Dans un contexte économique incertain, les annonceurs délaissent les campagnes de marque en réorientant leurs budgets vers des produits plus immédiats et rentables. Une tendance qui profite à Google et Meta.

Les récents résultats financiers des géants de la publicité au deuxième trimestre 2024 ont révélé des performances étonnamment positives. Tous les indicateurs sont au vert, suggérant que les annonceurs sont satisfaits et augmentent leurs investissements. Meta, par exemple, a surpassé ses propres prévisions de 760 millions de dollars. Cependant, en examinant de plus près les rapports financiers, un chiffre interpelle : au deuxième trimestre, les ventes unitaires d’Amazon ont augmenté plus rapidement que son chiffre d’affaires.

Amazon, souvent considéré comme le métronome de la consommation en ligne, voit son CFO, Brian Olsavsky, déclarer que «les consommateurs font preuve de prudence dans leurs dépenses, réduisent leurs achats, recherchent des produits à bas prix et tentent de réaliser des économies». Ce qui soulève une contradiction : les annonceurs dépensent plus, mais leurs clients, eux, dépensent moins. La vraie question est donc pourquoi ce décalage entre l’investissement publicitaire et la prudence des consommateurs ?

Meta continue de surprendre avec un revenu publicitaire de 38,32 milliards de dollars au deuxième trimestre, proche de son record historique du quatrième trimestre 2023. Cette hausse de 21,7% sur un an dépasse largement les 12% de l'an dernier. Comment ? En augmentant les impressions publicitaires et en faisant grimper les coûts moyens par publicité de 10%. Meta n’a pas peur de jouer la carte de la «monétisation agressive» : plus de publicités, à un coût plus élevé. Les Reels, censés réduire le CPM, n’ont rien changé, signe que Meta augmente les CPM sur d’autres formats.

Mais les annonceurs n’ont pas peur de cette inflation. Pourquoi ? Parce que l’IA de Meta, avec ses avancées en ciblage et en mesure, leur offre un retour sur investissement qui justifie largement l’augmentation des coûts. Les petits annonceurs peuvent en souffrir, mais pour ceux qui ont de la data à exploiter, Meta reste un allié incontournable. Il est plus que jamais pertinent d’examiner l'impact d'une réallocation budgétaire plus lourde sur Meta et Google, tout en testant les solutions direct response de Snap et Pinterest pour diversifier les résultats.

La publicité devient court-termiste face à l'incertitude des consommateurs

Brian Olsavsky, CFO d’Amazon, a bien cerné la situation : les consommateurs préfèrent désormais les articles à bas prix, ce qui explique pourquoi les ventes unitaires dépassent la croissance du chiffre d’affaires global. Une tendance qu’on peut aussi attribuer aux récents progrès logistiques d'Amazon, qui font que se faire livrer un shampoing en quelques heures devient plus tentant que de se rendre au supermarché. Alors oui, les consommateurs sont prudents, mais cela ne veut pas dire qu’ils arrêtent de consommer : ils se recentrent sur l’essentiel.

Cette prudence affecte également les stratégies des annonceurs, qui réduisent leurs dépenses sur les campagnes de marque pour se concentrer davantage sur le direct response. Les régies comme Pinterest ou Snapchat, moins performantes que Meta ou Google sur les campagnes de conversion, en paient le prix. Snapchat, par exemple, a vu ses revenus publicitaires brand décliner de 1% au deuxième trimestre, après une hausse de 12% au premier trimestre. En revanche, ses campagnes de conversion directe ont bondi de 16%. Pinterest suit une stratégie similaire en renforçant ses outils de ciblage pour attirer les budgets de bas de funnel.

Chez Google, le search domine plus que jamais, surpassant YouTube pour la première fois en termes de croissance des recettes publicitaires depuis 2023. Cette prudence des consommateurs se reflète dans les stratégies des annonceurs, qui réorientent leurs budgets vers des campagnes plus immédiates et rentables. Une preuve de cette tendance est la performance renforcée du search, qui a surpassé celle de YouTube en matière de revenus publicitaires. Les annonceurs privilégient désormais le search pour son retour rapide sur investissement, tandis que les investissements dans les campagnes de marque sur YouTube deviennent moins attrayants.

Où va la brand ?

Deux citations illustrent la tendance actuelle. Derek Andersen, CFO de Snapchat, révèle que les dépenses en publicité brand ont baissé de 1% en raison d'une faible demande dans le retail, la high-tech et le divertissement. En parallèle, Mark Zuckerberg, CEO de Meta, souligne que le commerce en ligne est le principal moteur de croissance publicitaire, suivi des jeux, du divertissement et des médias. Les budgets qui quittent Snapchat semblent se rediriger vers Meta, mais aussi vers Google, comme le montre la croissance de 13% des revenus publicitaires de YouTube. Google précise que cette croissance vient des campagnes de marque, bien que le direct response joue également un rôle, montrant que YouTube attire ces budgets malgré une tendance générale en faveur du search.

Non seulement les budgets brand se réduisent, ce qui suggère une récession puisque les annonceurs investissent moins dans la marque en période de faible consommation à long terme, mais ils se déplacent aussi vers des produits plus efficaces pour atteindre les objectifs de considération, comme YouTube via Demand Gen.

Dans un contexte économique incertain, l’adtech se tourne vers les acteurs qui promettent une rentabilité immédiate. Google et Meta, grâce à leurs investissements en IA, attirent les budgets de marque. Le troisième trimestre nous dira si cette tendance se poursuit ou si les consommateurs en auront fini avec l’incertitude.

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