Le patron-propriétaire de CMA CGM a été auditionné, le 6 juin, par les neuf membres de l’Arcom. Il a pris officiellement l’engagement de ne pas intervenir dans les lignes éditoriales.

Il faudra s’y habituer : Nicolas de Tavernost parle de BFMTV comme il parlait de M6. Avec le même souci de défendre les intérêts de son groupe. Il est désormais vice-président de CMA Médias, présidé par Véronique Saadé, l’épouse du milliardaire. Et n’a pas son pareil pour éviter à son actionnaire, Rodolphe Saadé, les faux pas d’une réponse hasardeuse. C’est ce qui est ressorti d’une audition à l’Arcom, le 6 juin, dans le cadre de la procédure d’agrément au rachat d’Altice Media pour 1,55 milliard d’euros. Dans l’escarcelle de CMA CGM, numéro 3 mondial du transport maritime déjà présent dans La Provence et La Tribune, la radio RMC, les chaînes BFMTV, RMC Découverte, RMC Story et BFM Business ainsi que dix chaînes locales de BFM et la plateforme RMC BFM Play. À noter que les deux chaînes payantes RMC Sport ne sont pas comprises dans l’accord afin, pour SFR, de garder une offre attractive pour ses abonnés – CMA Médias devant néanmoins assurer leur production éditoriale.

Le 22 mars dernier, l’intervention de Rodolphe Saadé à La Provence pour s’offusquer d’une Une pouvant laisser penser que Macron laissait Marseille aux mains des dealers, avait entraîné la mise à pied du directeur de la rédaction du quotidien, qui avait été limogé puis finalement réintégré après une grève de soutien des salariés. Face à des accusations d'« ingérence », le grand patron était donc attendu au tournant. Serait-il interventionniste comme Vincent Bolloré, avec lequel il fait d’ailleurs des affaires (il lui a racheté sa filiale logistique pour 4,85 milliards d’euros en mars) ?

« Je n’interviendrai pas dans les lignes éditoriales », a-t-il assuré devant les « sages », reconnaissant le principe d’indépendance des rédactions auquel il veut donner des « garanties concrètes » en avalisant les comités d’éthique et les chartes déontologiques. Il a d’ailleurs précisé qu’une charte d’indépendance éditoriale et de déontologie était en négociation à La Provence, le journal dont il s’est rendu propriétaire il y a deux ans - avec Corse Matin - et dans lequel il a investi 66 millions d’euros.

Mais alors que le groupe va développer les synergies avec La Tribune et que BFM Marseille intégrera les locaux de La Provence, les chartes déontologiques ne seront pas commune à la presse et l’audiovisuel. « La loi Bloche ne s’appliquant pas à la presse écrite, ce sont deux ordres juridiques un peu différents », a estimé Nicolas de Tavernost, faisant référence aux comités d’éthique prévus par la loi dans l’audiovisuel.

« Où allez-vous vous arrêter ? », lui a demandé Roch-Olivier Maistre, président de l’Arcom. « Mon ambition est grande dans votre secteur », lui a-t-il répondu, en précisant qu’il donnerait les moyens à Altice Media de redevenir un acteur de premier plan et à BFMTV de retrouver son leadership des chaînes d’info. « Et au delà d’Altice ? », a repris le président, après avoir rappelé qu’il détenait 11 % du groupe M6, dont il est membre du conseil de surveillance. « Je suis ouvert à un développement international », a-t-il rétorqué. La question n’a pas été ouvertement posée de savoir si cela passait, à terme, par le rachat d’actifs de RTL Group, à commencer par M6.

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