Incontestablement, la manifestation parisienne du 13 janvier, qui rassemblait les opposants au projet de loi sur le mariage homosexuel, fera date. C'est la plus forte mobilisation de la France conservatrice (entre 340 000 et 800 000 manifestants) depuis 1984 et la défense de l'école libre (850 000 personnes, de source policière, à Paris), qui avait conduit au retrait du projet Savary «d'un grand service public unifié et laïc de l'éducation nationale» et à sa démission ainsi que celle du Premier ministre, Pierre Mauroy.
Cette fois, le gouvernement affirme qu'il ne renoncera pas à cette promesse électorale. Cette loi sur «le mariage pour tous», premier grand sujet de société de la présidence Hollande, si elle est adoptée comme prévu vers la mi-mai, marquera le mandat du deuxième président socialiste de la Ve République. Le gouvernement tient bon son calendrier sachant que toutes les enquêtes d'opinion montrent qu'une large majorité des Français se dit favorable au mariage des couples homosexuels. Une opinion installée depuis huit ans (57% de favorables en 2004, selon BVA) et confirmée dans un sondage paru à la veille de la manifestation (58% favorables, contre 41% opposés selon BVA).
«A ces partisans “théoriques” s'ajoutent de très nombreux “pragmatiques”, souligne Gael Sliman, directeur général de BVA. Ainsi, les Français déclarant qu'ils assisteraient au mariage de leur propre enfant s'il était homosexuel sont encore plus nombreux: 81%, dont une nette majorité parmi les opposants théoriques au mariage gay, 58% contre 37%.» Alors qu'une (courte) majorité des seniors est opposée (53% contre 46%) au mariage gay, les 35-64 ans y sont nettement favorables (55% contre 43%) et les jeunes le plébiscitent (72% contre 27%).
Hostilité majoritaire à l'adoption et à la PMA
Le sujet marque le clivage entre les sympathisants de gauche (82% favorables) et de droite (66% opposés), même si le tiers de sympathisants de droite pour le mariage gay montre bien que la question n'est pas fondamentalement d'ordre politique. Quant au référendum réclamé par l'UMP, si 62% des Français approuvent cette idée, selon TNS Sofres, 52% d'entre eux déclarent qu'ils voteraient «oui» au mariage et 37% «non».
En revanche, les derniers sondages révèlent que les Français sont désormais hostiles à l'adoption par les couples homosexuels (53% contre 43% selon BVA, 52% contre 44% selon CSA). Pourtant, depuis treize ans, note BVA, l'adhésion à l'adoption a doublé, de 28% en 1998 à 56% en 2011.
Un sondage CSA paru le 11 janvier indique également que 50% des Français sont opposés à l'accès à la procréation médicalement assistée (PMA). L'enquête confirme que les catholiques pratiquants réguliers, contre le mariage gay à 54%, sont très majoritairement opposés à la PMA (81%) autant qu'à l'adoption (76%). Le gouvernement a pour l'heure confirmé que la PMA ne serait pas inscrite dans le projet de loi sur le mariage, mais bien dans celui sur la famille, au nom de l'égalité entre les couples d'homosexuelles et hétérosexuels qui, eux, y ont droit.