En dépit d’un climat morose pour le groupe Condé Nast qui a annoncé se séparer de 5 % de ses effectifs dans le monde, le journal Vanity Fair a fêté sur scène sa première décennie.

« Brillant dehors, mordant dedans ». C’est ainsi que, depuis dix ans, s’affirme Vanity Fair en France, selon la formule de sa tête pensante et créatrice Anne Boulay, remerciée en 2018 après six ans à diriger dans l’ombre le magazine tandis que Michel Denisot en était l’ambassadeur. Aujourd’hui, la journaliste en est une pigiste de luxe et c’est son premier salarié, Olivier Bouchara qui le dirige, succédant ainsi à Joseph Ghosn.

Le mensuel, qui se régale de couvertures glamours - de Natalie Portman à, bientôt, Carole Bouquet -, a perdu de son lustre. Les 61 066 exemplaires de 2020 affichent 46 437 exemplaires en diffusion France payée en 2022-2023. Mais le dernier numéro de juillet, avec la top Gisèle Bündchen, a permis un rebond dans les ventes de 150 %, et celui dédié à Jane Birkin le mois suivant de 160 %, rejoignant celui provoqué par le numéro sur Marilyn Monroe l’été précédent.

Le nombre de pages a fondu mais la promesse est toujours là : « C’est un savant mélange entre le glamour et l’investigation », résume Olivier Bouchara, qui rappelle le palmarès des enquêtes publiées : prix Relay de la meilleure enquête de l’année pour l’article sur le duo Elkabbach-Khiroun, paru en 2017, prix de la meilleure enquête aux Assises internationales du journalisme en 2019 pour « Emmanuel Macron et la presse, histoire d’un mépris », prix Jeune Journaliste de la Fondation Varenne pour « Qui a volé ce Banksy » signé Hugo Wintrebert. Les années passent, les plumes d’Hervé Gattegno à Sophie des Déserts, en passant par Charlotte Chaffanjon, font place à de jeunes journalistes, souvent d’anciens stagiaires. L’heure n’est plus aux recrutements prestigieux.

Mais pour ses 10 ans, le 7 novembre, Vanity Fair a voulu briller sur scène, avec sa soirée baptisée « Vanity Fair Stories » durant laquelle étaient représentés certains des papiers emblématiques de la marque, illustrés par des extraits de films. Aurélie Dupont, ancienne directrice de l’Opéra de Paris, Menya Arab-Tigrine, avocate spécialisée dans la défense des criminels les plus redoutables, et Fanny Ardant, en couverture du numéro de novembre, étaient en vedette au Silencio des Prés, à Paris.

Malgré des restructurations réalisées en 2021, avec la mutualisation de rédacteurs en chef et la syndication de sujets des différentes éditions nationales, le CEO de Condé Nast Roger Lynch s’apprête à réduire de 5 % sa masse salariale, soit 270 postes supprimés sur les 5 400 employés à plein temps au niveau mondial. Toutefois, Olivier Bouchara se réjouit que la nouvelle configuration du groupe avec un rédacteur en chef éditorial européen, permet aux papiers français de s’afficher dans les éditions espagnoles ou italiennes.

Quant à l’emblématique Anna Wintour, directrice éditoriale du groupe à l’échelle mondiale, le dirigeant français la voit au moins tous les trimestres : « À chaque fois, les small talks sont peu présents avec elle. Elle préfère savoir tout de suite quels problèmes elle peut régler et s’empresse de le faire, en piochant dans son carnet d’adresses ». Olivier Bouchara travaille aussi au sein de la division Condé Nast Entertainment qui vend certaines histoires à des plateformes comme Netflix, qui a confié à Guillaume Nicloux l’adaptation en documentaire (Les Rois de l’arnaque) de l’enquête qu’Olivier Bouchara a publié dans le magazine. Preuve que les journaux recèlent de récits qui dépassent les frontières.

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