Annoncée dimanche 29 janvier par Nicolas Sarkozy devant plus de 16 millions de téléspectacteurs, la hausse de la TVA, qui passera de 19,6% à 21,2%, sera effective au 1er octobre. Le chef de l'Etat justifie cette décision par sa volonté de favoriser l'emploi et de limiter les délocalisations, le produit de la taxe permettant d'alléger les charges patronales des entreprises.
Son modèle: l'Allemagne qui, en augmentant de trois points sa TVA en 2007 et en faisant stagner voire baisser les salaires des employés, a pu préserver de nombreux emplois. «Je veux que le France reste une terre de production, je veux que l'on garde nos usines», argue Nicolas Sarkozy avant que François Hollande, le candidat du PS, n'annonce qu'il supprimera cette mesure s'il est élu, afin de préserver le pouvoir d'achat des ménages.
Dévoilée à trois mois de l'élection présidentielle, la hausse de la TVA rencontre l'hostilité des Français. Avant même l'intervention du président de la République, les sondages étaient sans ambiguité sur la franche opposition de la majorité des Français à l'idée d'une TVA dite sociale, dont l'impact sur les prix ne devrait guère se faire attendre.
Selon un sondage CSA réalisé les 3 et 4 janvier et publié le 5 dans L'Humanité, 64% des Français y sont hostiles, dont 35% tout à fait opposés. Un tiers y seraient favorables, dont 8% tout à fait favorables. Par CSP, l'opposition à la TVA sociale est quasi unanime: les artisans, commerçants et chefs d'entreprises y sont défavorables à 59%, les CSP- à 69%, les CSP+ à 63% et les retraités à 59%.
A noter que seulement 3% des personnes interrogées ne se prononcent pas. Il s'agit donc d'un sujet auquel les Français s'intéressent particulièrement en ces temps de crise. Sans doute échaudés par la rituelle hausse des prix du 1er janvier, à laquelle s'ajoutent l'augmentation de la TVA à taux réduit de 5% à 7% et la mise en place de la taxe sur les sodas, les Français craignent plus que jamais pour leur pouvoir d'achat.
Toutefois, sur un plan tactique et politique, le choix du Président ne paraît pas si inconsidéré. Selon l'enquête CSA, 55% des sympathisants de droite soutiennent cette nouvelle mesure, dont 60% des sympathisants UMP. Les sympathisants du Modem, eux, y sont à 44% favorables. En revanche, les sondés se déclarant de gauche rejettent massivement ce projet (77%) tout comme ceux se revendiquant du Front national (65%).
Une cristallisation politique de l'opinion que l'on a retrouvée, avec quelques nuances toutefois, dans deux autres enquêtes, l'une menée par BVA les 5 et 6 janvier pour Avenquest, Challenge, BFM TV et BFM Business, l'autre réalisée par l'Ifop du 4 au 6 janvier pour le site Antlantico.fr. La première affiche 72% des sympathisants de droite favorables à cette mesure et la seconde 52% pour cette frange de la population.
Au vu de ces résultats, Nicolas Sarkozy fait donc le pari que son image de "capitaine courage" supplantera dans l'esprit des Français leur inquiétude en matière de pouvoir d'achat, qui pourtant fut l'alpha et l'omega de son discours de candidature en 2007. Un pari risqué, comme devraient le mesurer les études d'opinion conduites après l'intervention du chef de l'Etat.