Le directeur délégué aux relations avec les lecteurs du Monde et président du festival international de journalisme de Couthures-sur-Garonne revient sur les actualités de l'été.

Le milliardaire Rodolphe Saadé qui prépare avec le journaliste Bruno Jeudy un hebdomadaire baptisé La Tribune Dimanche, pour concurrencer un JDD en crise. 

Le cas du JDD est totalement atypique puisqu’il s’agit d’un quotidien paraissant uniquement le dimanche avec peu de concurrence jusque-là, d’où le lancement annoncé par Rodolphe Saadé et Bruno Jeudy. Dans un paysage où la presse hebdomadaire et quotidienne se cherche souvent, c’est un pari audacieux même s’il n’est pas assuré que ce créneau soit très porteur. Pour en revenir au JDD, la nomination prévisible de Geoffroy Lejeune à la direction de la rédaction soulève un questionnement majeur qui n’est autre que l’indépendance éditoriale. À cet égard, il faut souligner la timidité des législateurs français faisant les affaires d’actionnaires qui, pour la plupart, ne sont pas des professionnels du métier. Pour que cela cesse, il faut donner une personnalité juridique aux rédactions de tous les médias français et un droit de regard - plus ou moins développé - sur des nominations à des postes clés comme la direction générale ou la direction de la rédaction. 

Le phénomène Barbie ou quand le cinéma se met au service d'une marque.  

Il s’agit avant tout d’une affaire commerciale avec la naissance d’une nouvelle franchise cinématographique visant à relancer la croissance de la marque Barbie, en berne depuis quelque temps. Ce qui m’intéresse le plus, c’est la personnalité de la réalisatrice Greta Gerwig et du scénariste Noah Baumbach, tous deux issus de ce qu’on peut nommer le cinéma d’auteur. Abstraction faite des retombées pharaoniques et des records battus au box-office, cet alliage interroge de la même manière qu’avait pu interroger la collaboration entre l’univers Marvel et Chloé Zhao pour le film Les Eternels. Sans aller jusqu’à parler de bascule, il apparaît que les grandes compagnies et les grandes marques s’intéressent de très près à ce type de profils. D’où l’interrogation de savoir qui l’emporte à la fin ? Les intérêts commerciaux ou la vision de l’auteur ? 

Twitter (renommé X) qui a intentionnellement ralenti cet été le chargement des sites de concurrents et médias phares, lorsqu’un utilisateur cliquait sur un lien depuis le réseau social. 

Avec Elon Musk, plus rien ne surprend. Ce qui est plus étonnant en revanche, c’est ce changement de nom et de logo. Il eût été plus nécessaire de changer la médiocre modération ou la piètre qualité des échanges qu’une image ou une utilisation entrée dans le langage commun avec des termes comme un tweet ou tweeter. Twitter ou X reste de toute façon une énigme. Ce réseau a 20 ans et n’a quasiment jamais été rentable. Autrement dit : cela ne fonctionne pas plus avec Elon Musk qu’avec Jack Dorsey et on ne voit pas très bien où va le réseau.

Les canicules en France et le rôle de l'air conditionné dans l'aggravation de la pollution. 

Le changement climatique est une somme de petits détails et l’air conditionné en constitue un. C’est là tout le paradoxe, outre le fait qu’il est difficile d’en tenir rigueur aux consommateurs qui veulent se protéger de la chaleur. D’un côté, cela permet de sauver des milliers de vies. De l’autre, y avoir recours contribue au problème. Une solution acceptable serait de disposer de systèmes de climatisation plus propres et plus économes car il est illusoire d’empêcher les gens de se prémunir des épisodes caniculaires à répétition. Le réchauffement climatique pose aussi la question des modes d’habitats et de constructions. En parallèle des avancées technologiques, des méthodes plus traditionnelles et ayant fait les preuves de leur efficacité existent mais tombent régulièrement en déshérence. 

Le Conseil d’État suspend la dissolution des Soulèvements de la Terre. 

Quitte à répéter ce qui a déjà été dit, il s’agit d’un camouflet pour le gouvernement et Gérald Darmanin. Mais ce qui me questionne le plus, ce sont les conditions de cette dissolution. Comment peut-on vouloir dissoudre un mouvement ou quelque chose qui relève uniquement de l’informel ? Je reste très dubitatif quant à l’intérêt d’une telle mesure d’autant plus qu’il s’agit d’un mouvement porteur d’une parole audible. Il n’est pas question d’éluder les débordements et la radicalité de certains mais il faut faire preuve de mesure. L’écologie est une idéologie qui appelle à la responsabilité et non à la haine. 

Le festival international de journalisme de Couthures-sur-Garonne avec notamment Roberto Saviano pour invité d’honneur. 

Il s’agissait d’un véritable événement pour lui mais surtout pour nous. Pour l’occasion, le terme d’invité d’honneur a été préféré à celui de parrain [écrivain et journaliste italien, Roberto Saviano est connu pour avoir décrit et dénoncé les milieux mafieux dans ses écrits, en particulier dans son livre Gomorra qui met à nu le milieu de la Camorra]. Il est d’ailleurs resté quasiment durant les trois jours, ce qui a permis aux festivaliers de vivre des moments assez exceptionnels avec des prises de parole très suivies. De son côté, ce festival dans un village de 400 habitants s’est apparenté à une véritable respiration, avec un accueil assez décontracté lorsqu’on connaît les mesures de protection importantes qui l’accompagnent au quotidien. Au-delà de cet invité de marque, le festival a rencontré un succès supérieur aux attentes avec +30 % de fréquentation vis-à-vis de 2022, soit près de 8 500 festivaliers. Ce format de festival grand public qui propose des temps d’échanges et de réflexion avec des journalistes de tous horizons - TV, presse écrite, digital, médias locaux... - attire de plus en plus. Il y a clairement un appétit de la part du public pour ce moment citoyen qui n’hésite pas à aborder les questions qui fâchent avec des journalistes venus de médias comme BFM, France TV, Le Figaro ou Mediapart. 

RFI et France 24 interdits au Niger après le coup d'État ayant renversé le président Mohamed Bazoum. 

Le scénario était malheureusement prévisible et rappelle la situation vécue récemment au Mali et au Burkina Faso, où l’arrivée de juntes militaires au pouvoir s’est assortie d’une censure des médias sur fond de défiance vis-à-vis de la France. On a la triste impression d’être revenus une quarantaine d’années en arrière mais il ne faut pas se voiler la face. Notre histoire post-coloniale est loin d’être finie et le poids des intérêts français pèse lourd dans la balance.

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