La moitié de la population française est désormais couverte par la technologie DAB+ de radio numérique terrestre. Si de nouveaux acteurs entendent profiter de la place offerte par cette solution, les radios historiques semblent plus réservées. Et regardent clairement du côté de la voiture connectée. Un article également disponible en version audio.
Écoutez cet article :
Le DAB+ va-t-il révolutionner l’écoute de la radio en voiture ? Cette technologie permettant de diffuser la radio en numérique terrestre est déployée en France depuis 2020. Il y a urgence : la bande FM étant saturée, il n’est plus possible de diffuser en hertzien les nouvelles radios thématiques qui se multiplient sur internet. Grâce au numérique terrestre, treize radios peuvent être compressées sur une seule fréquence, qui est normalement occupée par une seule radio en FM. Cette technologie offre de nombreux avantages pour l’auditeur : la continuité du signal, permettant une écoute en continu lors des longs trajets, une qualité de son numérique (plus de grésillement), un choix plus important de programmes, des informations sur le programme diffusé…
Le déploiement du DAB+ a aussi permis l’émergence de nouvelles stations de radio telles que Skyrock Klassiks (rap des années 80), AirZen (mieux-être, mieux consommer, mieux vivre), la radio arabophone Monte Carlo Doualiya à Paris et à Marseille ou Le Figaro Radio (lire encadré).
Déploiement des équipements
Depuis cet été, près de 50 % de la population française est couverte par la technologie DAB+. Et l’équipement progresse aussi : en 2022, 15 % des individus de 13 ans et plus étaient équipés d’un poste fixe DAB+. Cette proportion devrait augmenter significativement alors que, depuis fin 2020, tous les véhicules mis en circulation doivent être équipés d’un poste radio compatible DAB+. « Le déploiement de la radio numérique, le DAB+, ouvre de nouvelles perspectives, tant dans le confort et l’expérience d’écoute pour l’auditeur que dans le dynamisme du paysage, en permettant l’arrivée de nouveaux acteurs et de formats originaux », s’est félicité Roch-Olivier Maistre, président de l’Arcom, dans son discours d’ouverture des Assises de la radio 2023 en juin. « L’interrogation sur la durée de la cohabitation FM/DAB + [est] inévitable », a-t-il souligné à cette occasion, même si aucun calendrier de remplacement de la FM par le DAB+ n’est fixé à ce jour.
« L’accélération du déploiement du DAB+ en France va permettre à la radio de conserver son leadership en voiture », estime Marie Renoir-Couteau, présidente de la commission publicité du Bureau de la radio. Selon les chiffres de l’organisme, 26 % des voitures qui circulent en France sont équipées d’un récepteur adapté, un chiffre qui pourrait dépasser les 50 % en 2030. « Le DAB+ est une technologie qui permet de compléter l’offre FM, notamment dans les zones où les fréquences FM sont rares », complète-t-elle.
Cohabitation
Depuis longtemps, les radios historiques se montrent plutôt réservées sur le déploiement du DAB+. « Nous soutenons évidemment les développements du DAB+, mais nous voyons surtout cette technologie comme un prolongement de l’accessibilité de nos contenus aux auditeurs », indique Alix de Goldschmidt, head of product & innovation à M6 (RTL, RTL 2…). « Le groupe NRJ veut être présent sur le DAB+, mais nous sommes très vigilants à la transition entre l’analogique et le numérique, alerte Emmanuel Dupouy, directeur de la stratégie digitale du groupe NRJ. Il faut que les deux cohabitent, laisser le temps au temps. » En clair, ce n’est pas la priorité.
Le « véritable enjeu » pour les radios, c’est la voiture connectée, rappelle Alix de Goldschmidt : « l’objectif est d’embarquer la radio directement dans l’interface de la voiture. » C’est pour cela que le groupe M6 veut rendre son appli mobile compatible avec Carplay et Android auto d’ici au premier trimestre 2024 (comme c’est le cas pour l’appli de Radio France depuis 2017). Dans ce domaine, les enjeux sont mondiaux et les constructeurs automobiles discutent avec des fournisseurs de contenu de taille internationale. Tesla a ainsi signé des accords avec Netflix et YouTube.
Par ailleurs, toutes les radios françaises (à l’exception de Skyrock et des radios indépendantes) se sont regroupées il y a deux ans pour développer Radioplayer, une application numérique diffusant l’ensemble de leurs flux radio. « Radioplayer est un outil qui permet de centraliser l’ensemble des contenus radio et d’avoir une puissance groupée pour discuter avec les constructeurs automobiles », résume Alix de Goldschmidt. Et pour ces derniers, c’est tout bénéfice puisque « cela leur permet d’avoir accès à l’ensemble de nos flux et de nos méta données via un interlocuteur unique ». Radioplayer regroupe désormais plus de 230 radios, 700 webradios et plus de 200 000 podcasts. « Cette capacité à se rassembler tous ensemble, et ces résultats, sont très encourageants pour l’avenir du média radio, se réjouit Marie Renoir-Couteau, même s’il reste encore du travail à faire pour faire connaître cet outil au plus grand nombre. »
La France encore à la traîne sur le DAB+
Si depuis cet été, plus de 50 % de la population française est couverte par le DAB+, la France est en retard dans le déploiement de cette technologie par rapport aux autres pays européens. Selon WorldDAB, en Allemagne, Grande-Bretagne, Belgique, Danemark, Norvège, Suisse ou aux Pays-Bas, plus de 95 % de la population a accès à cette technologie et, en Italie, 86 %, et les autoroutes y sont couvertes par le DAB+ à plus de 90 %. En ce qui concerne le taux d’équipement des foyers en récepteurs compatibles avec la technologie de radio numérique terrestre, là aussi l’Hexagone affiche son retard. 71 % des foyers norvégiens sont équipés de récepteurs pouvant recevoir le DAB+, 65 % en Grande-Bretagne, 34 % en Allemagne, 31 % au Danemark… contre seulement 14 % en France.
Le Figaro a lancé au printemps sa radio en DAB+ à Paris, Marseille et Nice. Cette couverture devrait progressivement être étendue à d’autres grandes agglomérations pour lesquelles Le Figaro va candidater auprès de l’Arcom. La radio reprend les émissions du Figaro en version audio et propose chroniques, récits et podcasts du groupe, et est assortie d’une programmation musicale « soft-rock ». Elle est accessible gratuitement sur les plateformes et sur l’appli Radioplayer.