À la suite d'une annonce de la chaîne d'information LCI (groupe TF1) d'un entretien exclusif avec le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, plusieurs centaines de personnes ont manifesté leur indignation devant le siège du groupe TF1.
Jusqu'à 2 500 personnes se sont rassemblées jeudi 30 mai au soir devant le siège de TF1 à Boulogne-Billancourt, en banlieue parisienne, pour protester contre la diffusion sur la chaîne d'information du groupe, LCI, d'une interview du Premier ministre israélien. Benjamin Netanyahu y a répété la position officielle vis-à-vis de l'opération militaire israélienne à Gaza, notamment que « le nombre de pertes civiles relatives aux pertes de combattants (palestiniens est) le taux le plus bas qu'on a vu dans une guerre urbaine ». Il a qualifié de « calomnies antisémites » les accusations contre Israël de cibler des civils ou de les affamer. Cet entretien, réalisé à distance et diffusé à 20h30, intervient pendant une vague d'indignation internationale soulevée par le bombardement meurtrier d'un camp de déplacés à Rafah dimanche. Dans la ville surpeuplée, l'armée israélienne poursuit ses frappes et son offensive terrestre lancée le 7 mai pour, selon elle, éliminer les derniers bataillons du Hamas.
Portant keffiehs et drapeaux palestiniens, les manifestants, dont les premiers sont arrivés avant 19h00 aux abords de la tour où se trouvent TF1 et LCI, sont venus en trois cortèges, a constaté une journaliste de l'AFP. Une partie d'entre-eux ont bloqué la voie rapide George Pompidou. À défaut de pouvoir atteindre la tour, isolée par un important dispositif policier, ils se sont réunis en un seul groupe, entouré par un cordon de forces de l'ordre, dans une ambiance bon enfant, aux cris de « Gaza, Gaza, Paris est avec toi », « Un Cessez le Feu maintenant » ou encore « Israël assassin ». Le rassemblement, qui s'est déroulé sans incident, a comptabilisé jusqu'à 2.500 personnes au plus fort de la soirée, selon la préfecture de police. À la dispersion, « quelques dizaines de manifestants se sont rejoints près de la gare Saint-Lazare, où les forces de l'ordre ont empêché la formation de cortèges sauvages », a indiqué à l'AFP une source policière, constatant un retour à la normale vers minuit.
« Je suis venue parce que je n'en peux plus de voir les images que nous voyons quotidiennement depuis des mois. Trop, trop de morts, d'enfants innocents. Il faut dire stop », a expliqué Nadège Roubaud, retraitée de 67 ans, à l'AFP. Soraya, étudiante en sciences politiques de 23 ans qui ne souhaitait pas donner son nom, a estimé qu'un « génocide (est) en cours et (que) personne ne fait rien. Balancer des bombes sur des camps de réfugiés alors que les gens n'ont nulle pas où aller... Pourquoi le monde ne dit rien ? », a-t-elle lancé.
Après l'annonce dans la journée de la diffusion de cette interview, plusieurs élus de La France insoumise et des associations se sont indignés. L'Association France Palestine solidarité (AFPS) a posté sur X: « la place de celui que le procureur de la Cour pénale internationale considère comme un criminel de guerre et un criminel contre l'humanité est devant la justice et non sur les plateaux télé en France ! » Urgence Palestine a encouragé, par le même biais, à « appeler pour exiger l'annulation de la diffusion », « interpeller (les chaînes) sur les réseaux sociaux » et se rassembler « à 19H00 devant TF1 et LCI ». « Non à l'apologie du génocide. BOYCOTT TF1! Rdv à 19H00 ce soir devant les locaux de TF1 et LCI! », a écrit le député Louis Boyard sur X. « Salariés et stagiaires du groupe TF1 prenez vos responsabilités! Sabotez cette émission », a renchéri la militante franco-palestinienne Rima Hassan, septième sur la liste LFI aux élections européennes, enjoignant ses abonnés à appeler la chaîne privée. « Il n'est pas question que la parole d'un criminel de guerre soit diffusée ce soir ».
La France insoumise a fait de la dénonciation de la situation à Gaza - qu'elle qualifie de « génocide » - un des axes principaux de sa campagne pour les européennes. Ses élus participent depuis lundi soir aux manifestations contre les bombardements sur Rafah, qui rassemblent des milliers de personnes. Une autre manifestation a eu lieu jeudi à Paris pour protester contre la présence d'entreprises israéliennes au salon d'armement Eurosatory. À Marseille, 300 personnes se sont réunies dans la soirée, selon la préfecture de police, sans incident à signaler à 22h00. À Nice, les organisateurs d'un rassemblement devant la mairie, ayant lieu chaque samedi depuis novembre, ont annoncé qu'il serait désormais quotidien, tant que les drapeaux israéliens resteront sur le fronton du bâtiment.
La guerre entre Israël et le Hamas a éclaté après une attaque sans précédent le 7 octobre sur le sol israélien à partir de la bande de Gaza par des commandos du mouvement islamiste palestinien, qui a entraîné la mort de plus de 1.189 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte réalisé par l'AFP à partir des chiffres officiels. L'opération de représailles d'Israël a fait plus de 36.000 morts, en majorité des civils, et entraîné une crise humanitaire majeure dans le territoire palestinien, selon le ministère de la Santé du Hamas.