Depuis plusieurs mois, l’exercice de la promotion des nouveaux films dépasse le cadre des médias traditionnels et s’invite dans les vidéos des créateurs de contenus, de Squeezie à Domingo. Une nouvelle recette qui semble porter ses fruits.
Du canapé rouge de Michel Drucker au canapé rose de Léna Situations, il n’y a qu’un «Pantone». En février dernier, l’influenceuse de 26 ans recevait les acteurs de Dune 2 : Zendaya, Timothée Chalamet et Austin Butler. Un événement pour son podcast qui s’inscrit dans une tendance plus longue observée depuis plusieurs mois sur les médias sociaux.
Désormais, un passage chez les créateurs stars des réseaux semble être devenu un incontournable pour une promo de film réussie. Un phénomène qui donne lieu à des mélanges qu’on aurait difficilement imaginés il y a quelques années, comme Jean Reno et Chantal Ladesou chez Michou quelques jours après la sortie de Maison de retraite 2 ou Marion Cotillard qui donne des méthodes d’acting à McFly et Carlito dans le cadre de la sortie de Little Girl Blue.
« Pour exister dans le cœur des jeunes générations, il faut être présent sur Twitch »
Ce phénomène est aussi bien présent sur YouTube que sur Twitch, comme l’explique Pontus Eskilsson, vice-président des global parterships chez Twitch. « Il est vrai que de nombreuses têtes d’affiche ont été invitées chez PopCorn de Domingo, comme Alexandre Astier, Pierre Niney, Jonathan Cohen, Ahmed Sylla ou François Civil, rappelle le responsable suédois. Pour exister dans le cœur des jeunes générations, il faut être présent sur Twitch. Et les stars du cinéma français semblent l’avoir compris. »
Un constat partagé par Quentin Bordage, CEO de la plateforme d’influence Kolsquare. « L’influence est devenue ces dernières années un véritable média. Un média très fragmenté, mais probablement le plus affinitaire au monde. Pas étonnant donc que les créateurs cumulant les plus grandes audiences soient désormais intégrés dans les plans de promotion des films, au même titre que les marques, estime-t-il. On sait que les agences RP considèrent désormais comme des médias à part entière des chaînes YouTube comme celles de McFly & Carlito, Hugo Décrypte ou des podcasts tels que Canapé six places . »
Olivier Kovarski, professeur en marketing à l’EM Normandie, explique que, malgré la différence des canaux, le mécanisme de la promotion reste le même. « Il existe différents moteurs à activer pour promouvoir un film : tout ce qui est visible, c’est-à-dire la bande-annonce, les acteurs, les affiches… Et ce qu’on vous raconte par rapport au film, et cette source doit être crédible. Ce qui marchait et qui marche encore, c’est d’avoir le réalisateur et les acteurs sur un plateau pour parler du film, analyse le spécialiste. La télévision est perçue comme plus commerciale même si elle reste une source crédible, tout comme les influenceurs, qui en plus délivrent un contenu qui va donner envie aux gens d’en parler. Cela favorise la notion d’authenticité car les audiences veulent se sentir proche d’eux. Et tout ce qui permet de donner l’impression que ce n’est pas commercial plaît au consommateur. »
Un environnement moins stressant pour les invités
Là où sur YouTube, la visibilité de Squeezie fait foi (notamment les vidéos imposteurs avec Alice Belaïdi et Jamel Debbouze, François Civil et Pierre Niney ou Marion Cotillard et Camille Cotin), sur Twitch, Popcorn semble être devenu le nouveau Quotidien. Domingo y a par exemple reçu François Civil pour Les Trois Mousquetaires, Jonathan Cohen pour Daaaaaali ou encore Florent Bernard pour Nous, les Leroy. Pour Pontus Eskilsson, le streameur a créé un espace « friendly » pour les invités. « De notre point de vue, Popcorn est un moyen pour ces invités de se rapprocher de leur public dans un contexte sans contrainte de temps, où ils peuvent approfondir des discussions sérieuses. Alors qu’à la télévision, ils ont un temps de parole plus limité et doivent se concentrer sur des points de discussions promotionnels. »
Lors de son passage dans l’émission, Jonathan Cohen avait notamment partagé son attachement pour la plateforme YouTube « J’ai tout de suite vu un endroit de liberté, un truc qui n’est pas de la promo, où tu peux être toi-même et connecter avec les gens d’une manière plus concrète. C’est un peu plus compliqué quand tu fais des plateaux télé avec tout ce que ça comporte comme enjeux… Là, il n’y a pas d’enjeu à part kiffer et passer du temps avec des gens que tu kiffes… C’est un bonheur ! »
À l’image du pont solide que construit entre les deux canaux l'adaptation de concepts télé sur le web, l’empreinte de la télévision reste malgré tout très présente dans ce type d'exercice.