Arthur Dreyfuss, le PDG du groupe Altice en France, qui regroupe SFR, BFM ou RMC, est monté au créneau pendant qu’une enquête interne entend faire toute la lumière sur le scandale de corruption né au Portugal.

Une interview d’une page de son président Arthur Dreyfuss dans Le Figaro, une enquête interne au sein de l’entité française et le renfort en communication de crise de DGM Conseil… Altice France prend très au sérieux l’inculpation, le 13 juillet, pour corruption, d’Armando Pereira, le bras droit de Patrick Drahi. Objectif : éviter que le scandale impliquant une quinzaine de personnes au sein d’Altice ne contamine le groupe dans son ensemble. Celles-ci sont suspectées d’avoir constitué un réseau de fournisseurs et un système de rétrocommissions qui leur profitait en argent ou sous forme de biens. « Les investigations internes continuent de se dérouler, l’impact est circonscrit à moins de 2 % du volume d’achat d’Altice France et nous ne constatons strictement aucune conséquence sur l’activité », démine Nicolas Chatin, directeur de la communication d’Altice France.

Dans Le Figaro, Arthur Dreyfuss a précisé avoir « revu intégralement le processus des achats » et mis fin aux contrats avec les huit fournisseurs concernés. Le résultat de l’audit interne, mené en parallèle de l’enquête judiciaire portugaise, est attendu pour l’automne. Dans son entourage, on fait valoir que « c’est le propre d’une escroquerie » que de découvrir en « tombant de sa chaise » un scandale de corruption qui aurait fait « deux victimes : le fisc portugais et Patrick Drahi ». Ne sont-ce pas ses entreprises, ses propriétés qui ont été lésées ? Du reste, le parquet portugais reconnaîtrait au patron-fondateur ce statut de victime. Quant aux dizaines de fournisseurs mis en cause au total (entre 60 et 100), elles sont à comparer au millier de prestataires travaillant avec le groupe.

Reste une question centrale : pourquoi ni Patrick Drahi ni Altice n’ont à ce jour porté plainte pour escroquerie ? « Chaque chose en son temps », répond Arthur Dreyfuss au Figaro. Pour lui, il s’agit d’abord de coopérer avec la justice portugaise mais le groupe se réserve « tous les moyens de faire valoir [ses] droits ». « Ce serait un signe clair, net et précis de la volonté du patron de ne pas protéger Pereira, souligne Jean-Christophe Alquier, spécialiste de communication de crise, a minima on se dit qu’il le ménage, au pire on pense à une indulgence coupable ». Au-delà des opérationnels suspendus, ce serait aussi la preuve que Patrick Drahi n’a rien à craindre de consommer sa rupture avec son partenaire historique. Sauf s’il s’avère que le big boss ne pouvait pas tout ignorer des agissements de son associé. Les syndicats, qui ont plusieurs fois alerté sur les relations entre Armando Pereira et certains fournisseurs, s’étonnent aujourd’hui ne pas être intégrés à l’enquête interne.

Au-delà, il s’agit aussi d’éviter que l’incendie ne se propage à la dette – portée à hauteur de 24 millions d’euros par la France - sur fond de hausse des taux d’intérêt. Patrick Drahi a promis de céder des actifs – comme les sociétés d’installation de pylônes – mais exclut de vendre ses médias. « Le réseau en régions permet d’avoir beaucoup de contacts avec les décideurs des grosses villes, c’est un poids pour emporter des appels d’offres sur la fibre », observe un délégué syndical d’Altice Media.

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