Comme tout paraît dérisoire depuis le 24 février ! Alors que certains trépignaient à la perspective de se reprendre un café-noisette, debout devant le zinc, la menace du champignon nucléaire plane sur le petit kawa du matin. On sent déjà bien, en tout cas, les ravages de l’ultracrépidiarisme : les épidémiologistes en herbe d’hier ont instantanément été remplacés par les Castors Juniors de la géopolitique, auquel on aurait dû retirer manu militari le plateau de Risk quand ils étaient petits. Seul bénéfice collatéral, peut-être : remettre les mots de la guerre à leur juste place. Le mot « guerre », déjà, utilisé massivement par Macron lors de son allocution 17 mars 2020, à l'annonce du premier confinement, avec l’emploi martial de la phrase « Nous sommes en guerre », martelée à douze reprises. Pendant la crise sanitaire, on a également beaucoup entendu parler de déni de démocratie, de privation de liberté, de dictature sanitaire, de mesures fascistes, sur les questions du masque, de la vaccination, du pass sanitaire, etc. etc. La gravité du conflit russo-ukrainien permet de redonner leur vrai sens à la liberté, la démocratie, la paix... Ce qui n’empêche pas la guerre des mots de continuer à faire rage. Poutine ne parle-t-il pas de « dénazification » de l’Ukraine ? Il paraît – Talleyrand le pensait, en tout cas – que « tout ce qui est excessif est insignifiant ». Vraiment ?