire tout en continuant d’utiliser ses médias traditionnels de communication », prévient Hélène Freyss, directrice de la communication du groupe. Apparue le 6 mai au détour des réseaux sociaux, Livi a d’abord dévoilé uniquement son visage avant, quelques semaines plus tard, de prendre la parole pour la première fois et d’annoncer les 21 finalistes du LVMH Innovation Award. Une entrée en matière remarquée qui dissimule un semestre de réflexions et de développements.
Lire aussi : LVMH missionne Spoa pour créer sa porte-parole virtuelle Livi
Car si l’idée d’un porte-parole virtuel n’a rien d’extravagant à l’heure où les multinationales avancent leurs pions sur l’échiquier du métavers et du Web3, déterminer son apparence, sa voix, sa personnalité ou son spectre d’action peut virer au casse-tête. Pas dans le cas présent. « Des évidences se sont dessinées rapidement », assure Orel Simon, fondateur de Spoa, agence digitale créative d’une trentaine de salariés, louant le travail effectué « main dans la main » avec LVMH et les équipes digitales du CIO Franck Le Moal, sur un sujet pour lequel « aucune structure n’a aujourd’hui la science infuse ». Chantier numéro 1 : l’apparence physique, avec des attributs féminins donc. « Pourquoi une femme ? Pour deux raisons. La première, c’est que 71% des effectifs de LVMH sont des femmes. La seconde, c’est qu’il faut travailler à combler le déficit notoire de femmes prévalant actuellement dans la tech », justifie la directrice de la communication. Les traits, aux airs assumés de melting pot, répondent quant à eux à une logique d’universalité. « On recense près de 180 nationalités différentes au sein du groupe et ce personnage devait de plus se situer au carrefour des 75 Maisons », appuie-t-elle. « Comme on lui prête un rôle assez concret, opter pour autre chose qu’une représentation humaine était hors de propos », complète Sarah Duvelle, brand content manager et « maman » de Livi. « La première grande étape a été le dessin réalisé par un graphiste, ensuite validé en 2D. Mais la magie n’a réellement commencé à opérer qu’à partir de la 3D et de l’animation », retrace-t-elle, en référence à la modélisation 3D du personnage confiée à Altava, startup finaliste du LVMH Innovation Award 2021.
Lire aussi : Pour Hélène Valade (LVMH), le beau n’est plus synonyme de neuf
Afin de modéliser les attitudes et la voix de la future porte-parole, « des capteurs ont été disposés sur l’ensemble du corps d’une actrice afin de relever les moindres détails comme les clignements des yeux », rembobine Orel Simon. « Celle-ci a été briefée en amont pour respecter certains aspects du personnage définis en amont mais nous avions volontairement choisi une actrice avec une éloquence et un charisme assez naturels, de même qu’un langage corporel très ouvert destiné à animer les débats et fidéliser les audiences », reprend Sarah Duvelle. En d’autres termes, « ne pas en faire une starlette tout en gardant un côté nécessairement attractif eu égard à ses fonctions », synthétise Hélène Freyss. Au-delà de cette apparence individuelle mûrement réfléchie, Livi véhiculera une forme d’intelligence collective puisqu’elle se nourrira tout particulièrement des échanges avec les différents experts du groupe LVMH. « Nous avons aussi fait appel à une plume -un journaliste spécialisé dans la tech- qui étoffe les sujets identifiés en interne et qui constitue l’âme éditoriale de Livi pour qu’elle soit en mesure d’avoir la répartie nécessaire face à des spécialistes », souligne encore la brand content manager.
Lire aussi : Sarenza lance son influenceuse digitale
Prochaine étape pour Livi : VivaTech avec un programme pour le moins chargé. « On va révéler beaucoup de choses à cette occasion », promet Hélène Freyss, qui consent à dévoiler une partie du dispositif. « Livi disposera de son propre microverse spécifiquement développé à cette occasion », soit « un appartement parisien version Web3 proposant une expérience immersive aux visiteurs physiques ou en ligne ». Et ce n’est qu’un début car la porte-parole cumulera en réalité les attributions. À l’image de la marque de prêt-à-porter Patou et de la marque de joaillerie Fred, qui habillaient Livi lors de sa première apparition, « plusieurs maisons du groupe vont constituer sa garde-robe », confirme Sarah Duvelle. Mais outre ce rôle d’ambassadrice destiné à faire briller les griffes du groupe, c’est aussi et surtout grâce à sa tête bien faite que Livi devrait étendre son champ d’intervention dans les mois à venir. Programmée à l’heure actuelle pour parler anglais, la porte-parole, née dans une logique de test&learn, deviendra-t-elle par exemple polyglotte ? « L’idée, c’est effectivement qu’elle évolue », répond en creux Hélène Freyss, qui met en garde contre les dérives de l’instantanéité. « Notre objectif reste toujours le même. Nous ne voulons pas être les premiers, nous voulons être les meilleurs », assume la directrice de la communication. Pas de quoi déstabiliser Livi, forcément imperméable à la pression.