Trop souvent, les articles et reportages sponsorisés se mêlent au reste des contenus dans les médias, sans distinction. Remettons un peu de déontologie au cœur de nos pratiques.
J'en ai assez qu'on confonde les deux. A un moment donné, il faut appeler un chat : un chat. Même lorsque c'est un loup !
Si la concurrence entre RP et publicité existe depuis toujours, force est de constater qu'en 2024, il est devenu parfois difficile de les distinguer. En effet, la frontière entre un reportage payant et le fruit du travail d'un journaliste devient opaque, pour ne pas dire floue. En tant que professionnelle des relations publics depuis 20 ans, cette dérive m’irrite et induit en erreur les lecteurs comme les annonceurs.
Bien que la loi oblige l'ajout de la mention «publi-rédactionnel» sur un contenu de type promotionnel, dans les faits nous sommes trop souvent loin du compte. Même lorsqu'on sait déchiffrer des caractères taille 5 en bas de page, cette obligation n'est pas toujours respectée. Les articles, émissions ou reportages sponsorisés côtoient le reste des contenus, sans distinction. Un peu comme des cousins sur la même photo de famille !
De plus en plus d'intermédiaires entre annonceurs et médias voient le jour. Ils commercialisent la création et la diffusion de contenus sur des sites web d'information, à la télévision comme à la radio. Jusqu'ici pas de problème. Sauf que ces contenus payants - présents même dans des médias très grand public - ne se différencient plus nettement de l'espace réservé à la rédaction, parfois c'est carrément une rubrique au même titre que les autres. Bonjour la confusion des genres.
Démontrer la pertinence d'une information
Cette tendance se manifeste également d'une autre manière. Recevoir des «kits médias» lorsqu'on contacte une rédaction devient monnaie courante. Des RP, on glisse sans transition dans le monde de la publicité. Rappelons pourtant qu'à la différence de la publicité, les relations presse ne se paient pas. Pour susciter l'intérêt d'un média, il s'agit de démontrer la pertinence d'une information à coups d'arguments, pas d'une mallette de billets verts.
De plus, les tarifs pratiqués pour cette «auto promo» peuvent allécher certains annonceurs, pressés de s'offrir une notoriété rapide et/ou pas assez sûrs de pouvoir s'imposer sans cela. Résultat, les informations publiées sont difficilement vérifiables, mais qui s'en soucie ?
Prenons un exemple concret. Récemment j'ai contacté un journaliste pigiste, suite à la publication d'un dossier de plusieurs pages dans un magazine reconnu qui avait interpelé l'un de mes clients. Le sujet nous intéressait particulièrement. Lorsque je lui ai parlé, sa réponse m'a laissé sans voix : «Mais il s'agit d'une commande. Je n'interroge pas ce genre de société. Ici l'entreprise avait réglé la rédaction pour cet article.» Je n'ai pas eu le temps de répondre - «Mais l'aspect marchand n'est mentionné nulle part sur l'article en ligne» - que l'échange était terminé.
Voilà pourquoi j'ai accepté de participer à l'enquête du magazine 60 millions de consommateurs publiée en mai 2024 sous le titre «Mieux que la pub, les "articles" flatteurs» sur ces pratiques discutables. Au fond, j'espère qu'on remette un peu de déontologie au cœur de nos pratiques, j'y suis attachée.