Directrice du France.tv StoryLab, unité des programmes immersifs de France Télévisions, Jeanne Marchalot évoque l’impact de l’intelligence artificielle sur les contenus audiovisuels.

La grève des scénaristes à Hollywood vient de prendre fin. Un accord, qui reste à ratifier, a été trouvé sur les salaires et sur l’encadrement de l’usage de l’IA. Comment accueillez-vous cette nouvelle ?

JEANNE MARCHALOT. L’encadrement de l’intelligence artificielle est nécessaire car elle va prendre une place importante dans le cinéma, l’audiovisuel, les nouveaux contenus. Il faut à la fois encadrer et rassurer, pour ce qui touche aux métiers de la comédie, ou du doublage.

Mise en danger des métiers, gestion des droits d’auteur, représentativité des productions de l’IA, vide législatif… Quelle question est la plus criante pour le secteur de l’audiovisuel ?

En tant que directrice d’une unité de programmes immersifs, qui sont à 95 % de l’image virtuelle, je pense qu’il y a un cadre à donner pour protéger les créateurs. En tant que service public, nous y faisons particulièrement attention. Il faut des garde-fous. L’Europe planche sur un IA Act, les États-Unis aussi. L’intelligence artificielle va faire partie de nos vies, il va falloir apprendre à travailler avec. Il s’agit d’une évolution de l’existant et il vaut mieux savoir comment son utilisation peut porter la création, plutôt que le contraire.

L’IA peut aussi représenter un gain de temps, de productivité, une aide à la création…

Si le cinéma c’est contempler, et la télévision regarder, l’immersif, c’est expérimenter. L’IA peut offrir un outil aux créateurs pour explorer encore plus les imaginaires. On se retrouve comme au début des effets spéciaux, à explorer des mondes que l’on ne pouvait auparavant pas raconter. La question est celle de la mise à disposition des outils pour faire émerger de nouveaux talents.

Quelles expérimentations ont déjà été menées sur le sujet ?

Je n’ai pas connaissance de tels tests. Au-delà de l’expérimentation, à France Télévisions, nous insérons l’IA dans nos processus de réflexion. Il faut être vigilant et protéger la création. Par exemple, je ne peux pas accepter que l’on me propose un projet entièrement créé par une IA. Autre enjeu : savoir décrypter les images.

Comment se situe la France dans ce domaine ?

Sur l’immersif, nous sommes excellents. Nous sommes le deuxième pays au monde à produire des contenus en VR, après les États-Unis et devant le Canada. Nous disposons de tout l’écosystème, notamment les écoles.

Quels sont les acteurs internationaux précurseurs dans le domaine ?

Parmi nos interlocuteurs figure Meta, avec qui nous coproduisons un projet sur l’ostracisation des jeunes filles pendant leurs règles, une expérience de 30-35 minutes qui sortira ultérieurement sur le store officiel du casque VR Meta Quest. Nous avons aussi des projets avec Pico, le casque de TikTok.

L’IA en débat au Mipcom

L’IA sera à l’honneur du Mipcom, marché international des contenus audiovisuels, prévu à Cannes du 16 au 19 octobre. L’ambition est d’aider les acteurs de cette industrie à mieux comprendre l’IA générative. Un nouveau « Unlocking AI Summit » est programmé le 17 octobre au matin. Des intervenants (Google Cloud, Largo.ai, Aive…) discuteront de l’impact de la technologie sur la télévision et le divertissement et aborderont des questions éthiques et juridiques. Ce sera également le cas au TV3.0, les 19 et 20 octobre à Marseille, avec de nouveau des discussions sur le sujet.

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