À peine quadra, Fanny Annoot-Oualia prend les rênes de la rédaction de 20 Minutes. Cette enthousiaste, passée par France Inter et Quotidien, veut réenchanter le journal gratuit devenu une marque média à 360°.

Dans les couloirs lumineux de 20 Minutes, à Levallois-Perret, son rire sonore tranche avec le silence de la vingtaine de journalistes, rivés sur leurs ordinateurs. Fanny Annoot-Oualia égaye ce décor, immaculé et vitré, de sa présence charismatique et enjouée. En cela, l’ancienne élève de l’IUT de journalisme de Bordeaux n’a pas changé. Édith Rémond, la directrice de l’école, se souvient parfaitement de cette élève « incroyablement chaleureuse et joyeuse. C’était toujours un plaisir de la voir dans les couloirs. »

Sauf qu’aujourd’hui, la salle de classe s’est muée en un bureau individuel dans ce plateau en open space et flex office. Les touches de rouge ponctuent la pièce, assorties à ses lèvres flamboyantes. D’abord, une sculpture en bois imitant à merveille des tulipes carmin dans leur vase, souvenir d’un périple avec sa cousine à Amsterdam et signe de ses convictions écolos réfractaires aux fleurs coupées. Ensuite, un mug aux couleurs de France Inter, dont le logo est discrètement caché, la radio dont elle a été directrice du numérique entre 2021 et 2023. Enfin, la photo côte à côte des anciennes patronnes de la station ou de la rédaction, Laurence Bloch et Catherine Nayl. « Deux femmes puissantes et volontaires, lâche-t-elle. Je me reconnais en elles. Catherine est un modèle d’intelligence, d’humanité et de professionnalisme, et Laurence a cette capacité à engager les équipes et à leur faire prendre de la hauteur malgré le roulis quotidien ». Une définition en creux de ses objectifs de management. À côté du cliché, trône la statue du gorille blanc de Richard Orlinski, tenant une bombe de peinture. C’est celle qu’a utilisée Laurence Bloch, comme elle l’avait promis, pour se teindre les cheveux en rouge le jour où sa station est devenue première de France. Sur son bureau, son ordinateur côtoie un écran où s’enchaînent les images de BFMTV sans le son. Tout est près d’elle. Comme pour l’encourager, la stimuler, la conforter et la challenger…

Rien ne lui fait peur professionnellement, à commencer par les aventures et les défis. Elle a bien retenu ceux que lui a énoncés Ronan Dubois, directeur général et directeur de la publication, qui est venue la débaucher de son poste dans la première radio de France. Ils se connaissaient de Konbini News qu’elle a cocréé avant de prendre la direction de la rédaction de Konbini. « Avec lui, on n’est pas souvent d’accord mais on arrive à s’entendre donc je sais qu’on forme un bon duo, reconnaît-elle. J’étais très bien à France Inter mais je m’étais éloignée de l’éditorial, et j’avais envie d’y revenir car je suis journaliste ». Elle adhère au challenge « d’écrire la deuxième partie de la vie de 20 Minutes, qui a vingt ans, et de réenchanter cette marque qui traite, avec son ton clair, court et précis, l’info en faisant toujours un pas de côté. En ces temps d’inflation, d’information parcellaire ou partielle, proposer une information neutre, gratuite et accessible est capital pour moi. Cela relève d’un rôle démocratique ». Sa mission ? « Repenser les formats et muscler l’offre éditoriale avec de grandes enquêtes comme celle sur les anabolisants si facilement accessibles aux jeunes, publiée la semaine dernière, poursuivre l’évolution vers numérique et établir des ponts avec 20 Minutes TV lancée cette année ».

Celle qui a appris à lire dans Le Canard enchaîné, sur les genoux de son papa, douanier à Dunkerque avant de se régaler avec cet autodidacte des questions aux gouvernements, a de beaux atouts pour y parvenir. D’abord, une expérience longue comme le bras que sa maman, ex-fonctionnaire à la Direction départementale de l’Équipement, scrute avec ravissement. Doublée d’une âme opiniâtre d’aventureuse, Fanny Annoot-Oualia a décroché son premier stage au culot. « Pour faire une école de journalisme, on me demandait d’avoir fait des stages et pour trouver des stages, on me demandait d’être dans une école. Un jour, la moutarde m’est montée au nez et j’ai pris mon bottin pour appeler toutes les rédactions. L’hebdo communiste La Liberté m’a répondu : "Ça ne sert à rien de râler. Venez" et j’ai couvert l’actu culturelle chez eux. » Un caractère déterminé, donc, mais jovial qui lui fait enchaîner les postes : reporter à France 3, journaliste puis rédactrice en chef à la chaîne marocaine Medi 1, éditrice à Public Sénat, cheffe d’information à Bangumi, qui produit Quotidien… Ceux qui l’ont croisée, comme Hugo Clément, ne veulent plus la lâcher. Édith Rémond, de l’IUT de Bordeaux, avait bien noté « sa motivation à faire ce métier, à l’aborder dans sa dimension éthique mais aussi à dynamiser une équipe et transmettre son enthousiasme sans être autoritaire. Je n’étais pas sûre qu’elle aurait un rôle de directrice mais je pensais qu’elle aurait un rôle fédérateur dans une rédaction ».

Parcours

2004. Reporter à France 3, après l’IUT de journalisme de Bordeaux.

2006-2012. Participe à la création de la chaîne marocaine Medi 1 TV dont elle devient responsable des programmes.

2012. Retour en France, elle travaille pour Public Sénat et Quotidien sur TMC.

2018-2021. Cocréé avec Hugo Clément Konbini News.

2021-2023. Directrice du numérique de France Inter.

Septembre 2023. Nommée directrice de la rédaction de 20 Minutes.

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