Au fil des rapports, pétitions et projets de loi qui souhaitent réguler la publicité, le recours aux mentions légales figure en bonne place, comme dernièrement sur les communications automobiles. Mais si elles sont louables dans leurs intentions, ont-elles du sens au regard des enjeux ?
La mention légale en publicité qui a fait le plus de vagues dernièrement est issue de la Convention citoyenne : « En avez-vous vraiment besoin ? », associée à « la surconsommation nuit à la planète ». Cette proposition appelle à la réflexion, les investissements publicitaires participant objectivement d’un mécanisme économique destiné à rendre des offres, produits ou marques désirables et à générer, in fine, des ventes – même si les campagnes s’inscrivent de plus en plus largement dans la transition environnementale.
Comme pour les mentions sanitaires nutritionnelles, la dimension unilatérale et systématique des mentions légales en publicité est pourtant porteuse de contresens (promouvoir un produit gras sucré tout en le déconseillant) ou d’incohérences (application à des aliments « neutres » ou bénéfiques sur le plan nutritionnel). Le vrai sujet n’est-il pas de questionner la visibilité en soi, les cibles, les espaces et moments d’exposition ou la pédagogie associée (à l’instar d’un score, avec des limites connues) ?
Des mentions partout et sur tout
Aucune étude n’a certifié les effets de ces mentions obligatoires en publicité. Pourtant, la volonté d’une plus forte régulation passe de plus en plus par ce « compromis ». La loi d’orientation sur les mobilités en est la plus récente illustration. Le compromis consiste à ne pas s’attaquer aux racines du sujet (quel produit promouvoir, quels usages représenter…) mais plutôt d’adresser une fois de plus des signaux contradictoires (le plaisir d’une conduite en ville tout en invitant à ne pas utiliser de véhicule individuel).
La multiplication potentielle des mentions repose sur un étrange postulat de statu quo à faible coût, qui ne s’embarrasse jamais d’une mesure d’impact. Plus globalement, dans une société où l’intrusion croissante dans la sphère de responsabilité personnelle est mise en question, ces mentions édictant les règles de comportement prennent un relief particulier. Chaque produit serait ainsi idéalement accompagné d’un message de bon usage ou de non-usage spécifique, postulant l’absence totale de conscience des consommateurs.
Inefficace voire contre-productif
Ces messages auraient un lien bénéfique de long terme sur les comportements. Les enfants auraient ainsi bien intégré l’importance de manger plus de fruits et légumes, ou de pratiquer des activités sportives. Les statistiques sur l'obésité ne montrent pas pour autant de bénéfice sociétal probant. Dans le rapport Big Corpo, les ONG mettaient en question cette efficacité sur la base d’un rapport de l'Inserm concluant à leur caractère inefficace voire contre-productif. Les messages sanitaires sont notamment confondus avec les messages publicitaires et ils induisent une dimension vertueuse du produit.
Dans l'ouvrage Nudge et marketing social, Patricia Gurviez et Sandrine Raffin évoquent un test d’exposition d’étudiants à des publicités pour le Big Mac suivies, en récompense, du choix entre un sachet de fruits frais ou une glace. Ceux ayant vu le message avec la mention de prévention étaient plus nombreux à choisir la glace que les non-exposés (82% vs 65%).
Progresser dans la régulation durable de la publicité est un impératif évident mais les mentions légales sont sûrement plus des « totems symboliques » que de véritables leviers de transformation des comportements. Il appartient aux marques et à leurs agences de s’inscrire dans des représentations responsables et d’opter pour des valeurs positives de transition. Les consommateurs, eux, sauront reconnaître les plus engagées dans la durée.