Première manche gagnée par Canal+ dans son conflit contre TF1 : la justice a estimé que le premier n’était pas obligé de rétablir la diffusion des chaînes du second sur son offre satellite TNT Sat, qui permet aux foyers non desservis par la TNT terrestre de recevoir la télévision.
Dans une ordonnance rendue ce jeudi 22 septembre, le tribunal de commerce de Paris a débouté les chaînes du groupe TF1 « de leur demande d’injonction de rétablissement (de leur) diffusion sur TNT Sat », ce dont Canal + s’est « félicité » dans un communiqué.
TF1, qui vient par ailleurs d’essuyer une autre déception après l’échec de son projet de fusion avec M6, a de son côté indiqué qu’il allait faire appel d’une décision qu’il « regrette ».
Cette procédure en urgence (référé) devant le tribunal de commerce de Paris n’est qu’une partie du conflit entre TF1 et Canal. Il a éclaté lorsque le deuxième a cessé de diffuser début septembre les chaînes du premier sur tous ses canaux de distribution (box, appli myCANAL, TNT Sat), faute d’accord financier pour le renouvellement de leur contrat.
Le tribunal a estimé que l’arrêt de la diffusion des cinq chaînes gratuites TF1, TMC, TFX, TF1 Séries Films et LCI sur TNT Sat n’entraînait ni « trouble illicite » ni « dommage imminent », deux conditions justifiant qu’un référé mette fin à une situation.
Le tribunal a jugé que l’offre TNT Sat de Canal + était une partie indissociable du contrat global sur lequel les deux groupes s’opposent, et que TF1 ne pouvait donc pas invoquer une « rupture brutale des relations commerciales » portant uniquement sur ce point-là.
En outre, le tribunal a rappelé que la loi n’impose pas à Canal + de distribuer le signal de TF1 sur TNT Sat, comme l’avait souligné le régulateur des médias, l’Arcom, au début du conflit.
« Otage »
TF1 demandait une mesure provisoire de quatre mois pendant lesquels Canal rétablirait ses chaînes sur TNT Sat, le temps de trouver un accord global ou de permettre aux clients de ce service de basculer sur une autre offre satellite, Fransat (groupe Eutelsat).
Le satellite est en effet le seul moyen pour certains foyers de recevoir la télévision dans les zones isolées non desservies par la TNT (essentiellement en montagne).
Les deux groupes se rejettent la responsabilité du conflit. Canal + assure que TF1 était trop gourmand dans la renégociation du contrat, conclu fin 2018 après un conflit similaire. TF1 affirme que c’est son rival qui n’a pas souhaité trouver d’accord.
Lors de l’audience, le 13 septembre, l’avocat de TF1 avait glissé que le montant du contrat TF1 Premium (diffusion des chaînes en direct et services annexes comme le replay) était de « 13 millions d’euros par an ».
Depuis le début du litige, TF1 martèle que ses audiences en souffrent. Le groupe a d’ailleurs mobilisé ses stars - dont Gilles Bouleau, Évelyne Dhéliat, Anne-Claire Coudray ou Arthur - pour protester dans un clip mis en ligne le 17 septembre.
« Les téléspectateurs n’ont pas à être l’otage d’une négociation purement commerciale », a pour sa part déclaré le président de l’Arcom, Roch-Olivier Maistre, mardi devant la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale.
Il a évoqué la possibilité de « compléter la loi » pour empêcher les diffuseurs par satellite de couper le signal des chaînes hertziennes.
Le tribunal de commerce de Paris a en outre condamné les six entités juridiques du groupe TF1 qui étaient allées en justice à verser chacune à Canal la somme de 3 000 euros au titre des frais de justice.
Dans une procédure distincte, Canal a assigné TF1 devant le tribunal de commerce de Nanterre.